Seize responsables d’une école juive ultra-rigoriste basée en Seine-et-Marne ont été placés en garde à vue ce lundi matin. Ils sont suspectés de mauvais traitements sur les élèves, qui vivaient dans des conditions de très grande insalubrité.
Le bâtiment aux tuiles rouges et aux murs ocre est isolé au cœur d’une immense propriété. Au sein du domaine de Séricourt, la Yeshiva Beth Yossef promet un enseignement du Talmud et de la Torah de grande qualité tant que les élèves « se placent dans la même optique que nous ». « La Yeshiva offre des conditions idylliques pour étudier convenablement : les élèves évoluent dans un cadre verdoyant, agréable et propice à la vie d’un judaïsme authentique », promet le site Internet de l’établissement installé à Bussières (Seine-et-Marne), à 75 km à l’est de Paris.
Mais le calme habituel de cette institution protégée des regards par des hauts murs a été sérieusement troublé ce lundi matin. Selon nos informations, confirmées par Laureline Peyrefitte, la procureure de la République de Meaux (Seine-et-Marne), une centaine de gendarmes et plusieurs services de la préfecture de Seine-et-Marne ont investi les lieux, vers 9 heures. Une opération à laquelle a assisté la procureure et qui s’inscrit dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte au mois de juillet 2021 pour « violences aggravées ».
Les enquêteurs de la section de recherches de Paris, en charge des investigations, ont interpellé et placé en garde à vue « seize responsables de l’établissement », selon Laureline Peyrefitte. Tous sont suspectés d’avoir infligé de mauvais traitements aux élèves et de les avoir hébergés dans des conditions indignes.
D’éventuels mauvais traitements
Fondée en 1948, l’institution Ohr Yossef accueille actuellement environ 40 élèves mineurs, et une vingtaine de majeurs, dont plusieurs enfants venus d’Israël ou des États-Unis. Loin des regards de la petite commune de 500 habitants où elle s’est installée, l’école semble vivre en vase clos. Les élèves et enseignants restent à l’écart de Bussières et ne font pas parler d’eux. Avant l’opération menée ce lundi, le maire n’avait eu qu’une seule interaction avec l’école juive : en mars 2018, un important incendie avait ravagé un bâtiment de la yeshiva et l’édile avait pris un arrêté de péril. Au sein de l’école, l’uniforme est obligatoire. Les journées débutent à 8 heures par une prière et se terminent en soirée par des cours d’éthiques, une promenade en forêt et des études de textes sacrés… L’établissement ne cache pas mener une doctrine rigoriste.
Au point d’aller trop loin ? En juillet 2021, un élève américain scolarisé au sein de la Yeshiva fugue de l’établissement situé à la lisière de l’Île-de-France. Le jeune garçon, âgé de moins de 15 ans, se rend avenue Gabriel à Paris et demande la protection de… l’ambassade des États-Unis. Interne au sein de la Yeshiva, il dénonce des mauvais traitements, assure être retenu au sein de l’école dans des conditions graves d’insalubrités. Il accuse aussi les responsables de l’école de se montrer violents, de servir de la nourriture périmée, voire de le priver de repas. Son récit semble très éloigné des valeurs mises en avant par l’école.
Privés de leur passeport
Dans le même temps, le 12 juillet 2021, la Miviludes, la mission interministérielle de lutte contre l’emprise sectaire, émet un signalement, suspectant des dérives « et un endoctrinement de ces élèves », souligne la procureure de Meaux. Les gendarmes se penchent sur le témoignage du jeune ressortissant américain et estiment son récit crédible. Surtout, les enquêteurs, comme la Miviludes, retrouvent d’anciens élèves rentrés aux États-Unis ou en Israël. Tous racontent des mauvais traitements et affirment avoir été privés de leur téléphone portable et de leur passeport. Certains élèves vivraient ainsi en vase clos, interdits de sortir de l’école, depuis plusieurs années. Une dizaine de témoignages sont ainsi récoltés par la Miviludes qui évoque dans son signalement à la justice « un discours de manipulation pouvant s’apparenter à une dérive sectaire ».
Si les gardes à vue et les auditions des suspects devront confirmer ces éventuels faits de violences dénoncés par les élèves, les premières observations des services de la préfecture de Seine-et-Marne semblent accréditer les déclarations des enfants sur l’état de vétusté de l’ancien sanatorium où ils sont hébergés. « Les murs sont à nus, des fils électriques pendent partout, souffle une source proche du dossier. Les enfants sont livrés à eux-mêmes et vivent dans des conditions indignes d’un établissement scolaire. » Selon nos informations, les services de l’aide sociale à l’enfance ont décidé de placer les 40 enfants en foyer le temps des investigations… Contacté, l’établissement n’a pas donné suite.
Quelle honte d’user et d’abuser du statut de prof pour régler ses problèmes personnels, des gros beurks, mais quelle honte !!