Cinquante ans après, les victimes attendent encore des réponses sur la sanglante prise d’otage d’athlètes israéliens par un commando palestinien.
Il y a cinquante ans, le 26 août 1972, débutent les Jeux olympiques de Munich. Ils doivent montrer la République fédérale d’Allemagne comme une démocratie ouverte sur le monde, et faire oublier le douloureux souvenir des JO de 1936 organisés à Berlin par le régime nazi. Mais le 5 septembre, l’organisation palestinienne Septembre noir prend en otage onze sportifs israéliens. Au terme d’une succession d’erreurs et d’une gestion catastrophique par les autorités allemandes, la prise d’otages se termine dans un bain de sang. Munich 1972 : les Jeux de la terreur reconstitue le déroulement des événements. Entretien avec Bence Máté, réalisateur du documentaire avec Lucio Mollica.
Vous racontez minutieusement la prise d’otage et son contexte, avec certains des protagonistes.
Presque tous ceux que nous avons contactés ont accepté de parler, ils étaient prêts. Leur vie a été déterminée par cette journée. Le 5 septembre 1972, huit Palestiniens âgés d’une vingtaine d’années, nés dans le camp de réfugiés de Chatila, au Liban, pénètrent à l’aube dans le village olympique et prennent en otage onze membres de la délégation israélienne. C’est un carnage, tous les otages, un policier ainsi que cinq des huit terroristes sont tués.
Que réclamait le commando ?
Le commando « Septembre noir » demandait la libération de plus de 200 prisonniers politiques palestiniens détenus en Israël. Le gouvernement israélien de Golda Meir a rejeté sa demande.
Comment comprendre la gestion catastrophique des autorités allemandes ?
L’Allemagne n’a jamais connu d’attentat de cette ampleur. Elle n’a pas d’unité d’élite formée et a refusé l’intervention de l’unité spéciale israélienne. Les autorités allemandes vont échouer à chaque étape de la gestion de crise. Mais il n’y a pas eu d’enquête et aucun responsable n’a eu de compte à rendre.
Les Jeux olympiques reprennent juste après le bain de sang…
C’est difficile à imaginer aujourd’hui. Les Jeux reprennent dans la journée qui suit, tandis que les survivants de la délégation israélienne rentrent, le 7 septembre, à Tel Aviv, avec onze cercueils à bord. Les autorités allemandes ont expliqué que « les otages étaient condamnés » dès le début. Pour l’Allemagne, ces Jeux de 1972 étaient particulièrement importants. Ils devaient effacer l’image des JO de Berlin en 1936 organisés par Hitler. Leur priorité était de sauver les Jeux.
En représailles, les services secrets israéliens ont tué plusieurs dirigeants palestiniens en Italie, à Paris, à Chypre et à Beyrouth. En revanche, Israël n’a demandé aucun compte à l’Allemagne. La « real politik », les intérêts stratégiques et économiques communs, l’ont emporté. En 1973, Willy Brandt a été le premier chancelier allemand à se rendre en Israël.
La libération très rapide des preneurs d’otage interroge toujours.
Les trois auteurs survivants ont été libérés, en échange des passagers d’un avion de la Lufthansa détourné le 29 octobre 1972. Or, des documents montrent que dix jours avant, la ville de Munich préparait déjà l’extradition des terroristes. L’Allemagne était ainsi débarrassée de ce tragique événement. C’est l’une des zones d’ombre qui n’ont jamais été éclaircies.
Qu’espère-t-on de la commission d’enquête qui doit être mise en place ?
À l’approche du 50e anniversaire, les victimes ont obtenu la mise en place d’une commission d’enquête internationale. Elle devra, entre autres, faire la lumière sur la gestion de la crise et les circonstances de la libération des preneurs d’otage.
France 5, dimanche 25 septembre, 20 h 55 (1 à 4/4). Et en replay jusqu’au 02.02.23