L’objectif de ce centre est de permettre à des start-up israéliennes de mettre au point des solutions couvrant des besoins médicaux encore non satisfaits, en collaboration avec l’équipe de l’hôpital Tel Hashomer.
Des bureaux aux murs vitrés entourent une vaste cuisine à l’américaine. Béton ciré, lampes design, des jeunes gens s’agitant en petits groupes alors qu’un robot fait une démonstration aux visiteurs. Une atmosphère digne d’une start-up de la côte Ouest américaine. Nous sommes pourtant dans la banlieue de Tel-Aviv, à Ramat Gan, au cœur du plus grand hôpital du Proche-Orient.
Avec ses 2000 lits, 1700 médecins et 1,9 million de consultations par an, Sheba Tel Hashomer détient les records. L’établissement public est considéré comme l’un des dix meilleurs hôpitaux au monde, selon Newsweek. Son centre d’innovation a été cité en exemple par l’Institut Montaigne. Le directeur général de l’OMS s’y est rendu la semaine dernière, annonçant une collaboration en matière de santé digitale à destination des pays en développement.
Partenariats avec des hôpitaux du monde entier
Ce centre baptisé ARC (Accélérer, Redesigner, Collaborer) a vu le jour il y a trois ans. Objectif: permettre à des start-up israéliennes, créées à partir de brevets de Sheba ou venues de l’extérieur, de mettre au point des solutions couvrant des besoins médicaux encore non satisfaits, en collaboration avec l’équipe de l’hôpital.
Ces start-up bénéficient des partenariats de Sheba avec des hôpitaux du monde entier. «L’essentiel de l’innovation vient aujourd’hui des start-up, note Eyal Zimlichman, le fondateur du centre. Nous devons être capables d’optimiser davantage encore notre collaboration avec elles.» Le champ d’action concerne la télémédecine, la médecine de précision, la réalité virtuelle, les équipements médicaux et l’intelligence artificielle. Aidé d’un comité d’experts (Amazon, Microsoft, AP-HP, Boston Scientific…), ARC planche sur l’avenir de l’e-santé.
Au cœur du modèle d’ARC, la collaboration entre start-up, universitaires et médecins, et le recours aux partenariats public-privé. Sheba participe à 3600 projets de recherche en cours et 16 programmes académiques. La richesse du centre provient aussi de sa base de données de 2 millions de patients et des 8 millions de clichés d’imagerie accumulés depuis les années 1990 par l’hôpital et digitalisés. «Nous avons d’emblée investi dans la création d’une infrastructure pour abriter ces données, explique Eyal Zimlichman. Avoir beaucoup de données ne suffit pas. Ce qui compte pour alimenter l’innovation, c’est la façon dont elles sont structurées, rendues accessibles, et la création de valeur qui en résulte.» ARC partage ainsi ces données via des partenariats avec des hôpitaux du monde entier.
L’ambition de Sheba, qui n’utilise plus de papier depuis vingt ans, est de s’appuyer entièrement sur l’intelligence artificielle d’ici 2030. Pour y parvenir, l’équipe du centre procède à une cartographie des différentes tâches hospitalières afin de déterminer celles qui peuvent être automatisées. Avec pour objectif d’alléger la charge des soignants, de faciliter la prise de décision et d’éviter les erreurs médicales.
Plus de 100 start-up
Près de 100 start-up gravitent dans l’écosystème du centre. L’an passé, six d’entre elles ont levé 110 millions de dollars. L’objectif de Sheba est d’atteindre 1 milliard de dollars d’ici dix ans. Parmi elles figure Aidoc (66 millions de dollars levés en 2021), qui a mis au point un outil à base d’intelligence artificielle, le premier du genre à être homologué par la FDA, l’autorité sanitaire américaine. Il permet d’optimiser le diagnostic en alertant les radiologues sur les clichés suspects. Il est aujourd’hui utilisé dans 1000 hôpitaux à travers le monde.
Avec ses robots autonomes, Seamless Vision s’est attelé aux défis logistiques et de personnel de l’hôpital. Depuis près d’un an, ils assurent le transport de traitements de chimiothérapie de la pharmacie de l’hôpital jusqu’au service d’oncologie. Un moyen de réduire le temps d’attente des patients et d’économiser du personnel. «Sheba nous a aidés à mieux comprendre la spécificité de l’environnement hospitalier», détaille Amir Nardimon, le PDG de la société, qui aura déployé trois robots d’ici à la fin de l’année.
Un écosystème qu’ARC met à profit dans les relations qu’il noue avec les laboratoires pharmaceutiques. Avec Janssen, qui a fait partie de ses premiers partenaires, il collabore dans des domaines comme l’oncologie ou la gastroentérologie. L’objectif est d’aider le laboratoire à aller au-delà du médicament en bâtissant une offre thérapeutique complète pour les patients, avec une solution digitale.