Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, professeur, désigné comme «islamophobe» sur les réseaux sociaux, était assassiné par un tueur islamiste. Cet assassinat vient après plusieurs massacres, et des dizaines de morts, au nom de l’islam, pour crime de blasphème ou d’« islamophobie ».
Cinq mois plus tard, à l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble, deux professeurs viennent d’être accusés d’« islamophobie » et de « fascisme » par des affiches anonymes placardées à la fac. Ils y sont nommément désignés. Cette accusation a été reprise sur les réseaux sociaux par l’UNEF, qui a approuvé et reproduit cet affichage.
Les étudiants responsables de cette délation, et les responsables de l’UNEF ne font pas le rapport ? A aucun moment, ils ne se disent qu’ils mettent ces enseignants en danger ? Ça ne leur vient pas à l’idée ? Dans ce cas, ce sont franchement des inconscients. Savent-ils au contraire parfaitement ce qu’ils font ? Dans ce cas, cela s’appelle mettre en danger la vie d’autrui. Un professeur de fac décapité, c’est pour quand ?
Mélanie Luce, présidente de l’UNEF, qui est venue pleurer des larmes de crocodile sur Samuel Paty au rassemblement qui a eu lieu à sa mémoire, était toute révoltée, la pauvrette, de se faire huer et traiter de collabo. Je pense que ce dernier fait nous permet de confirmer cette accusation.
Il a fallu un tollé général pour que l’UNEF retire sa dénonciation, sans vraiment regretter franchement ces méthodes. Les affiches glorieusement relayées par l’UNEF étaient obscènes à plus d’un titre. Le plus beau : « L’islamophobie tue. »
« L’islamophobie tue » ! Il faut vraiment ne reculer devant aucune ignominie pour avoir le front d’écrire ça. J’hésite entre la bêtise et l’absence complète de sens moral. Quelqu’un a entendu parler d’une personne assassinée en France, ces dernières années, par islamophobie ? Quelqu’un a un nom ? En revanche, les victimes accusées d’islamophobie, depuis quelque temps, se comptent par dizaines, à commencer par Samuel Paty, et les victimes de l’islamisme par centaines. L’islamophobie, elle, ne tue pas, non. Cette inversion des victimes et des bourreaux est déjà, en elle-même, totalement immorale.
Maintenant, que reproche-t-on à ces professeurs, qui justifie cette délation infâme, et cette accusation de « fascisme » ? De l’islamophobie ? La même chose que le fonds de commerce du Comité Contre l’Islamophobie en France, dissous, et des assassins ?
Si le mot « islamophobie » a un sens, il désigne la peur, ou le rejet irraisonné de l’islam. A certains, l’islam fait peur. Ils ont peut-être tort, mais on peut avoir une certaine indulgence pour cette peur, après tant de sang versé au nom d’Allah, non ? Un de mes meilleures amies a perdu sa sœur, tuée au Bataclan au nom d’Allah. Des étudiants de la Sorbonne ont été tués au Bataclan au nom d’Allah. Pendant qu’on leur rendait hommage, un musulman s’amusait et se réjouissait ouvertement de leur mort devant les portes de la Sorbonne. Mohammed Merah qui a tué des petites filles juives a été acclamé dans certaines banlieues françaises. Cela ne représente pas la majorité des musulmans, mais il n’y a aucune raison de s’inquiéter ? Vraiment aucune ? Que vais-je dire à mon amie ? N’aie pas peur de l’islam, sinon tu es islamophobe ?
Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit, en fait. « Islamophobie », désormais, sert à disqualifier, systématiquement, ceux qui osent discuter certains aspects de l’islam, en faisant croire qu’il s’agit d’un rejet global et viscéral de tous les musulmans. C’est faux, et c’est une pure escroquerie intellectuelle. Il n’y a pas de croyances sacrées, mais discuter de croyances et de pratiques n’implique pas le rejet de ceux qui les entretiennent.
Rappelons aux délateurs affichistes et à l’UNEF que l’islam est une croyance et une opinion. Qu’en démocratie, il est légitime et il est sain de discuter des croyances et des opinions, quelles qu’elles soient. Que la remise en cause des dogmes religieux est même, en France, à l’origine et au fondement de la démocratie. Que par conséquent ceux qui s’y opposent sont des ennemis de la démocratie. Il y a des pays où existe ce que souhaitent ces étudiants, et l’UNEF : que toute remise en cause de l’islam soit interdite. Par exemple l’Arabie saoudite, où accessoirement les homosexuels, les femmes adultères, les apostats, les blasphémateurs sont punis de morts. Que leur comportement et leur délation va exactement dans le même sens. L’islamophobie est un concept qui s’oppose à la liberté d’expression et d’argumentation, et accessoirement un concept qui fait des morts. Il nous fait revenir au Moyen Âge, où on exécutait les impies. Il est donc plus que légitime d’en remettre en cause la pertinence.
Il est également plus que légitime de remettre en cause l’association « racisme, islamophobie, antisémitisme ». C’est ce qu’ont fait les professeurs que dénonce et met en danger l’UNEF. Rejeter les gens pour leur origine ethnique, c’est les haïr pour ce qu’ils sont, c’est à condamner sans réserve, et c’est en France condamné par la justice. Discuter une opinion religieuse, aucun rapport : cela fait partie du libre débat démocratique, que l’on cherche à empêcher par de basses délations et calomnies. Cette association des trois termes est donc absurde. On veut nous faire croire que remettre en cause une croyance est la même chose que rejeter des gens pour ce qu’ils sont. C’est un pur mensonge.
