La Bibliothèque nationale d’Israël vient d’acquérir les carnets de « Monsieur Chouchani ». Mort en 1968, il était l’un des plus grands penseurs juifs du XXe siècle.
Il n’a jamais écrit de livres mais il prenait des notes sur des petits carnets : « Monsieur Chouchani ». Mort en 1968, il était l’un des plus grands penseurs juifs du XXe siècle. Parmi ses élèves : Elie Wiesel ou Emmanuel Levinas. Et justement l’un de ses anciens disciples a légué 70 de ces carnets à la Bibliothèque nationale d’Israël.
Des cahiers d’écoliers aux pages brunies par le temps, remplis d’écriture bleue en patte de mouches, souvent en hébreu.
« Il faut pas mal de temps et d’énergie pour s’habituer à lire son écriture », expliquent David Lang et Yoel Finkelman, spécialistes de la pensée juive. « Non seulement ce n’est pas clair, mais ce n’est pas écrit avec des phrases complètes. C’est si dense, il faudrait sûrement des semaines de travail pour révéler les questions que pose monsieur Chouchani ».
Les carnets de monsieur Chouchani sont désormais consultables en ligne, permettant à tout le monde de se plonger dans les mystères de sa pensée.
« Un personnage fascinant »
Né en 1895 en Biélorussie dans l’Empire russe, de son vrai nom Hillel Perelmann, Chouchani a vécu en Palestine ottomane, au Maroc, aux États-Unis, à Berlin, à Strasbourg, à Paris en Suisse, en Israël et en Uruguay… Il parlait une trentaine de langues. Cet hypermnésique connaissait par cœur la Torah, le Talmud, les commentaires religieux et maitrisait la philosophie, la physique, l’astronomie, la médecine, l’optique et l’électronique.
C’était le professeur et le précepteur de centaines de jeunes gens comme Michel Goldberg, un français juif d’origine polonaise, enfant caché pendant la guerre qui vit aujourd’hui entre Paris et Tel Aviv : « Il était toujours dans des habits mal fagotés, mal rasé. Un personnage fascinant ». En 1947, monsieur Chouchani a été recruté pour préparer la bar mitzvah de son frère aîné : « Il faisait des multiplications à rallonge complètement de tête. Mais je dois avouer qu’en ce qui me concerne, son attitude a été absolument déplorable. »
Une biographie vient de sortir, « Fascinant Chouchani » aux éditions Hermann, signé Sandrine Szwarc docteure en histoire et chercheuse à l’Institut Elie Wiesel.