La bibliothèque de l’Université de l’État de Californie ne portera plus le nom d’Henry Miller Madden. Cet ancien bibliothécaire du campus de Fresno s’est révélé être un sympathisant nazi et un antisémite assumé, a révélé une enquête interne après l’étude de ses archives personnelles. Au vu des preuves accumulées, les 25 membres du conseil d’administration de l’institution ont voté, le mercredi 13 juillet, le changement de nom.
Des écrits « profondément blessants et perturbants ». Ces mots sont du président du campus de Fresno, Saúl Jiménez-Sandoval, partagés dans un communiqué qui a suivi la décision de débaptiser la bibliothèque. « Je crois que le nom d’un bâtiment ou toute zone importante du campus doit s’aligner sur nos valeurs communes, et refléter notre esprit de curiosité, de diversité et d’honnêteté », ajoute-t-il.
« Bruyants, sales, nauséabonds, affreux »
Ce changement de nom intervient après la mise en place d’un groupe de travail. Les opinions de Madden ont été révélées une première fois en novembre 2021, indique The Jewish News of Northern California. Un professeur-adjoint spécialisé dans les médias, Bradley Hart, a découvert les écrits antisémites de Madden alors qu’il faisait des recherches pour son livre, Hitler’s American Friends (Les amis américains d’Hitler).
Cinq mois d’enquête plus tard, Michael Lukens, président du groupe de travail et attaché au bureau du président du campus de Fresno, a rendu ses conclusions. L’équipe a notamment examiné 53 cartons de documents que Madden avait offerts à la bibliothèque en 1980, avant qu’elle prenne son nom l’année suivante.
Afin de justifier cette demande de changement d’appellation, elle s’est appuyée sur plusieurs citations qui ne laissent aucun doute sur l’antisémitisme de l’ancien bibliothécaire qui officia pendant 30 ans à Fresno. Dans une lettre à sa mère, il raconte par exemple : « Quels juifs ! Bruyants, sales, nauséabonds, laids — des Juifs comme vous n’en avez jamais vu auparavant, absolument différents des Juifs de San Francisco ». Il imagine encore, dans un autre écrit, placer « les Juifs », dans des camps « fermés par des fils électriques barbelés […] pieds nus dans un coin reculé du Texas ».
« À chaque fois que je découvre l’un de ces nez de prédateur, ou ces yeux vagabonds et concupiscents, ou ces lèvres baveuses, ou ces pieds plats, ou que j’entends ces voix nasales et geignardes, je tremble de rage et de haine à la fois », décrit-il, cette fois-ci dans une lettre à un ami. En outre, le groupe de travail a également établi qu’aucune évolution de sa pensée n’était à constater dans ses documents personnels, comme aucun regret ni remords.
Jill Fields, professeure d’histoire, coordinatrice et fondatrice du programme d’études juives de l’université, ajoute : « Il y a encore davantage à faire. C’est une chose de changer un nom, c’en est une autre de s’assurer que les étudiants et la communauté au sens large continuent à être éduqués sur la réalité et la persistance de l’antisémitisme dans nos sociétés, comme celle des autres formes de racisme. »
Le nom de Madden va également disparaître du site de l’institution, des publicités pour le campus et de la signalétique. Le président du campus a également expliqué qu’il chargerait à présent à un groupe de travail de trouver un nouveau nom pour la bibliothèque. En attendant, le bâtiment sera désigné sous l’appellation de « Bibliothèque d’État de Fresno ».
Hocine Bouhadjera