La reprise des relations entre le Maroc et Israël s’est faite en contrepartie d’une reconnaissance américaine de sa souveraineté sur le territoire du Sahara ? Dernière trouvaille de ceux qui ne trouvent rien à dire lorsqu’ils sortent de leur silence. Rappels utiles à l’ambassadeur (pardon! au représentant) de l’entité palestinienne à Dakar.
Le représentant palestinien Safwat Ibraghith au Sénégal a qualifié de «marchandage» la reprise des relations entre Rabat et Tel-Aviv, dans un entretien fleuve accordé à un site électronique qui ne porte guère le Royaume du Maroc dans son cœur. «Cela a été un marchandage : “Normalisez avec Israël et on reconnaît le Sahara comme territoire marocain” », qualifiant en même temps l’Algérie de «très grande puissance.» C’était là sans doute un pauvre langage, venant d’un représentant d’une autorité palestinienne moribonde qui semble mettre enchère sur enchère afin de se mieux garder le précieux soutien israélien. C’est aussi l’effet d’une politique encore plus abaissée ; emportement de commande qu’on se permet contre un pays qui appuie énergiquement une résolution définitive au conflit israélo-palestinien.
Nasser Bourita a un don : la clarté. Dès 2020, il a démenti l’idée que Rabat a fait un geste en contrepartie du soutien américain au Sahara. Malgré cela, les médias étrangers mentionnent sans cesse ce constat fallacieux. «La reconnaissance du Sahara par les États-Unis ne s’est pas faite du jour au lendemain. C’était une construction au fil des années, menée avec les administrations américaines successives. Aujourd’hui, nous avons simplement explicité les fondements de cette position», avait déclaré le chef de la diplomatie marocaine dans un entretien médiatique avant d’ajouter : «Lorsqu’un pays développe une relation avec Israël, cela veut-il automatiquement dire qu’il lâche la cause palestinienne ? Non, le Maroc ne lâche pas la cause palestinienne», rappelant que le Maroc est toujours favorable à une solution à deux États.
Disons-le d’emblée : la conduite des affaires extérieures de l’État marocain est libre, indépendante, souveraine et au-dessus de tous les calculs. Rabat n’a aucune leçon à recevoir de ceux qui se contentent du moins pour céder le plus, de ceux qui sont habitués aux partis pris, aux petits exploits pour compenser l’absence des grands. Rappelons à ce sieur que le roi Mohammed VI a annoncé, fin novembre 2021, vouloir mettre à profit ses relations privilégiées avec toutes les parties du conflit israélo-palestinien pour trouver une issue à ce dossier. Le souverain a clairement indiqué à l’occasion de la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien que «le Maroc poursuivra ses efforts afin de réunir les conditions propices à un retour des parties à la table des négociations». Rappelons également à ce diplomate que le Maroc a «rétabli» ses relations avec Israël, et que le processus de normalisation entre l’État hébreu et des pays arabes soutenu par l’administration américaine ne le concerne pas.
Le souverain est une des rares voix au monde qui appellent à préserver l’identité arabe et islamique de Jérusalem ainsi que «son statut juridique, historique et démographique». Le roi Mohammed VI est président du comité Al-Qods, chargé de contribuer à la sauvegarde des lieux saints musulmans à Jérusalem et qui consacre des sommes considérables à l’autorité palestinienne. Les Émirats arabes unis, le Bahreïn et le Soudan – avaient normalisé leurs relations avec Israël en 2020, aucun d’eux n’a été cité par le diplomate palestinien qui se plaît à sonder les intentions marocaines et à multiplier les remontrances à l’égard de Rabat.
Non, le Maroc ne fait pas vie commune avec Israël, ne réclame pas des droits à l’ombre et dans le secret, et son abnégation pour la cause la palestinienne ne signifie pas qu’il autorisera des attaques infondées envers sa politique étrangère. Les événements de l’esplanade des Mosquées, sous autorité de la Jordanie mais dont les points d’entrées sont contrôlés par Israël depuis la prise de Jérusalem-Est en 1967, et qui a été le théâtre récemment de heurts entre l’armée israélienne et des Palestiniens ont été condamnés par le Maroc.
Le gouvernement israélien reverse régulièrement à l’Autorité palestinienne la TVA et les droits de douane qu’il prélève sur les produits importés par les Palestiniens et cette collaboration ne semble pas heurter la conscience de ce diplomate. Des sommes colossales que l’autorité palestinienne reçoit avec joie en shekel, la monnaie nationale israélienne. Les responsables palestiniens et israéliens se fréquentent au quotidien sans que cela dérange notre diplomate. Tout le monde le sait, beaucoup de palestiniens, pas tous, avaient vendu leurs terres aux juifs et l’autorité palestinienne vit aujourd’hui de l’aumône sans que cela heurte la conscience de ce diplomate. Le roi Mohammed VI, ce qu’il faut mentionner, avait assuré au président palestinien, Mahmoud Abbas, après la reprise des relations avec Israël, la poursuite de «l’engagement permanent et soutenu du Maroc en faveur de la cause palestinienne juste».
Question au diplomate zélé : l’Algérie, qui prétend faire de la cause palestinienne «un pilier de sa diplomatie», qu’a-t-elle fait pour votre peuple ?
Le Maroc est un État souverain attaché à la Palestine, aux droits de ce peuple et à son intégrité. C’est une question de principe et de droit international et pas parce qu’il porte un amour particulier à ses habitants. Mais disons-le haut et fort: les intérêts suprêmes du Royaume passent avant toute autre considération, n’en déplaise à ce diplomate et à certaines associations qui ont transformé la question palestinienne en un fonds de commerce. La souveraineté, les marocains l’ont acquise seuls au prix de lutte, de sacrifices et n’ont jamais vendu ni fui leur pays jusqu’à la victoire finale. Ils n’ont jamais, non plus, compté sur un quelconque soutien extérieur, voisin ou lointain, pour reconquérir leur indépendance. À bon entendeur salut!
Mehdi Chourak