Mélenchon condamné pour injure publique et diffamation envers Radio France

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Mélenchon, qui avait durement critiqué des journalistes de Franceinfo, a été condamné à une amende de 500 euros avec sursis et devra verser 3 000 euros de dommages et intérêts à Radio France.

Jean-Luc Mélenchon a été condamné, mardi 11 janvier, pour injure publique et diffamation envers Radio France. Le chef de file de La France insoumise (LFI) avait durement critiqué en octobre 2018 des journalistes de Franceinfo, les qualifiant d’« abrutis » de « menteurs », après une enquête de la cellule investigation de Radio France sur sa campagne présidentielle de 2017.

Le candidat à la présidentielle d’avril prochain a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris à une amende de 500 euros avec sursis et devra verser 3 000 euros de dommages et intérêts à Radio France.

Son avocat, Me Matthieu Davy, a précisé qu’il ferait appel de cette décision. « Nous sommes étonnés d’une décision aussi sévère contre la liberté d’expression d’un chef politique », a-t-il déclaré. En attaquant un dirigeant politique en justice sur un sujet ayant trait au débat public, « Franceinfo a choisi d’être non pas un simple observateur ou commentateur, mais bien un acteur de la campagne présidentielle, a réagi le chef de file de LFI dans un communiqué. C’est une grave atteinte à la liberté d’expression. »

Prix pratiqués « très élevés »

L’enquête de Franceinfo avait pointé le 19 octobre 2018 de possibles surfacturations lors de la campagne présidentielle de M. Mélenchon. L’article s’intéressait aux prestations facturées par la communicante Sophia Chikirou et sa société, Mediascop, au candidat de LFI, pour un montant total d’un peu plus d’un million d’euros. Ce jour-là, cette dernière était entendue en garde à vue dans le cadre d’une enquête du parquet de Paris sur des soupçons de surfacturation de cette campagne. Trois jours auparavant, des perquisitions avaient été menées, notamment au domicile de M. Mélenchon.

Selon Franceinfo, certains prix pratiqués par Mediascop dans le cadre de ce contrat se situaient à des niveaux « très élevés », citant par exemple la mise en ligne de retranscriptions audio de discours pour un coût de 250 euros l’unité.

Le chef de file de LFI avait répliqué le jour même de la publication de l’enquête, voyant en Franceinfo une « radio d’Etat » aux ordres du gouvernement, selon lui. Il avait fustigé « une parfaite synchronisation » entre la police, la justice, l’Elysée et les médias et estimé faire l’objet d’un « pilonnage ». « Je vous mets tous en garde, tous ceux qui titrent sur le fait que nous avons fait de la surfacturation s’exposent à des poursuites », avait-il déclaré, « car nous n’avons peur de rien ». Le député des Bouches-du-Rhône avait aussi qualifié les journalistes de la station d’« abrutis » et de « menteurs » dans une vidéo publiée sur Facebook. Dès le lendemain, la station avait déposé une plainte à l’encontre de M. Mélenchon pour ses propos.

Alimenter « la défiance » vis-à-vis de la presse

Lors de l’audience le 10 novembre devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, Jacques Monin, directeur de la cellule investigation de Radio France, cité comme témoin, avait raconté le « vif émoi » provoqué par cette déclaration chez les journalistes, estimant que ces propos avaient contribué à alimenter « la défiance » vis-à-vis de la presse.

Il avait expliqué que la date de publication de l’enquête avait été programmée deux mois auparavant, et non en réaction aux perquisitions et à la garde à vue de Mme Chikirou.

« C’est une décision très satisfaisante non seulement pour Radio France, mais pour tous les journalistes », s’est félicitée, mardi, MSabrina Goldman, avocate de la radio publique. « Elle reconnaît que Jean-Luc Mélenchon ne pouvait pas impunément appeler à la haine et a consacré le droit à la liberté d’informer. »

Source lemonde