L’Église d’Angleterre a indiqué, mardi 13 juillet, qu’elle envisageait d’organiser en 2022 une cérémonie d’excuses pour les lois médiévales ayant conduit, au XIIIe siècle, à l’expulsion du peuple juif. Une initiative saluée par la communauté britannique.
Cette démarche s’inscrit dans la perspective du 800e anniversaire du Synode d’Oxford, à l’origine de cette législation discriminatoire en 1222.
Poser un « acte de repentance », huit siècles après les faits. Mardi 13 juillet, l’Église anglicane a indiqué, dans la presse locale, qu’elle envisageait d’organiser, en 2022, une cérémonie officielle d’excuses pour le soutien d’anciens responsables chrétiens aux lois médiévales ayant débouché, au XIIIe siècle, sur l’expulsion des communautés juives de l’ensemble du territoire.
Cette démarche s’inscrit dans la perspective du 800e anniversaire du Synode d’Oxford, à l’origine de cette législation discriminatoire en 1222. À l’époque, les responsables de l’Église catholique ont joué un rôle important dans l’application de ces mesures, qui obligeaient les près de 3 000 juifs alors établis dans le pays à porter des signes d’identification, leur interdisaient de fréquenter des chrétiens ou encore d’accéder à certains emplois. Les juifs ont finalement été bannis du sol anglais, avant de n’y être réadmis qu’en 1656 à l’invitation de Lord Oliver Cromwell.
« Repentance »
Si l’instance faîtière de l’anglicanisme britannique n’existait pas encore au XIIIe siècle -, elle n’a été fondée qu’en 1534 -, celle-ci entend assumer l’attitude de ses ancêtres, et demander pardon pour avoir contribué à alimenter, au cours des siècles suivants, l’antisémitisme dans le pays. « Le bureau de l’archevêché [de Cantorbéry] a reçu une lettre proposant une célébration qui pourrait offrir un acte de repentance (…) », a confirmé, mardi 13 juillet dans les colonnes du Daily Telegraph, le révérend Michael Ipgrave, évêque de Lichfield (Staffordshire) et président du Conseil des chrétiens et des juifs de l’Église d’Angleterre. « Nous étudions cette idée (…), ainsi que la possibilité de diffuser des ressources liturgiques à destination des églises locales ».
Si des excuses publiques pourraient permettre de franchir un palier supplémentaire dans les relations judéo-anglicanes, l’Église d’Angleterre a déjà fait plusieurs pas en ce sens. En 2019, elle a publié un document, God’s Unfailing Word( “La parole indéfectible de Dieu”), soulignant l’importance de la relation entre chrétiens et juifs, et reconnaissant que des siècles d’antisémitisme chrétien en Europe avaient jeté les bases de l’Holocauste. À l’époque, le grand rabbin d’Angleterre, Ephraim Mirvis, avait salué ce texte, tout en jugeant qu’il n’était pas à la hauteur, car il ne rejetait pas l’histoire des tentatives de conversion, par l’Église, des juifs.
« Favoriser un dialogue de qualité »
Côté catholique, de telles repentances ne sont pas à l’ordre du jour. « Pour le moment, les évêques ne feront pas de déclaration à ce sujet, mais ils tiennent à souligner les bonnes relations qu’ils entretiennent avec la communauté juive en Angleterre et au Pays de Galles. Ces relations sont fondées sur les principes exprimés dans la déclaration du Concile Vatican II sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes, Nostra aetate », explique le père Jan Nowotnik, responsable national de l’œcuménisme à la Conférence des évêques d’Angleterre et du Pays de Galles.
Interactions avec le Grand rabbin et son bureau, travail engagé par le Conseil pour les chrétiens et les juifs, initiatives locales de rapprochement… « Nous essayons de favoriser un dialogue et des relations de qualité. Les évêques soutiennent la communauté juive en faisant tout ce qui est possible pour éradiquer l’antisémitisme, en particulier en encourageant la compréhension des traditions de l’autre », poursuit le père Nowotnik.
« Mieux vaut tard que jamais »
Outre-Manche, l’annonce de prochaines excuses anglicanes a été saluée par la communauté juive. « L’expression “mieux vaut tard que jamais” est vraiment appropriée ici », a souligné Dave Rich, directeur du Community Security Trust, une ONG locale de surveillance de l’antisémitisme. « [Ce] traumatisme historique ne pourra jamais être effacé […], mais dans le contexte de recrudescence de l’antisémitisme, le soutien et l’empathie de l’Église d’Angleterre pour notre communauté juive sont les bienvenus, et rappellent que la Grande-Bretagne d’aujourd’hui est très différente », poursuivait-il.
Ces derniers mois, son organisation caritative a indiqué avoir recensé, entre le 8 mai et le 7 juin, 460 incidents antisémites, un chiffre record depuis le début des enregistrements de signalements en 1984.
Malo Tresca