Ce n’est ni israélien, ni juif mais c’est génial : qui n’a pas rêvé de fournir à l’un de ses proches un moyen simple et moderne d’être connecté? Le coussin Viktor le fait.
Viktor, c’est une belle aventure née en 2015. Alain Tixier a la douleur de perdre son père. « Ma mère, septuagénaire, en perte d’autonomie, se retrouve seule. J’ai réfléchi à comment conserver le contact. » Tablettes et autres smartphones s’avèrent compliqués à l’usage. « Il fallait quelque chose qui ne fasse pas peur, qui soit doux et bienveillant. » Sa maman, pianiste, mimait souvent la course des doigts sur le clavier. « J’ai alors pensé au coussin, en y adaptant une technologie que je travaillais pour EDF, à savoir des capteurs pour les vitrines de leurs boutiques. »
Soutien de Nevers agglo
Cette histoire personnelle sera suivie, à partir de 2016, de deux à trois ans de recherche avec des ingénieurs. En 2017, il lève 1,2 million d’euros via le fonds d’investissement et d’accompagnement des start-up tech et digitales Side Capital.
Lors d’un salon à Tel-Aviv, en Israël, il présente un prototype de son coussin. Il rencontre notamment la délégation de Nevers agglomération. Son président, Denis Thuriot, se dit prêt à l’aider dans son développement et lui réserve une place à l’Inkub, dans la cité ducale. « J’avais déjà trois personnes à Nice mais il était difficile de les faire venir à Nevers. J’y ai donc créé un établissement de ma société Fingertips, née en 2013. »
Jusqu’en 2019, il est présent sur de nombreux Salons, rencontre les CCAS de la Nièvre et expérimente quelques coussins au foyer de la Roseraie à Nevers. Le bouche-à-oreille fonctionne et les ventes officielles peuvent commencer. Aujourd’hui, plusieurs Ehpad nivernais en sont dotés : Daniel-Benoist à Nevers, Pignelin à Varennes-Vauzelles, Émile-Clerget à Nevers et La Roseraie.
Appels vidéo, lecture de livres, jeux cognitifs…
Le coussin connecté Viktor dispose d’une touche qui permet un appel aux soignants en cas de problème. Un système développé avec Vitaris Téléassistance au Creusot (Saône-et-Loire). S’y ajoutent de nombreuses fonctions, ludiques, simples, qui contribuent à sortir les personnes de l’isolement, surtout en Ehpad : de la musique, des films, 4.000 heures de lectures de livres, la connexion vidéo avec la famille, des jeux cognitifs, le visionnage de photos. Ce sont aussi des spectacles, filmés et diffusés en direct par Fingertips.
Mais comment cela fonctionne-t-il ? Le coussin Viktor est relié à l’écran de télévision via un câble HDMI et utilise le réseau internet via une clef 4G pour ceux qui n’ont pas de fournisseur d’accès.
Chacun peut se procurer un coussin. Il coûte 249 € l’unité mais, grâce à une offre de remboursement, il revient à 199 €, plus 15 € d’abonnement mensuel. Les personnes de plus de 65 ans en perte d’autonomie reconnue bénéficient d’un crédit d’impôt de 50 %. Le coussin est livré avec le boîtier de connexion, une webcam. Si vous devez prendre en plus la clef 4G, il faut ajouter 4 € par mois. Il est également possible de le louer, avec l’option satisfait ou remboursé valable un mois. À l’issue de ce délai, le coût est de 29 € par mois, tout compris.
Des embauches cette année
Les composants électroniques sont fabriqués à Nice, où Fingertips dispose de trois salariés. Un designer est installé à Lyon ; à Nevers, dans les locaux de l’Inkub, il sont quatre. Et Alain Tixier de préciser : « En cette année 2021, j’embaucherai une quinzaine de personnes. » Quant à la couture des coussins, elle a, pour l’heure, été confié à l’entreprise adaptée Adapei 58 SAS à Urzy. Ajoutons que grâce à un partenariat avec Orange, il est possible d’acheter ou de commander le coussin dans les 1.200 points de vente de l’opérateur téléphonique en France.
En douze mois, le coussin Viktor a déjà obtenu dix-huit médailles, dont deux en or du concours Lépine, celle de la Société française de la médecine et du sport et celle en bronze de la ville de Paris.
Dès 2019, l’Ehpad Daniel-Benoist de Nevers a opté pour le coussin Viktor. Aujourd’hui, les quatre-vingt une chambres en ont un. « Ce coussin aide les résidents à notamment garder le lien avec leurs familles », souligne Marina Bonneau, directrice de l’établissement. « Et pour eux, c’est plus facile à utiliser qu’une tablette. » Elle poursuit : « Nous en avons également un dans notre salle cinéma, pour ceux qui n’ont pas la télévision dans leur chambre ou qui sont mal voyants. La diffusion s’y fait sur grand écran. »
Louisette Marsilla, 95 ans, originaire du Cher, est à l’Ehpad Daniel-Benoist, à Nevers, depuis environ trois ans. « J’utilise ce coussin pour communiquer régulièrement en vidéo avec ma fille et mes deux petits-enfants », confie-t-elle. « C’est important, surtout avec cette période de confinement. Ça permet de se sentir moins seule, de prendre des nouvelles, de se voir et de s’entendre. »