La présence du polémiste Eric Zemmour en couverture de plusieurs magazines, accompagné d’une femme qui n’est pas la sienne, est loin d’être anecdotique.
Éric Zemmour a donc été photographié torse nu, dans l’eau, collé à une femme qui n’est pas la sienne et le tout s’est retrouvé en couverture de Paris Match. D’autres images documentant « l’idylle » entre le journaliste devenu homme politique et sa conseillère, Sarah Knafo, seront peu après publiées dans Voici – sur Twitter, les avocats des deux protagonistes ont annoncé engager « sans délai des procédures à l’encontre de ces deux publications » pour des images et des articles « portant atteinte à la vie privée » de leurs clients.
Paris Match et Voici ont publié des images portant atteinte à la vie privée d’Eric #Zemmour et de Sarah Knafo. Rien ne peut justifier ce type de publication, si ce n’est la volonté de nuire
En conséquence, nous engageons sans délai des procédures à l’encontre de ces publications pic.twitter.com/AUeEVY7XEM
— Olivier PARDO (@maitrepardo) September 22, 2021
Spontanément, lorsque ce marronnier de la vie politique – « EXCLUSIF », « Machin a une double vie ! » – voit ses feuilles tomber (ou la sève affluer vers ses tendres bourgeons, selon le degré de remplissage relatif de votre métaphorique verre personnel), les réactions ont tendance à se concentrer sur deux pôles (si l’on exclut l’extrême majorité de la population qui a l’air de n’en avoir rien à secouer). D’un côté, on plaint la légitime humiliée au grand jour, souvent sans rien savoir des arrangements passés avec l’infidèle exposé. D’un autre, on s’interroge sur les conséquences de l’étalage pour celui qui a été pris la main dans le sac (ou la Méditerranée). D’autant plus – et avec Zemmour, on est en plein dedans – lorsqu’il se présente en ultime rempart de la tradition et des grandes valeurs dressé contre les assauts « dissolvants » d’un toufoulcan systémique.
Comme s’il y avait un paradoxe. À l’époque chroniqueur sur RTL et commentant une autre paparazzade – celle de François Hollande filant en scooter rejoindre Julie Gayet –, Zemmour y avait vu la marque de la France, la vraie. Ou, comme il l’écrivait alors : « Tous nos rois affichèrent leurs maîtresses comme signe de puissance et de magnificence. Nos deux empereurs firent aussi honneur à leur rang. Dans la longue lignée de nos monarques, des deux seuls à qui on ne connut pas d’aventure, l’un finit en saint, et l’autre sur la guillotine. Cela ne donne pas envie. »
Stratégie du babouin
En remontant encore plus loin la généalogie du pouvoir, on pourrait même déceler dans ces affichages d’incartades une stratégie du babouin finement adaptée aux deux faces de la compétition sexuelle – celle qui nous oppose à nos congénères du même sexe mais aussi à ceux du sexe opposé, par définition potentiels partenaires lorsque l’espèce, comme la nôtre, ne se reproduit pas (encore) par parthénogenèse.
Côté compétition intrasexuelle, l’exubérance extraconjugale a tout du signal pour d’autres mâles susceptibles de vous chercher des noises. Si nos comportements pouvaient parler, celui-là dirait : « Regarde, j’en ai tellement que je suis capable d’entretenir plusieurs femelles à la fois, alors passe ton chemin si tu ne veux pas qu’il t’arrive des bricoles. » Côté compétition intersexuelle, particulièrement vaillante chez les espèces monogames – biologiquement parlant, la monogamie n’implique pas de serment de fidélité, elle désigne simplement les animaux s’associant entre mâles et femelles pour élever les petits, et l’humain fait justement partie du petit 5 % de mammifères où l’investissement paternel n’est pas forcément terminé une fois l’ovule fécondé –, le signal est un piège à filles. Pour une femme moyenne (au sens statistique du terme), rien n’est plus séduisant qu’un homme déjà en mains, de même que le braconnage sexuel est une stratégie de choix pour trouver un partenaire. Raison pour laquelle les femmes hétérosexuelles ont tendance à ignorer un homme lorsqu’il est seul et à le trouver irrésistible lorsqu’il est en galante compagnie. Elles ne font là que succomber aux sirènes de leur esprit préhistorique qui leur susurre à l’oreille : « Si l’une de tes congénères a mis le grappin dessus, c’est qu’il est sans doute un bon parti, alors fonce et pique-le lui. » Soit l’une des multiples manifestations de la loi de moindre action – pourquoi se fatiguer à faire soi-même le travail de tri et de sélection si quelqu’un d’autre s’y est déjà collé ? – et du caractère proprement inégalitaire de la sélection sexuelle. Un étrange marché où, parce que le mâle constitue le sexe abondant et économique et la femelle, le rare et cher, l’offre masculine est largement supérieure à la demande féminine.
À ce titre, si Zemmour se rêve en Napoléon, on peut pour le moment lui accorder d’être une énième métamorphose du césarisme darwinien – le mari dont rêvent toutes les femmes et l’homme à femmes qu’envient et craignent tous les maris.
Par Peggy Sastre