Dans sa tournée à l’étranger, le PDG d’Intel, Pat Gelsinger, a annoncé une série d’investissements notamment en Israël, où il est déjà très implanté. Quant à l’Europe, si Intel est prêt à sortir le chéquier, il ne le fera qu’à condition que les subventions suivent.
Intel n’y va pas avec le dos de la cuillère dans ses volontés d’investissements. En tournée européenne élargie, le nouveau patron du géant américain a échangé vendredi dernier avec le Commissaire européen Thierry Breton, et a rencontré hier le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Avec à la clé, des milliards de dollars investis fermement… ou au conditionnel.
La position d’Intel en Israël renforcée
Pour Israël, où il est le premier employeur privé du pays, Intel voit les investissements en grand. Primo, 600 millions de dollars seront injectés en R&D. Deux cents millions pour un nouveau centre de recherche à Haifa – qui sera nommé IDC12 – ce qui fera du pôle israélien l’un de ses plus grands en matière de développement de puces, avec 6 000 employés au total. À cela s’ajoutent 400 millions de dollars de plus pour étendre son campus Mobileye à Jérusalem.
Deuxio, Pat Gelsinger a validé un investissement exceptionnel de 10 milliards de dollars pour la création d’une nouvelle fabrique de production de puces, précisant que la première phase de la construction avait débuté. De quoi renforcer sérieusement les capacités de production d’Intel sur place : c’est déjà des usines de Kiryat Gat (Fab28) que sortent une grande partie des puces en 10 nm de 10e et 11e génération (Icelake et Tigerlake).
Une avancée prudente en Europe
Pour l’Europe, qui veut revenir dans la course, comme promis, Intel est prêt à investir sur un site de gravure de pointe en Allemagne. Mais n’étant pas un organisme caritatif, l’entreprise a confié à Thierry Breton la tache de solliciter des subventions pour la construction de deux usines coûtant 10 milliards de dollars chacune.
Des subventions élevées, de l’ordre de 40%, soit 8 milliards de dollars, comme celles que pratiquent les concurrents asiatiques.
« Pour être compétitifs, nous avons besoin de ce niveau (d’investissement de la part des Etats, ndr) », a confié Pat Gelsinger aux titres Politico et Handelsblatt.
Promettant que cette construction d’une à deux usines promet « six à huit usines sur notre nouveau site au cours d’une décennie. Ce serait de loin le plus grand projet jamais réalisé sur le sol européen », selon M. Gelsinger.
Si la rencontre entre MM. Gelsinger et Breton semble s’être très bien passée, la vision politique du Commissaire européen se heurte aux réticences des industriels locaux, les STMicroelectronics, NXP et Infineon qui préfèreraient voir l’argent arriver chez eux pour servir leurs clients actuels.
Essentiellement portée par l’automobile ou l’avionique, l’industrie européenne a pour l’heure moins besoin de lignes en 3 nm que de production de masse en 14-28 nm.
Un constat économique à un instant T qui ne doit pas faire oublier que ce sont justement les faibles investissements de ces géants européens et leur trop grande passivité qui a conduit l’Europe à dépendre de l’Asie.
Par la voix de Pat Gelsinger, Intel a fait ses propositions et la balle est désormais dans le camp des Européens. Ils ne devront pas trop tarder : nommé début janvier, Pat Gelsinger a déjà lancé des chantiers énormes pour Intel, de la création d’un service de fonderie en passant par un plan d’autosuffisance américano-européen. Si le Vieux continent traîne, Intel investira bien ses milliards. Mais ailleurs.