À Kiev, un projet de mémorial de la Shoah qui devait rappeler le massacre par balles de Babi Yar, propose aux visiteurs de se mettre dans la peau des bourreaux nazis.
Les 29 et 30 septembre 1941, plus de 33.000 Juifs, hommes, femmes et enfants, furent tués par balle dans un ravin en périphérie de Kiev. Méthodiquement, à la mitrailleuse. Les hommes des Einsatzgruppen, la police politique militarisée du Reich, et les Waffen SS qui les escortaient ne se sont pas arrêtés à ce premier massacre. Entre 1941 et 1943, les estimations du nombre de personnes tuées par les nazis à Kiev vont de 45.000 à 100.000. Qu’ils soient Roms, résistants communistes, prisonniers de guerre ou simples citoyens, tous furent exécutés et leurs charniers brûlés pour ne laisser aucune trace des exactions de masse. Babi Yar, à la différence des camps d’extermination, fait partie des sites d’Europe orientale de ce qu’on a appelé la « Shoah par balles« . Après la chape de plomb imposée par les Soviétiques sur toute évocation de ce passé, il aura fallu attendre trois quarts de siècle pour qu’un projet de mémorial témoigne enfin de cette période de l’Histoire. C’est pourtant aujourd’hui, paradoxalement, le début des difficultés.
Après trois ans de tergiversations, un artiste russe a finalement été embauché par quatre oligarques, mécènes du chantier, afin de concevoir la thématique du parcours de visite du mémorial. Ce n’est pas n’importe qui. Ilya Khrjanovsky, 44 ans, héritier du pape des dessins animés en URSS, est un cinéaste à la réputation sulfureuse.
Le visiteur peut incarner un Juif… ou un bourreau nazi
En expliquant l’automne dernier qu’il souhaitait accompagner les visiteurs du futur site « dans un périple émotionnel qui pourra choquer, avec pour chacun d’entre eux des choix éthiques à la clé », il a dérouté ses interlocuteurs. Son idée majeure consistait en effet à placer le visiteur dans un jeu de rôle. En choisissant de se mettre à la place d’un Juif, d’un bourreau nazi, d’un collaborateur ukrainien ou d’un prisonnier de guerre soviétique, l’explorateur de mémoire s’embarquerait ainsi dans un labyrinthe où chaque étape – avec des lunettes de réalité virtuelle pour visionner les atrocités du passé – lui permettrait de choisir de reculer ou d’avancer, d’assumer ou de se rendre.
Après des semaines de sidération, la plupart des experts recrutés avant l’arrivée de Khrjanovsky ont démissionné ou ont été limogés. En commençant par le curateur autrichien du mémorial. Dans une lettre circonstanciée de deux pages adressée aux dirigeants de la Fondation Babi Yar, il justifie son refus de s’associer à un « Disneyland de la Shoah ».
Idem pour l’historien néerlandais Karel Berkhoff, spécialiste mondial de Babi Yar. Interrogé au téléphone par le JDD, il raconte : « Lorsque j’ai vu le PowerPoint de Khrjanovsky et entendu qu’il allait se servir d’algorithmes, de reconnaissance faciale et de lunettes de réalité virtuelle pour faire visiter ce site, je ne me suis pas reconnu dans ce qui tenait de la production d’un blockbuster, et où l’émotion et l’excitation devaient primer sur le respect et la pédagogie. »
Des personnalités prestigieuses qui valident malgré tout la direction choisie
En France, la Fondation pour la mémoire de la Shoah a eu vent du projet à ses débuts, puis au moment du recrutement de Khrjanovsky. Pour le directeur du Mémorial de la Shoah, Jacques Fredj, « le rôle d’un site de cette nature, c’est de faire réfléchir, pas de jouer sur les émotions, sinon ça devient un jeu vidéo ». Selon lui, il y aurait ainsi des lignes rouges. « Un mémorial est fait pour comprendre comment on en est arrivé à une telle barbarie, comment un génocide se met en place. En aucun cas il ne peut s’agir de reconstituer ce qui s’est passé, y compris par les plus récentes inventions technologiques. »
Historien lui-même, il a suivi le travail de Steven Spielberg dans les musées de l’Holocauste de Dallas et de l’Illinois, avec ses hologrammes de rescapés juifs de la Shoah. Le metteur en scène de La Liste de Schindler a beaucoup œuvré pour faire vivre leur témoignage au-delà de leur décès afin que leur voix continue à être entendue. « De là à finir par jouer au Juif ou au bourreau? s’interroge également le grand rabbin de France, Haïm Korsia. Non. »
Vendredi, lors d’une nouvelle réunion du comité de surveillance du mémorial de Babi Yar, les personnalités prestigieuses qui y siègent ont, selon nos informations, renouvelé leur confiance à Khrjanovsky. À commencer par Natan Sharansky, célèbre dissident juif soviétique devenu vice-Premier ministre en Israël et aujourd’hui à la retraite. Ou Irina Bokova, l’ex-directrice générale bulgare de l’Unesco ; Joschka Fischer, ex-chef de la diplomatie allemande ; et l’ex-sénateur américain Joe Lieberman, colistier en 2000 du démocrate Al Gore pour la Maison-Blanche.
Quels sont leurs liens avec Mikhail Fridman, milliardaire russe d’origine ukrainienne proche de Vladimir Poutine et principal mécène du mémorial de Babi Yar, où 100 millions de dollars ont été investis? Pour tous, c’est évidemment l’attachement à la mémoire de la Shoah, car cette nouvelle institution pourrait bien devenir le plus grand site mémoriel d’Europe. Mais on ne peut occulter la question de l’implication possible du Kremlin.
Le président Zelensky, d’origine juive, se tient à distance du projet
« Le drame est que ce projet se télescope avec une guerre en cours en Ukraine », décrypte Vladislav Davidzon, rédacteur en chef au magazine en ligne Tablet, consacré à la vie culturelle juive, qui a suivi le dossier depuis le tout début. « Les Russes ne sont pas les seuls à essayer de réécrire et réinterpréter l’Histoire. C’est un processus qui est à l’œuvre aujourd’hui des pays Baltes à la Hongrie en passant par la Pologne ou l’Ukraine et qui renvoie les opinions publiques à la réalité du nationalisme. »
Les nationalistes ukrainiens qui luttent contre l’hégémonie russe ont une relation compliquée avec leurs ancêtres qui ont collaboré avec les nazis contre les communistes. Si le mémorial de Babi Yar est né sous la présidence Porochenko, le successeur de celui-ci, Volodymyr Zelensky, d’origine juive, ne semble apparemment pas vouloir s’impliquer dans ce « cauchemar politique », selon les mots de Davidzon. Il n’y a donc à ce stade aucun financement public ni la moindre participation de l’État ou des pouvoirs publics de Kiev au sein des instances de direction. Le mémorial devait ouvrir en 2023. Les enjeux de mémoire et le débat muséographique en cours pourraient bien retarder cette échéance.
non Kiev qui a ete l,enfer sur terre pour les familles juives l,enfer sur terre desenfants ,,,,les femmes ,,,,les hommes,,,,cette terrible période n,est pass terminée car cette ignoble et sale ethnie poursuit son maudit travail,,sans réaliser que de gros malheurs se poursuivent dans ce pays de la mort noire,,.,,non aucun mémorial sur la mort de nos frères,,,,,,mais oui un mémorial Pour. démontrer les crimes de ce peuple en voie de disparition,,