La professeure avait fait une remontrance à une élève qui s’était présentée en classe vêtue d’une abaya. Cette dernière avait enregistré puis diffusé l’échange sur les réseaux sociaux.
Une professeure d’espagnol du lycée Antoine Bourdelle de Montauban (Tarn-et-Garonne) a été placée sous protection policière après avoir fait une remontrance à une élève, qui s’était présentée en classe vêtue d’une abaya, un vêtement féminin traditionnel dans les pays du Maghreb et au Moyen-Orient. L’incident s’est déroulé avant les vacances de la Toussaint.
« Dès que je suis rentrée en classe, bah en fait la prof m’a dit: ‘mais qu’est ce que c’est que cette robe de chambre’, en voyant que j’avais une robe dans ce style, une abaya ça s’appelle », a expliqué la lycéenne de première rencontrée par BFMTV.
La professeure filmée à son insu
À la fin du cours, l’élève est convoquée. Elle va alors enregistrer l’échange à l’insu de sa professeure, puis le diffuser sur les réseaux sociaux. Alerté par les services de l’Éducation nationale, le proviseur du lycée Bourdelle, le plus grand de l’académie de Toulouse en termes d’effectif, a décidé de saisir la justice. La professeure a également porté plainte.
Patrouilles policières
Après l’incident, la lycéenne, s’estimant humiliée, a décidé de lancer une pétition. À BFMTV, elle indique qu’elle a placardé dans son lycée des affiches, « qui expliquaient qu’il fallait récolter des signatures pour que les élèves puissent venir habillés n’importe comment, comme ils veulent, pas forcément en abaya, vraiment n’importe quelle tenue ».
Selon nos confrères de la Dépêche du midi, des affiches ont bien été placardées aux abords de l’établissement, mais elles appelaient à un rassemblement le 9 novembre, invitant les élèves à venir en abaya ou en robe longue. Des forces de l’ordre ont même été déployées autour du lycée, et patrouillent aux heures d’entrée et de sortie.
Toujours selon La Dépêche, l’élève a été auditionnée au commissariat avec plusieurs autres personnes. « On voit qu’il y a eu un travail sur la vidéo avec un sous-titre avant de la publier », a précisé une source proche de l’enquête.
« Ça m’a rendu tellement mal »
L’élève a de son côté porté plainte contre sa professeure d’espagnol, estimant avoir été humiliée devant toute sa classe, mais également contre son professeur d’histoire-géographie. À BFMTV, elle a indiqué avoir arrêté les cours. « J’ai arrêté le lycée à cause de cette histoire en fait, ça m’a rendu tellement mal, que j’en pouvais plus mentalement, j’ai dû arrêter », avance-t-elle.
Cet incident intervient dans un contexte de hausse des atteintes à la laïcité dans les établissements scolaires français. Selon les chiffres dévoilés jeudi par le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye, en octobre, 720 signalements à la laïcité ont été réalisés, contre 313 en septembre. 40% de ces signalements concernaient des incidents liés au port de tenues ou de signes religieux.
Le port de signes et tenues manifestant «ostensiblement une appartenance religieuse» est interdit depuis la loi de 2004 dans les lycées publics. Et le phénomène des abayas et des qamis, leur pendant masculin, est en forte augmentation, a reconnu début octobre le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye. «Il est vrai que depuis un an, le nombre de signalements relatifs à des tenues, disons islamiques, augmente. Il y a le fameux phénomène des abayas», déclarait-il, ajoutant que cette réalité pouvait être «sous-tendu(e) par des agitateurs professionnels, qui ne veulent ni de bien à l’école, ni de bien à la République».