Son parti, le Likoud, obtient moins de mandats que lors du précédent scrutin, compliquant la formation d’une nouvelle coalition. Rien n’est joué.
Bien sûr, il faut rester prudent. Car à l’heure où ces lignes sont écrites, le dépouillement n’est pas encore terminé. Plus de 10 % des voix n’ont pas encore été décomptés. Un changement de curseur en faveur du bloc pro-Netanyahou ou de celui du changement n’est donc pas à exclure.
Pourtant, d’ores et déjà on peut tirer quelques enseignements du scrutin de ce mardi. Tout d’abord, si le Likoud de Benyamin Netanyahou reste le premier parti du pays, il n’obtient que 30 sièges contre 36 lors des élections de mars 2020. Ce qui veut dire que la réussite de la campagne de vaccination massive, grâce aux millions de doses achetées au laboratoire Pfizer, et l’ouverture de l’économie qui a suivi, n’ont pas eu l’impact escompté. Insuffisant aussi, les accords de normalisation avec quatre pays arabes et notamment « l’effet Dubai ». Pourquoi cette érosion ? Est-ce la lassitude de certains des électeurs de droite face à un Netanyahou constamment réélu depuis 2009, avec pour conséquence l’envie de figures politiques plus fraîches, prêtes, le cas échéant, à affronter le leader incontesté, tout en restant bien ancrées à droite ? Est-ce le ton très rude du Premier ministre-candidat lors de la campagne, à l’égard de toute contestation de sa politique ?
La gauche n’est pas morte
À moins que cela ne tienne aux vraies surprises de ce vote. Et d’abord contrairement aux sondages d’avant la consultation, la relative bonne tenue de la gauche. Considéré comme moribond, il y a de cela quelques mois, le parti travailliste sous la direction de Merav Michaeli, élue présidente le 24 janvier dernier, a retrouvé une seconde vie. Avec ses 7 mandats, les travaillistes sont aujourd’hui au même niveau que Judaïsme de la Torah, les ultraorthodoxes ashkénazes, mais aussi Yamina, la droite nationaliste religieuse dirigée par Naftali Bennett. Meretz, la petite formation de la gauche sioniste opposée à l’occupation des territoires palestiniens et défenseur des droits de l’homme a lui aussi, avec ses 5 sièges, démenti les sondeurs en tous genres.
L’ultradroite non plus
Mais la plus grande surprise vient de l’extrême droite, avec les 6 sièges remportés par Sionisme religieux, une liste composée de trois petits partis ultradroite, dont La Puissance juive, qui se réclame ouvertement de l’idéologie de feu le rabbin raciste Meir Kahana, et Noam, une formation homophobe et antiféministe créée par des rabbins intégristes et nationalistes. Une alliance encouragée par Benyamin Netanyahou qui a signé avec elle un accord de partage de surplus des voix. Un de ses premiers appels, peu après l’annonce des premières fourchettes, a été pour féliciter Betsalel Smotritch, le dirigeant du Sionisme religieux. Un soutien sans ambages qui ne semble gêner personne au Likoud, sinon certaines figures historiques.
Pour rappel : le 16 octobre 1985, lorsque Meir Kahana est monté à la tribune de la Knesset afin de prendre la parole, tous les députés, à l’exception de deux députés ultraorthodoxes, ont quitté l’hémicycle. Tous conduits par le Premier ministre de l’époque, le dirigeant travailliste Shimon Pérès, et Yitzhak Shamir, le chef du Likoud. Ils manifestaient ainsi leur refus de ce que représentait Kahana, lequel n’a pas été autorisé à se porter candidat en 1988, à la suite du vote d’une loi antiraciste.
Profondément divisé, le public israélien devra attendre vendredi matin pour avoir le décompte officiel des voix et savoir quel camp l’a emporté. Commencera alors pour de bon le jeu des alliances…
Danièle Kriegel