Sorti en salles le 3 juin, The Lady of Heaven raconte l’histoire de la fille de Mahomet en mettant en scène plusieurs proches du prophète. Ses détracteurs veulent bloquer sa diffusion et y parviennent.
Le film britannique The Lady of Heaven sorti vendredi 3 juin s’attire les foudres d’une partie de la communauté musulmane au Royaume-Uni. Des manifestations et rassemblements ont eu lieu dans plusieurs villes du pays.
À Blackburn, ville de plus de 100.000 habitants au nord de Manchester, plusieurs dizaines de personnes se sont réunies le 3 juin pour manifester devant un cinéma qui projetait le film, rapporte le média local Lancashire Telegraph . En plus du retrait du long métrage du catalogue en ligne, les manifestants auraient obtenu la suspension de sa diffusion. Ailleurs en Angleterre, d’autres protestations ont aussi marqué la sortie du long métrage, comme à Sheffield, par exemple, où le gérant aurait annoncé à son tour le retrait du film.
Voici un gérant de cinéma à Sheffield obligé de se soumettre à une foule d’islamistes qui menace son établissement, considérant le film „The Lady of Heaven“ comme un blasphème pic.twitter.com/JxyBeo9Hwy
— Mathias Ulmann (@MathiasUlmann) June 6, 2022
Dans une autre séquence vidéo publiée sur les réseaux sociaux, on peut voir une autre manifestation devant la chaîne de cinéma Cineworld. Au cri de «Allah Akbar», plusieurs dizaines de manifestants musulmans expriment leur mécontentement de la diffusion de ce film qu’ils jugent «offensant» et «insultant».
Un musulman en colère a manifesté devant le @cineworld Bradford (Royaume-Uni) après le lancement du film jugé « blasphématoire », The Lady Of Heaven, sortie le 03 Juin 2022 là-bas.
Purée, l’angoisse.😳
Fiche du film : https://t.co/mNvfetT4qL pic.twitter.com/Tuh4ZquZOw
— Euphoria 🫧 (@_Oct14th) June 4, 2022
«Blasphématoire»
Le film mêle deux intrigues parallèles. La première raconte celle de Laith, un enfant irakien qui a perdu sa mère tuée par l’État islamique. Dans le foyer qui le recueille, une femme âgée lui conte alors l’histoire de Fatima, la fille du prophète Mahomet. Le long métrage revient alors sur les débuts de l’islam en mettant en scène plusieurs proches du prophète, dont Ali, le fondateur de la branche chiite, l’un des personnages centraux du film.
Déjà interdit en Iran, au Pakistan et en Irak, le film a provoqué des remous ailleurs qu’au Royaume-Uni. Que lui reproche-t-on ? «C’est le premier film à mettre le visage du prophète à l’écran», note le Guardian dans une recension. Dans l’islam, la représentation visuelle du prophète est formellement interdite. Le jeune réalisateur épaulé par Yasser Al Habib, un intellectuel musulman du Koweït, a fait le choix de mettre à l’image Mahomet ainsi que plusieurs de ses proches même si aucun acteur ne joue leur rôle puisque les visages ont été générés virtuellement par ordinateur.
Les protestations reprochent surtout aux films des «inexactitudes historiques» autour des représentations de certains proches du prophète Mahomet, les jugeant «blasphématoires» et «anti-sunnites». Il est en effet accusé de semer la discorde entre musulmans chiites et sunnites. Une pétition a été lancée pour demander le retrait définitif du film des salles de cinéma britanniques. Celle-ci a reçu pour le moment la signature de près de 116.000 internautes.
« L’islam l’a tuer »
« En raison de récents incidents liés aux projections de The Lady of Heaven, nous avons décidé d’annuler les projections à venir du film à l’échelle du pays pour assurer la sécurité de nos équipes et clients », a indiqué un porte-parole du groupe, surtout présent au Royaume-Uni et aux États-Unis. Sur une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, on peut voir un directeur de salle capituler devant les manifestants, annonçant la déprogrammation du film :
This is reportedly the manager of a cinema in Sheffield addressing a theocratic mob protesting at the screening of a « blasphemous » film (The Lady of Heaven). Thoroughly depressing to see him capitulate to their demands and confirm the film has been binned. pic.twitter.com/eKMEPjG3ED
— Paul Embery (@PaulEmbery) June 6, 2022
L’annulation a été critiquée par un pair de la Chambre des Lords comme étant « désastreuse pour les arts, dangereuse pour la liberté d’expression ». Interrogé par le Guardian, son producteur exécutif Malik Shlibak a estimé que les cinémas devraient « défendre leur droit de montrer des films que les gens ont envie de voir » plutôt que de céder à la « pression ». S’il défend le droit des manifestants d’exprimer leur mécontentement, il estime que c’était « idiot » et contraire aux valeurs britanniques que le film soit complètement retiré.