78 ans après la tragédie, la Maison d’Izieu avec le soutien de l’école d’art Emile Cohl et du studio de production Parmi les lucioles, parachève l’intention cinématographique des enfants de la Colonie de l’été 1943. Un court métrage d’animation fidèle à leurs dessins et respectueux de leur mise en récit est en pleine conception.
Le 6 avril 1944, 44 enfants juifs et 7 éducateurs sont raflés puis déportés. Ils ne reviendront pas. De leur passage dans la maison d’Izieu après le saccage des nazis, ne restent que quelques photos, des lettres et de nombreux dessins. Des œuvres conservées par la directrice de la colonie, Sabine Zlatin. Parmi ces œuvres se trouvaient trois rouleaux d’histoires dessinées.
La lanterne magique
Les rouleaux de dessins racontent les aventures d’Ivan Tasarawitch. Un personnage inventé par les enfants, en guerre contre les « Tatars ». Les rouleaux sont destinés à être projeté à la lueur d’une bougie selon le principe de la lanterne magique comme une bobine de film.
Les enfants accompagnaient cette projection par la lecture de leurs récits. C’est cette « lanterne magique » que Dominique Vidaud, directeur de la maison d’Izieu a souhaité faire revivre avec des moyens contemporains.
« À partir d’une des histoires, nous avons décidé de faire un petit film d’animation. Mais il nous fallait aussi l’appui d’un studio de production et cela a un cout. Nous sommes d’abord allés à la recherche de mécènes. Ils nous ont permis de trouver à peu près la moitié du financement soit 75 000 €. »
Le studio de production, « parmi les lucioles » basée à Valence met ses moyens techniques à disposition, Des étudiantes en fin de cursus de l’école Émile Cohl participent aussi à l’adaptation de ce court métrage mais 30 000 € sont encore nécessaires pour boucler le budget.
Une campagne de financement participatif
Pour récolter ces 30 000€, la campagne vient d’être lancée, via la plate forme kiss kiss bank bank. L’appel à contribution est ouvert pendant 2 mois. Pour l’heure, 94 contributions ont apporté 24% de la somme demandée. (En fait 150 participants, et 1/3 de la somme, et la progression est continue)
« Les gens participent volontiers, souligne le directeur de la maison d’Izieu, les contributions sont très diverses. Il y a un engouement très rassurant sur le projet. Voici ce que m’a écrit une prof d’histoire de l’Académie de Dijon qui nous suit depuis longtemps -« je trouve ce projet tout à fait admirable je suis très fière d’y apporter ma contribution et j’ai diffusé l’info à un premier cercle assez large susceptible d’y participer. Je souhaite vivement la réussite de ce projet. » -C’est très révélateur sur l’état d’esprit des gens qui participent » reprend Dominique Vidaud.
« C’est un projet comme on les aime, à la taille d’Izieu ,un projet à taille humaine. Cela permet aux gens d’agir directement pour faire rayonner la maison, de ne pas être simplement spectateur ou de se dire que c’est à l’État de participer ou à des grands mécènes. Philosophiquement, c’est intéressant d’ouvrir ça à tout le monde » poursuit-il.
Un double projet
« C’est un projet qui a du sens. Au départ il s’agissait de poursuivre le geste des enfants d’Izieu puis de le poursuivre avec d’autres enfants qui ont connu les vicissitudes de la vie de réfugiés, ça donne un autre sens encore. »
Le travail se fait avec les enseignants du groupe scolaire Aimé Césaire de Vaulx-en-Velin. Il a été proposé à des élèves de classes UPE2A (unité pédagogique pour élèves allophones arrivants) donc des élèves dont la langue parlée n’est pas le français.
« Ces enfants se sont complètement investis dans ce projet, ils connaissent par cœur l’histoire des enfants d’Izieu. C’est très émouvant, car, ils découvrent le français avec ce projet. Ils s’approprient cette histoire avec une facilité déconcertante, d’où qu’ils viennent, quelque soit leur pays d’origine, ça leur parle beaucoup. »
Une œuvre immortelle grâce aux moyens modernes
« Les enfants ne sont plus là mais quelque part leur existence ne s’éteint pas. Par la magie du cinéma, à laquelle les enfants de 1943 avaient pensé avec cette lanterne magique et le travail qui est fait aujourd’hui, en 2022, sur les dessins, les textes…on va maintenir vivante la mémoire des enfants d’Izieu. Quelque part, c’est la première fois qu’il va y avoir un film français par les enfants d’ Izieu. C’est ce qui est beau. »