D’après une liste diffusée sur les réseaux sociaux, la présidence du groupe d’études dédié à l’antisémitisme devrait revenir à un député du Rassemblement national. Mais cette répartition va faire l’objet d’une concertation, et ne sera définitivement arrêtée qu’en décembre.
Le Rassemblement national à la tête du groupe d’études dédié à l’antisémitisme à l’Assemblée nationale ? La perspective a fait bondir Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif). Sur Twitter, celui-ci a partagé un document circulant parmi les élus et collaborateurs parlementaires, qui présente les «intitulé des 80 groupes d’études retenus et attribution de leur présidence aux groupes politiques» décidés lors d’une réunion de la délégation du Bureau chargée des groupes d’études qui s’est tenue mardi.
J’appelle les députés et @YaelBRAUNPIVET à tout faire pour empêcher cette perspective, qui ferait perdre toute légitimité à ce groupe d’étude et déshonorerait l’ensemble des participants.
La lutte contre l’antisémitisme ne doit faire l’objet d’aucune instrumentalision politique.— Yonathan Arfi (@Yonathan_Arfi) November 9, 2022
Or, il est justement prévu que le groupe intitulé «antisémitisme» soit présidé par un député du groupe Rassemblement national. Après avoir pris connaissance du document, Yonathan Arfi s’est donc empressé de dénoncer «une ineptie et une manipulation inacceptables». De nombreux députés ont également déploré cette potentialité, comme l’élu de La France insoumise (LFI) Thomas Portes, ou la députée Europe-Ecologie-les-Verts (EE-LV) Sandrine Rousseau.
Le #RN qui a les groupes d’études Antisémitisme et SIDA.
Un parti fondé par des SS et dont un des dirigeants historique parlait de mettre les « sidaïques » dans des « sanatoriums ».
C’est impossible !— Sandrine Rousseau (@sandrousseau) November 9, 2022
Jamais le RN ne doit obtenir la présidence du groupe sur l’antisémitisme. Ce parti dont les statuts on été déposés par un SS, dont le dirigeant parlait des chambres à gaz comme un détail de l’histoire, dont un député tenait un librairie spécialisée dans les ouvrages antisémites.
— Thomas Portes (@Portes_Thomas) November 9, 2022
Les groupes d’études sont des structures rassemblant députés ou sénateurs sur des thématiques allant des jeux vidéo au cheval. «Leur mission est d’assurer une veille juridique et technique sur des questions trop spécialisées pour faire l’objet d’un examen suivi par les commissions permanentes», un rôle de suivi qui peut se traduire par des auditions de personnalités ou encore des visites de sites, explique le site de l’Assemblée nationale.
Pour former des groupes d’étude, les députés doivent émettre des demandes de création, ensuite instruites par une délégation spécialisée du Bureau de l’Assemblée nationale : la délégation chargée des représentants d’intérêts et des groupes d’études – délégation présidée par un vice-président de l’Assemblée nationale, actuellement le RN Sébastien Chenu. «Avant de présenter ses conclusions, la délégation consulte la commission permanente compétente afin de savoir si l’objet du groupe lui semble compatible avec l’exercice de ses compétences réglementaires et la conduite de ses travaux. Ensuite, sur rapport de sa délégation, le Bureau donne ou refuse son agrément à la création du groupe d’études», détaille l’Assemblée nationale. L’agrément permet aux groupes d’études de bénéficier de quelques facilités matérielles, mais ne donne en revanche droit à aucun crédit de fonctionnement.
Décision attendue le 7 décembre
C’est également au Bureau que revient la tâche de «désigner le groupe politique auquel est attribuée la présidence du groupe d’études». Charge au groupe politique concerné d’ensuite déterminer en son sein l’élu qui présidera le groupe d’études. Dans les faits, la présidence est le plus souvent attribuée au député qui avait demandé la création du groupe.
A en croire la liste diffusée sur les réseaux sociaux, c’est ainsi qu’un député Rassemblement national pourrait se hisser à la tête du groupe d’études sur l’antisémitisme. Par le jeu des demandes de chaque groupe parlementaire, le RN s’est effectivement porté volontaire pour présider douze groupes d’études, dont celui-ci. Mais comme Yonathan Arfi le souligne par l’emploi du conditionnel, rien n’est encore fait.
Pour cause, cette première version de la liste reste à débattre, la procédure «pour la création et l’attribution des groupes d’études» étant toujours en cours, comme l’a rappelé sur Twitter la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. «Ce processus se poursuit par une phase de concertation», ajoute-t-elle. Une réunion doit notamment se tenir mercredi prochain, le 16 novembre.
📄 Groupes d’études : je rappelle qu’aucune liste, aucune création, aucune attribution n’est actée avant décision du bureau de l’Assemblée ⤵️ pic.twitter.com/yQD2LE9kUK
— Yaël Braun-Pivet (@YaelBRAUNPIVET) November 9, 2022
Et à l’arrivée, c’est «le bureau de l’Assemblée nationale, seul compétent, qui décidera, le 7 décembre prochain, de la création des groupes d’études et de la répartition des présidences et vice-présidences», écrit Yaël Braun-Pivet. Qui insiste : «aucune liste ne saurait être considérée comme actée avant ce terme». D’ici là, Yonathan Arfi, joint par CheckNews, «appelle tous les groupes politiques à travailler à une autre répartition, pour éviter que le groupe “antisémitisme” soit présidé par l’extrême droite».
Il est habituel que la répartition des présidences des groupes d’études donne lieu à d’âpres batailles. Mais pour ce «cru» 2022, le combat porte aussi sur le nombre de groupes qui recevront un agrément. Le 20 décembre 2017, le Bureau de l’Assemblée nationale avait agréé 113 groupes d’études. C’est trop pour Yaël Braun-Pivet, qui avait demandé en septembre à faire passer leur nombre à 58. Finalement, «le souhait a été de les rationaliser» en portant leur nombre à 80, a expliqué à l’AFP Sébastien Chenu.
Une réduction qui supposait nécessairement de supprimer certains des groupes d’études précédemment agréés. Et la sélection retenue est loin de faire l’unanimité. Dans un communiqué diffusé le 28 octobre, les députés LFI ont déploré le tri opéré, jugeant que Sébastien Chenu «s’attaque aux droits des personnes en situation de handicap, des personnes LGBT, des migrants», préférant «favoriser des groupes sur la thématique de l’industrie du luxe ou de la chasse». «Il a fallu faire des choix, et LFI n’a participé à aucune réunion» en ce sens, a pointé en retour le député d’extrême droite.
par Elsa de La Roche Saint-André
(commentaire affiché par mes soins sur http://www.francetvinfo.fr)
tous les espoirs sont permis au RN puisque la macronienne Braun-Pivet, qui n’hésite pas à mettre en avant ses « origines » lorsqu’elle y trouve avantage, s’est contentée de dire que ‘Aucune création, aucune attribution n’est actée avant décision du bureau de l’Assemblée’. Bigre…