Montée sur le trône quatre ans après la fin du mandat britannique en Palestine, la reine Elizabeth II ne s’est jamais rendue en Israël. Une absence d’autant plus remarquée qu’elle s’est déjà rendue dans d’autres pays de la région.
Ayant visité quelque 117 pays durant son règne, Elizabeth II n’a pourtant pas parcouru tout le globe, et parmi les oubliés figurent Israël et les territoires palestiniens. Le fait demeure noté dans l’Etat juif. Le quotidien israélien de gauche Haaretz a soulevé la question dès les années 1980, durant une visite de Margaret Thatcher, et a fini par qualifier cette absence de « boycott ».
« La triste mais inévitable conclusion est qu’[Elizabeth] fait elle-même partie de cette méchante, mesquine intrigue britannique qui consiste à dénier à Israël le vestige de légitimation qu’il demeure en leur pouvoir d’accorder ou de refuser une visite royale », écrivait il y a une décennie David Landau, ancien rédacteur en chef du quotidien.
Elizabeth II est montée sur le trône quatre ans après la fin du mandat britannique en Palestine, conquise durant la première guerre mondiale sur l’Empire ottoman. Durant ce quart de siècle, le Royaume-Uni y avait favorisé l’implantation d’un « foyer juif », avant d’en être chassé sous la pression du mouvement sioniste.
L’absence d’Elizabeth II fut d’autant plus notée qu’elle s’est rendue à de multiples reprises dans le monde arabe, notamment en Jordanie voisine, en 1984. Adjuvant de la diplomatie britannique, la reine paraît s’en être strictement tenue aux vues du ministère des affaires étrangères britannique, qui, durant des décennies, a considéré qu’une telle visite dépendait de progrès dans le processus de paix.
En 2018, la visite officielle du prince William
Mais plusieurs membres de la famille s’y sont bien rendus. A titre privé d’abord, pour son époux, le prince Philip. En 1994, il reçoit la distinction de « Juste parmi les nations » attribuée de façon posthume à sa mère, Alice de Battenberg. Cette figure originale de la famille avait caché une famille juive chez elle, à Athènes, durant la seconde guerre mondiale, puis fondé, une fois veuve, une communauté hospitalière orthodoxe. Morte au côté de son fils, au palais de Buckingham, elle repose dans l’église orthodoxe russe Sainte-Marie-Madeleine du mont des Oliviers, à Jérusalem.
Le prince Charles, réputé attaché à sa grand-mère, et qui assiste régulièrement à des rassemblements de la communauté juive britannique, a pour sa part été plus assidu à Jérusalem. Il s’est rendu aux obsèques du premier ministre Yitzhak Rabin en 1995, puis à celles de Shimon Pérès en 2016 – sans que ces déplacements n’incluent de rencontres diplomatiques. Il est retourné en Israël en 2020, parmi plusieurs dizaines de chefs d’Etat et de gouvernement, pour un Forum mondial de l’holocauste.
Enfin en 2018, le prince William a effectué la première visite officielle de la famille en Israël et dans les territoires palestiniens, l’année des soixante-dix ans du retrait britannique et de l’indépendance d’Israël. La presse anglaise multipliait alors les conjectures sur les raisons de cette visite symbolique : simple passage du temps, nécessité de diversifier les liens du royaume après le Brexit, ou encore réchauffement des relations sous le gouvernement de Theresa May.
Et oui, on peut le dire : malgré toutes les louanges reçues des officiels juifs, israéliens ou originaires de la diaspora, la reine Elizabeth ne nous aimait pas!
Louis Imbert