Suite à l’interpellation de nombreuses féministes regroupées sous la bannière «Relève féministe», la députée de Paris a mis en cause lundi soir sur France 5 le numéro 1 d’EE-LV, visé en interne par un signalement pour violences sur son ex-compagne.
Quelques lignes à la fin d’un papier du Figaro en juillet et puis… plus rien pendant plus de deux mois. Jusqu’à ce lundi, en fin d’après-midi, lorsque des militantes féministes de gauche, encartées ou non, engagées dans le mouvement NousToutes, ont décidé de faire ressurgir le cas Julien Bayou, secrétaire national d’Europe Ecologie-les Verts. Le nouveau député de Paris fait l’objet d’un signalement auprès de la cellule des violences sexuelles et sexistes du parti écologiste (VSS), une information passée sous les radars… jusqu’à l’affaire Adrien Quatennens, désormais visé par une enquête préliminaire pour violences conjugales, comme l’a confirmé le parquet de Lille.
Après que le coordinateur de La France insoumise a reconnu dimanche – après la révélation d’une main courante déposée contre lui – avoir giflé sa femme, un mouvement de près de 200 féministes est né. Avec le hashtag #Relèveféministe, elles ont décidé d’interpeller EE-LV sur Twitter : «La cellule VSS a été saisie en juillet après des accusations de violences commises par Julien Bayou sur son ex compagne. Comment s’assurer que les militantes soient en sécurité ? Aucune mesure ne semble avoir été prise, pourquoi ?» demandent-elles.
Interrogée lundi soir sur ces interpellations, Sandrine Rousseau a affirmé dans l’émission C à vous, sur France 5, avoir échangé avec l’ex-compagne de Bayou. Cette dernière étant alors «très déprimée», au point qu’elle «a fait une tentative de suicide quelques semaines après». L’écoféministe a accusé le secrétaire national de «comportements de nature à briser la santé morale des femmes» et assuré qu’au parti, cela «fait partie des questions qui vont venir sur la table». Interrogée en toute fin d’émission sur la possibilité pour Bayou de devoir renoncer à ses fonctions au sein de EE-LV – qu’il doit quitter en décembre lors d’un congrès – Rousseau a répondu : «On verra. Step by step.»
«Une forme d’instrumentalisation» pour Bayou
Dans un article du Figaro en juillet, révélant alors ainsi que la commission d’EE-LV avait été saisie par l’ex-compagne de Bayou, le numéro 1 du parti expliquait que les faits reprochés faisaient «suite à une rupture douloureuse et difficile», et assuré que cette dénonciation ne concernerait, selon lui, «en rien des violences sexistes ou sexuelles». Bayou voyait aussi dans ces accusations «une rancœur» que son ex-compagne «ne cach[ait] pas puisqu’elle [lui avait] clairement écrit, trois jours après avoir saisi la commission interne d’EE-LV : “Inquiète-toi. Je vais revenir et en force. […] La chute va être douloureuse.”» «Il s’agit malheureusement d’une histoire qui se termine dans la souffrance, et d’une rupture qui s’accompagne de menaces à peine voilées à mon endroit et d’une forme d’instrumentalisation que je ne peux que déplorer», poursuivait-il. Depuis, silence radio.
À l’instant @sandrousseau à propos de Julien Bayou https://t.co/4aau7deiZJ
— Matthieu Bonhoure (@mbonhoure) September 19, 2022
Avant l’accusation de Rousseau, les militantes de la «Relève féministe» avaient attaqué le travail en inondant les réseaux sociaux. Parmi ses personnalités figurent notamment la féministe et initiatrice du #MeTooThéâtre, Marie Coquille-Chambel, ou encore la co-fondatrice de l’Observatoire des Violences sexuelles et sexistes, Mathilde Viot, qui a appelé lundi Quatennens à «se retirer de la vie publique». Elles sont près de 200 et ne revendiquent pas de leader. Leur objectif ? S’attaquer à «l’impunité» et «l’omerta» qui subsiste autour des VSS en politique. Y compris à gauche où le traitement réalisé par les cellules de veille reste, selon elles, insuffisant.
«La République des potes»
Le tweet de Jean-Luc Mélenchon dimanche a été la faute de trop pour ces activistes. Après le retrait de Quatennens de ses fonctions de coordinateur, Mélenchon avait dénoncé «la malveillance policière, le voyeurisme médiatique, les réseaux sociaux» et salué la «dignité» et le «courage» de cette figure montante de LFI, sans un mot pour sa compagne ou au sujet des violences conjugales. Avant d’ajouter, quelques heures après, qu’il n’était pas «indifférent» à Céline Quatennens. De quoi attiser la colère de ces féministes. «La République des potes, des mecs, des couilles, des gars sûrs. Ça dégage. Vivement la relève, qui sera féministe ou ne sera pas», écrivait sur Twitter Auriane Dupuy, militante du parti Génération·s, membre du pôle écologiste.
La prochaine étape pour ces femmes est la parution d’une tribune. Les suites à donner dépendent «des réactions de la sphère politique face à l’impunité systématique des agresseurs», explique l’une d’entre elles. Les militantes sont nombreuses à déjà relayer un article de Mediapart de lundi soir sur les «faiblesses de La France insoumise» que révèle l’affaire Quatennens. Le site dévoile au passage que le député insoumis Thomas Portes, ancien du PCF, est lui aussi visé par un «signalement» au sein du comité de suivi contre les VSS de LFI au sujet de messages jugés inappropriés.