Des scientifiques israéliens ont créé une espèce de poules pondeuses qui ne produisent que des femelles, une première mondiale qui pourrait contribuer à mettre fin à l’abattage de milliards de poussins mâles dans le monde chaque année.
Les poussins mâles des poules pondeuses, qui ne sont pas utilisés pour la consommation humaine et ne produisent pas d’œufs, sont largement détruits par broyage ou gazage, une pratique dénoncée par les organisations de défense des animaux et que plusieurs pays européens ont interdite.
C’est le cas de l’Allemagne qui a adopté une législation interdisant la mise à mort des poussins mâles début 2022, tandis que la France a décidé de bannir cette pratique à compter du 1er janvier prochain. Une dérogation a toutefois été introduite pour les poules blanches qu’il est difficile de sexer.
Pour les autres, des machines devront être mises en place pour déterminer le sexe des embryons dans l’œuf (ovosexage) et donc éliminer ceux qui contiennent des mâles, plutôt que les poussins eux-mêmes.
Mais l’expert en embryologie Yuval Cinnamon, à la tête de l’équipe de scientifiques israéliens ayant mis au point une nouvelle espèce de poules ne faisant naître que des femelles, estime qu’il s’agit de la seule technique véritablement fiable.
L’embryon mâle ne se développe pas
« C’est une première mondiale, la seule solution facile à mettre en œuvre pour les acteurs de l’industrie, car basée non pas sur le tri – l’identification souvent erronée des œufs porteurs d’embryons mâle ou femelle – mais sur la détermination du sexe a priori », explique ce chercheur à l’Institut national israélien de recherche en agriculture.
Basé en banlieue de Tel-Aviv, l’institut Volcani a récemment annoncé cette découverte en partenariat avec la société agroalimentaire américano-israélienne Huminn Poultry, spécialisée dans la production durable de volailles, après sept ans de recherches. Cette nouvelle technique doit être commercialisée par Huminn Poultry dans un à deux ans.
La technologie consiste à introduire une modification génétique sur le chromosome qui, lorsqu’il est présent dans l’embryon du poussin, conduit au développement de mâles. Ainsi modifié, l’embryon mâle ne se développe pas et, de leur côté, « les embryons femelles (qui portent le chromosome W) se développent normalement sans être génétiquement modifiés et éclosent normalement », explique Yuval Cinnamon.
«Une vraie réponse au problème»
« Cela permettra d’apporter une vraie réponse au problème probablement le plus grave dans le monde aujourd’hui en termes de bien-être des animaux, en tout cas en termes de chiffres », ajoute-t-il, disant que quelque sept milliards de poussins mâles étaient abattus chaque année dans le monde.
À cela s’ajoutent les bienfaits en termes de développement durable : économies d’espace et d’énergie pour faire fonctionner les incubateurs et pour éliminer les poussins mâles. « Aujourd’hui, l’élimination de chaque poussin mâle coûte un dollar, il s’agit donc de sept milliards d’économies par an », relève Yuval Cinnamon.
En octobre, les ministres européens de l’Agriculture se sont dits prêts à envisager une interdiction dans l’ensemble de l’Union européenne du broyage routinier des poussins mâles dans la filière des poules pondeuses, sous réserve des résultats d’une étude d’impact de Bruxelles.