Que reste-t-il du djihadisme et du terrorisme islamiste ? Sept ans après le début de la vague d’attentats dont Charlie fut une des premières cibles, les actions de terreur se sont raréfiées, même si des projets d’attaque sont régulièrement déjoués.
La question de l’islamisme se pose toujours en Europe et en France, car si ses méthodes ont changé, il existe une volonté d’imposer une nouvelle société fondée sur des préceptes religieux extrapolés du Coran. Qui peut soutenir sérieusement le contraire ? Mais la prise de conscience de ce phénomène inquiétant trop longtemps nié est aujourd’hui revendiquée par toutes sortes de gens, de mouvements politiques, de groupuscules, persuadés d’être l’avant-garde de cette lutte. Se sont ainsi développées des théories selon lesquelles la civilisation européenne allait être remplacée par la civilisation musulmane, et ont surgi des démagogues de tout poil qui n’hésitent pas à recourir à l’amalgame, à la xénophobie ou au racisme. La compréhension de la réalité de l’islamisme s’en trouve encore plus brouillée, et c’est la confusion qui règne quand on essaye d’y voir clair.
Mettre un coup d’arrêt à cette offensive discrète
Il y a pourtant une impérieuse urgence à combattre l’idéologie islamiste, pas uniquement sur le plan sécuritaire, mais aussi culturel, politique, sociétal. Car on sait que les idéologues de cette pensée intolérante n’ont pas baissé les bras après avoir compris que la violence n’a fait que braquer l’opinion publique contre eux. Ils ont donc changé de tactique et adopté ce qu’on pourrait appeler un soft power au service de leur cause. Mettant en œuvre une stratégie d’entrisme lente et silencieuse dans de nombreux secteurs de la société pour leur donner les impulsions qui serviront leur combat. Dans le monde du travail, de la mode, de l’université, du sport, de l’éducation, pour ne citer que ceux-là, l’islamisme cherche à investir des champs nouveaux d’où il sera ensuite presque impossible de l’en déloger. C’est donc dès maintenant qu’il faut mettre un coup d’arrêt à cette offensive discrète et pacifique.
Mais cette lutte est rendue difficile par une cacophonie anti-islamiste qui a trop souvent des airs de xénophobie, et beaucoup préfèrent alors se réfugier dans une bienveillance flatteuse pour fuir cette situation inconfortable. N’avons-nous d’autre choix qu’entre des discours d’extrême droite anti-islam racistes et des sermons de gauche d’un optimisme pétri de bons sentiments complètement à côté de la plaque ?
La vie de la cité est ainsi faite : elle nous confronte à des situations embarrassantes et déplaisantes. Mais on ne défend pas la démocratie et nos libertés fondamentales en brûlant des cierges pour faire disparaître les problèmes par miracle. Il faut affronter ces difficultés et cesser de regarder ailleurs en espérant que quelqu’un d’autre fera le boulot à votre place. Les hésitants et les timorés ne sont d’aucune utilité. Qu’ils restent chez eux à faire des sudokus et à regarder Les Marseillais à Dubaï.
C’est d’abord aux politiques, investis du suffrage universel, de prendre les mesures nécessaires, avec une fermeté inébranlable mais conforme au droit. Mais c’est aussi aux citoyens de prendre leur part en dénonçant les dérives religieuses, en s’y opposant pacifiquement par des moyens de contestation permis par la loi et la liberté d’expression. Cette période pénible n’est pas pire qu’il y a trente ou quarante ans. À l’époque, l’intégrisme religieux semblait appartenir au passé, et les luttes avaient pour cibles le collectivisme soviétique, les dictatures d’Amérique du Sud, le régime d’apartheid ou la prolifération nucléaire. Point de religion menaçante à l’horizon. L’énergie déployée à l’époque par des millions de militants à travers le monde pour mettre fin à ces formes de totalitarisme doit être à nouveau mobilisée pour mettre en échec l’intolérance religieuse et ses méthodes les plus sournoises. Parce que l’enjeu est encore et toujours le même : notre liberté.