Régine, chanteuse populaire et reine de la nuit, est morte à l’âge de 92 ans

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La reine mythique de la nuit, Régine, est morte ce dimanche à l’âge de 92 ans. La chanteuse a signé des centaines de chansons et de nombreux grands succès, comme « La Grande Zoa » ou « Je survivrai ».

La nuit vient de perdre sa reine. La chanteuse Régine est morte ce dimanche à l’âge de 92 ans. Elle était connue pour son grand boa rose, ses cheveux roux et ses chansons comme « La grande Zoa », « Azzurro », « Les p’tits papiers » ou « Patchouli Chinchilla ». L’artiste à la voix envoûtante et légèrement éraillée était aussi une importante femme d’affaires puisqu’elle a dirigé plus de vingt établissements en même temps. C’est sa petite-fille Daphné Rotcajg qui a annoncé la nouvelle à l’AFP. « Régine nous a quittés paisiblement ce 1er mai à 11H00 » en région parisienne, a précisé Mme Rotcajg.

« La reine de la nuit s’en va : fermeture pour cause de longue et grande carrière », indique un communiqué écrit, à la demande de la famille, par l’humoriste Pierre Palmade, ami proche de Régine depuis de nombreuses années. « Partie avec sa boule à facettes et sa gouaille chaude et rassurante », Régine « avait fait danser pendant plus de 30 ans dans ses boîtes de nuit les stars du monde entier », poursuit ce texte transmis à l’AFP.

Une enfance douloureuse

L’artiste, Régine Zylberberg de son vrai nom, est née en Belgique en 1929, de parents juifs polonais. Quand son père perd leur boulangerie au poker, sa famille décide de s’installer au début des années 1930 en France, à Paris. Elle connaît une enfance douloureuse, sa mère quittant le foyer pour partir en Argentine. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est séparée de son père et doit se cacher en zone libre. A la Libération, la famille se retrouve à Paris, où le père ouvre un bar à Belleville. Sa fille prend goût aux sorties dans les boîtes de la capitale.

La reine de la nuit

Régine découvre les premières boîtes de nuit dans les années 1950. Un ami lui confie l’animation d’une discothèque dans le centre de Paris, rue de Beaujolais, « le Whisky à gogo », où elle rencontre un débutant nommé Serge Gainsbourg. La jeune fille sait y mettre de l’ambiance, s’amuse parfois à danser avec un verre plein sur la tête, mais se targue de ne jamais boire d’alcool.

Elle décide alors de se faire appeler uniquement par son prénom et d’ouvrir, en 1956, son propre établissement, « Chez Régine », près des Champs-Elysées, dans le quartier latin à Paris. Le succès de cette boîte pailletée et feutrée est immédiat. Elle reçoit de nombreuses personnalités, comme Yves Saint Laurent et Françoise Sagan. La jet-set internationale se presse rapidement dans sa boîte de nuit. Suivra l’ouverture à Montparnasse du « New Jimmy’s », la boîte où l’on danse des twists endiablés. « Le temps passé à dormir est du temps perdu », assurait cette infatigable fêtarde.


L’aventure ne fait que commencer pour Régine qui ouvre plus d’une vingtaine d’établissements dans le monde entier : à Paris, à New York ou même à Rio de Janeiro. Son prénom est devenu ainsi « l’emblème des nuits folles jusqu’au petit matin, elle-même dansant sur la piste jusqu’à la fermeture », indique le texte de Pierre Palmade. Régine fait finalement ses adieux au monde de la nuit en 2003, lors du 30e anniversaire de son club parisien.

En 2009, elle doit vendre sa discothèque « Chez Régine » de la rue de Ponthieu. Celle qui disait dépenser une fortune chaque jour affirme alors être « ruinée ».

Une icône de la chanson française

Régine s’essaye aussi à la chanson. Sa carrière comme chanteuse décolle véritablement en 1965. Sa voix séduit les plus grands compositeurs. Elle doit son premier succès à Serge Gainsbourg qui lui écrit « Les Petits papiers ». L’année d’après, elle interprète « La Grande Zoa ». Frédéric Botton avait pourtant écrit cette chanson pour Jean-Claude Brialy, mais celui-ci a refusé de la chanter.


Régine a aussi chanté des textes signés Charles Aznavour ou Barbara. En 1979, elle reprend, en français, le single de Gloria Gaynor « I will Survive », devenu « Je survivrai ». Si la reprise de Régine rencontra un franc succès, c’est l’originale qui devint en 1998 l’hymne de l’équipe de France de football, lors de sa victoire au mondial de 1998.

Mordue de la scène

Régine, qui découvre le music-hall dans les années 60, n’a jamais pu rester trop loin de la scène. Elle s’est produite dans le monde entier : après être passée par l’Olympia, elle chante au Carnegie Hall de New York en 1969, devenant – avec notamment Edith Piaf – une des rares françaises à avoir conquis l’Amérique. A Paris, elle montera ensuite sur la scène de Bobino ou de la Cigale. En 2009, elle sort un nouvel album, comprenant des duos avec Pierre Palmade et Fanny Ardant. Quelques années plus tard, à 86 ans, elle sort une triple compilation de ses plus grands succès et décide de partir en tournée, pour la première fois depuis 1969.


« Ma plus grande joie serait qu’on écoute encore mes chansons dans cinquante ans », confiait-elle à l’AFP en 2020. « Je suis très fière que certaines soient devenues des classiques de la variété. (…) Mon premier métier, c’était les discothèques. Longtemps, la chanson n’a été qu’un passe-temps. Aujourd’hui, je me rends compte que la scène a été le plus important dans ma vie », déclarait encore la chanteuse et femme d’affaires. Enveloppée de son légendaire boa, à 86 ans, elle chantait encore en 2016 aux Folies-Bergères avec son entrain coutumier, « Je survivrai ».

L’artiste s’est aussi essayée au cinéma et à la téléréalité, figurant au générique d’une dizaine de films. Elle a notamment joué dans « Les Ripoux », de Claude Zidi (1984), « Grosse Fatigue » de Michel Blanc (1993) ou encore « Jeu de massacre » d’Alain Jessua (1967) et « Robert et Robert » de Claude Lelouch (1978).

Grandes causes et grand chagrin

Au-delà de sa carrière, Régine sait mobiliser les « célébrités », pour des causes importantes à ses yeux comme la lutte contre la drogue, lançant l’association « SOS Drogue international ». En 2008, son « ami », le président Nicolas Sarkozy, qu’elle accompagne en déplacement en Israël, l’élève au rang d’officier de la Légion d’honneur. Ironie du sort, une perquisition cause en 1996 la fermeture du « Palace », club mythique qu’elle possédait depuis quatre ans, après la découverte de produits stupéfiants. En 2004, elle se sépare de la plupart de ses clubs. Et divorce de son mari, l’homme d’affaires Roger Choukroun, épousé en 1969.


Deux ans plus tard, elle perd son fils, le journaliste Lionel Rotcajg, né d’un premier mariage.
« Je suis exhibitionniste. Mais j’ai toujours été malheureuse avec dignité », lâche-t-elle, soucieuse de ne pas étaler sa peine sur la place publique.

Source francebleu