Ajoutons qu’il y a une vraie obscénité à associer islamophobie et antisémitisme dans un pays où on tue des enfants juifs, de vieilles dames juives ou d’innocents clients d’un supermarché kasher au nom d’Allah. Et rappelons que l’antisémitisme est devenu systématique dans de nombreux pays musulmans. On y célèbre les négationnistes. Une amie qui enseignait en Algérie s’est vue dire par ses élèves qu’Hitler n’avait pas tué assez de juifs. Et on sait qu’en France il devient de plus en plus difficile de parler de Shoah dans les collèges de banlieue. Ce sont des faits. Il est légitime de dire qu’une partie du monde musulman a un problème grave d’antisémitisme. Un problème grave avec la liberté des femmes. Mais ce n’est pas un rejet des citoyens musulmans français. Le refus de voir les problèmes, le déni obstiné est la meilleure manière d’envenimer les choses.
Eh bien, des professeurs qui doutent de la pertinence du concept d’islamophobie, mesdames messieurs, pour certains étudiants de l’IEP, et pour l’UNEF, ce sont des fascistes, tout bonnement ! N’ayons pas peur des mots ! Et Thomas Mandroux, de l’Union Syndicale Sciences-Po Grenoble, se drape dans le concept frelaté d’islamophobie, qui fait des victimes, en effet, ceux que l’on accuse d’être islamophobes, pour réclamer sans honte des sanctions contre les professeurs ! Au-delà de cette indécence, c’est faire de l’islam une croyance sacrée, intouchable, comme dans les théocraties moyenâgeuses du Moyen-Orient.
Qui est fasciste ? Des gens qui émettent des doutes modérés, qui discutent, ou des gens qui dénoncent et mettent en danger la vie des autres quand on remet en question leurs dogmes ?
Vous vous souvenez, chers étudiants délateurs, de la Révolution culturelle ? Des professeurs désignés par les jeunes gardes rouges à la vindicte populaire, molestés, humiliés, qualifiés de traîtres et de complices de l’impérialisme parce qu’ils n’étaient pas dans la droite ligne maoïste, c’est-à-dire celle du Bien ? Vous êtes les mêmes. Vous avez la même haine de l’esprit et de la liberté, les mêmes méthodes totalitaires. Le modèle social que vous proposez est effrayant, c’est un retour à l’obscurantisme.
L’UNEF Grenoble, qui a finalement retiré sa délation des réseaux sociaux, et a été désavouée par la direction nationale, un peu tard, tente de s’en tirer, comme d’habitude, en accusant l’extrême droite : elle serait victime d’une « campagne haineuse » de la droite et de l’extrême droite. C’est l’excuse systématique, l’épouvantail commode. Ah, elle a bon dos, l’extrême droite. Trop facile. On se fait critiquer parce qu’on a fait une saloperie, et bien sûr, c’est l’extrême droite. Eh bien non. Si on te tombe dessus, chère UNEF bas du front, cela vient surtout des démocrates, des gens qui sont attachés à la liberté d’expression et de débat, et qui en ont assez de tes pratiques de censure et de dénonciation. Qui préfèrent penser que de se gargariser de slogans.
Et bien entendu, pour le soutien des institutions et des collègues, on attendra. Les lâches dominent, dans ce pays. Et c’est la démocratie, la liberté, la culture qui finissent par payer le prix de la lâcheté. J’ai passé une bonne partie de ma carrière à l’université de Grenoble, et je tiens à manifester mon soutien à mes collègues, et à dire à ceux qui s’abstiennent de les épauler ce que je pense de leur veulerie.
En attendant, en tant que citoyen, et en tant qu’ancien professeur à l’université Grenoble Alpes, j’en appelle aux pouvoirs publics. L’organisation d’extrême droite « Génération identitaire » a été dissoute récemment en conseil des ministres. Le « Collectif contre l’islamophobie en France » a été dissous pour ses discours antidémocratiques. Le bilan de l’UNEF me semble au moins aussi brillant. Racisme : appel d’une responsable de l’UNEF, Hafsa Askar, à « gazer les blancs, cette sous-race ». Obscurantisme : déclaration de la même, devant l’émotion suscitée par l’incendie de Notre-Dame : « Wallah vous aimez trop l’identité française alors qu’on s’en balek, objectivement c’est votre délire de petits blancs. »Censure : intervention violente pour empêcher la représentation d’une pièce d’Eschyle, sous un prétexte fallacieux. Et enfin, délation, diffamation et mise en danger de la vie d’autrui. Je pense que cela serait largement suffisant pour dissoudre cette organisation dévoyée, sectaire, devenue haineuse et dangereuse.
(J’ajoute que si la faute d’orthographe était un motif de dissolution, l’UNEF aurait disparu depuis longtemps.)
Je tiens à préciser que cette chronique est libre, non rémunérée, qu’elle reflète mes opinions et non celles du site qui m’héberge.