Jean Castex et Olivier Véran l’ont enfin reconnu. Les soignants réfractaires au vaccin créent un problème de santé publique.
C‘était depuis quelques jours un secret de Polichinelle : le personnel soignant est plus réfractaire à la vaccination que la moyenne des Français. Mais jeudi soir, lors de leur point de situation sur l’épidémie, Jean Castex et Olivier Véran l’ont admis publiquement. « Seul un soignant sur trois est vacciné, ce n’est pas suffisant », a déploré le Premier ministre. Celui de la Santé a tenté de positiver. Il a glissé que la vaccination des soignants contre le Covid-19 dépasse celle de la grippe saisonnière, avec un taux de 40 % en Ehpad et de 30 % pour l’ensemble du système santé. Très piètre consolation ! En Ehpad, 85 % des résidents sont désormais immunisés, soit deux fois plus que les soignants chargés de veiller sur eux. D’ailleurs, après cette touche positive, Olivier Véran, lui-même médecin hospitalier de profession, a dû en convenir : « Quand on est soignant, il est de notre responsabilité de se protéger soi-même et de protéger ses patients. »
Ce n’est pas seulement une question d’exemplarité, c’est un impératif de santé publique, alors que des études encore incomplètes semblent montrer que le vaccin évite, en grande partie, la transmission de la maladie. Or, selon les chiffres de Santé publique France, le Covid est devenu en un an la première maladie nosocomiale contractée à l’hôpital. Et dans un tiers des cas, l’infection est transmise par un membre du personnel soignant.
Hésitations sur la vaccination obligatoire
Dans ces conditions, la vaccination obligatoire pour les professions médicales devient un sujet essentiel de santé publique. François Chast, président honoraire de l’Académie de pharmacie, en faisait la démonstration mercredi 3 mars sur France Inter : « Nous disposons depuis maintenant quelques semaines de trois vaccins en France qui sont tous les trois de bonne qualité, qui sont très efficaces, qui présentent très peu d’effets indésirables et dont on observe que, qu’il s’agisse de l’hôpital ou des Ehpad, les personnels sont peu enclins à utiliser pour eux-mêmes », se désolait-il, avant d’ajouter : « Je crois que le gouvernement doit prendre son courage à deux mains, considérer que les obligations vaccinales à l’égard des maladies désormais un peu historiques, comme la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, sont certes importantes à prendre en compte pour être salarié dans les hôpitaux ou dans les Ehpad, mais il faut aussi obliger la vaccination contre le Covid. […] On ne peut plus accepter que des personnels refusent la vaccination. »
Alors que l’épidémie continue de sévir, il est difficile de comprendre que la vaccination contre l’hépatite B soit impérative pour les blouses blanches, mais pas celle contre le Sars-CoV-2. Néanmoins, l’exécutif préfère, pour le moment, employer la méthode douce : « Dès demain, j’écrirai une lettre à l’ensemble des soignants de ce pays pour les inciter très fortement à se faire vacciner et, bien sûr, pour les remercier. » Un courrier suffira-t-il ? Les chefs de service dans les hôpitaux tentent aussi de persuader le personnel et assurent que la cause progresse. Il faudrait toutefois qu’elle progresse très vite pour qu’une telle situation ne se transforme pas en scandale.
Sophie Coignard