La fondatrice du Cercil et fille de Jean Zay a reçu, ce dimanche 15 mai, à Orléans, l’insigne de commandeure de la Légion d’honneur des mains de Serge Klarsfeld, pour son engagement au service de la mémoire de la Shoah.
Le pas est un peu plus hésitant, bien sûr, mais la voix ne tremble pas, toujours déterminée. Serge Klarsfeld, 86 ans, qui, avec sa femme Beate, s’est battu toute sa vie pour que le sort tragique des juifs pendant l’Occupation ne soit jamais oublié, était, ce dimanche 15 mai, à Orléans.
« Vous avez renforcé le civisme dans notre pays […] et refusé que ces enfants disparaissent dans les poubelles de l’histoire », a salué Serge Klarsfeld au moment de remettre l’insigne de commandeure de la Légion d’honneur à Hélène Mouchard-Zay, nommée chevalière sous la présidence de Jacques Chirac.
Au nom du père
Serge Klarsfeld a rappelé le poids de la figure paternelle dans leur engament respectif. Lui dont le père a été déporté à Auschwitz. Elle dont le père, Jean Zay, s’était donné pour mission, comme ministre du Front populaire, « d’élever le peuple et de combattre le fascisme ». Et qui est mort sous les balles de la milice.
Associant Serge Klarsfeld et Simone Veil dans ses remerciements, Hélène Mouchard-Zay s’est vite effacée derrière ceux que le Cercil continue à faire vivre, déterminé face à l’oubli qui menace.
La voix brisée par l’émotion, elle a ainsi évoqué la destinée dramatique de la petite Aline Korenbajzer, « assassinée le jour anniversaire de ses trois ans » à Auschwitz-Birkenau, après avoir passé 43 jours dans le camp de Beaune-la-Rolande avec sa mère. Sur la photo en noir et blanc, la fillette affiche les joues rondes de l’enfance et un regard grave d’un âge qui n’est pas le sien.
« Il reste tant à faire »
« Cette vigilance qu’elle nous réclame est plus que jamais requise », estime Hélène Mouchard-Zay. Transmettre la mémoire de ce que furent ces crimes contre l’humanité, garder les consciences éveillées est un travail au service des temps présents, plus que jamais nécessaire dans « une période pleine de grands dangers, une époque qui résonne spectaculairement avec les années 1930« , note celle qui fut longtemps enseignante. À 81 ans, Hélène Mouchard-Zay s’inquiète de l’attrait qu’exerce « un parti d’extrême droite », dont elle ne dira pas le nom, auprès de la jeunesse française.
« Avons nous échoué ? » s’interroge-t-elle. Sans défaitisme, avec détermination, elle répond : « Il reste tant à faire ».
Alexandre Charrier