Un pantalon, remonté des cales d’une épave coulée au large des États-Unis en 1857, a été vendu aux enchères à Reno, dans le Nevada.
Dans le petit monde de l’archéologie sous-marine, le steamship Central America occupe une place singulière. Ce bateau à vapeur de 85 mètres de long a sombré au large de la Caroline du Nord le 12 septembre 1857. Des 477 passagers et 101 hommes d’équipage qu’il comptait à son bord, seul un tiers a pu être secouru.
Le bilan humain du naufrage s’est établi, au final, à 425 tués. Si le nom de ce navire est entré dans la postérité, ce n’est pourtant pas pour ce drame humain mais en raison de la cargaison de 11 tonnes d’or qu’il transportait dans ses soutes (le bateau assurait la liaison entre côte ouest et côte est via le Panama et Cuba).
Recherchée pendant plus d’un siècle par les chasseurs de trésor, l’épave a été identifiée en 1988 et n’a cessé d’être fouillée depuis cette date. Cinquante millions de dollars de métal précieux ont pu être remontés du fond de l’eau. Mais aussi de la vaisselle et, plus étonnant, de fragiles et émouvantes plaques de daguerréotypes, ainsi qu’une poignée de vêtements miraculeusement préservés par la vase.
Un pantalon très convoité
Après un long marathon judiciaire visant à désigner le légitime propriétaire de ces découvertes, plusieurs ventes publiques ont été organisées depuis 2019. Après la dispersion des monnaies et lingots, c’est la cargaison d’objets intimes qui a été mise aux enchères le 3 décembre dernier à Reno (Nevada) aux États-Unis. L’un des 270 lots de cette vente a été particulièrement disputé. Il s’agit d’un pantalon usé retrouvé dans une malle en 1991.
Appartenant à un certain John Dement, un marchand ayant survécu au naufrage, cette malle contenait des vêtements et papiers dans un état de conservation parfait, parmi lesquels ce pantalon en toile épaisse blanche, évoquant celle que les Américains appellent le « Denim » en raison de son origine française (ce type de tissu étant initialement filé à Nîmes).
Le plus vieux Levi’s ?
Tracey Panek, expert en histoire des vêtements, aujourd’hui directeur des archives chez Levi Strauss, a expliqué au New York Times qu’il s’agissait probablement du plus vieux blue-jean de l’histoire. Mais qu’il était difficile de savoir si ce vêtement faisait réellement partie du catalogue Levi’s bien qu’un important chargement de la marque figure à son bord. Cette découverte n’en remet pas moins en cause l’état des connaissances en matière d’histoire des vêtements.
Jusque-là, on considérait en effet que les jeans, ces pantalons plébiscités par les mineurs et les garçons vachers du grand ouest (les mythiques cow-boys) avaient été inventés en 1872 lorsque le tailleur David Jacob mit au point les premières coutures renforcées de rivets métalliques afin d’éviter les risques de déchirure. (Un brevet concernant ces « points de renforcement » fut déposé en 1873). En tout état de cause, ce vêtement a été acheté pour 95 000 dollars. « Une prochaine vente aux enchères, organisée en février prochain, réserve d’autres surprises du même ordre », affirme le porte-parole de la compagnie Holabird Americana qui en est l’organisatrice.