Le traitement controversé contre le coronavirus de Didier Raoult rejoint l’essai européen Discovery dont la part française est conduite par l’Inserm. Il portera sur plusieurs centaines de patients hospitalisés. Réponse probable dans six semaines.
Une semaine aura suffi pour que la chloroquine passe du statut de fake news vilipendée par une majorité du milieu scientifique, à celui de candidat médicament contre Covid-19. De source gouvernementale, on confirme que l’autorisation accélérée d’un essai clinique randomisé de grande ampleur supervisé par l’Inserm va être accordée ce mardi.
Ce produit controversé rejoindra les trois candidats déjà inclus dans le vaste essai Discovery que conduit l’institut de recherche médicale dans le cadre du consortium multidisciplinaire Reacting (Research and action targeting emerging infectious diseases) qui réunit plusieurs groupes de recherche français d’excellence. Cette étude est prévue pour inclure au total 3.200 patients en Europe, dont 800 en France.
Quand il a été inauguré en mars 2018, l’IHU Méditerranée Infection de Didier Raoult n’a pas obtenu d’Yves Lévy, alors patron de l’Inserm et encore époux de l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn, le label qui lui donnerait une reconnaissance indiscutable. Le chercheur iconoclaste a donc dû batailler auprès du gouvernement pour faire entendre la voix de son pôle de recherche qui figure pourtant parmi les plus prolifiques du pays.
« Nous parlons ensemble plusieurs fois par semaine et j’ai donné toutes les impulsions nécessaires pour que son étude puisse être expérimentée de façon indépendante ailleurs, à plus grande échelle, pour confirmer ou infirmer ses résultats », a expliqué samedi Olivier Véran, ministre des Solidarité et de la Santé.
Plusieurs dizaines de centres impliqués
L’étude Discovery qui démarre ce dimanche sera conduite dans une poignée de CHU (Paris, Lyon, Nantes, Lille) et progressivement étendu « à plusieurs dizaines de centres », selon l’infectiologue Jad Ghosn, qui supervisera l’essai à l’hôpital Bichât de Paris Nord. Les patients seront répartis en cinq groupes : un groupe placebo traité pour les symptômes uniquement, un pour tester l’efficacité d’un médicament anti-VIH (le Kaletra), un autre qui l’associera à de l’interféron bêta pour moduler la réponse immunitaire, un troisième pour vérifier l’effet d’un antiviral développé contre le virus Ebola (le Remdesivir).
Le « bras chloroquine » sera ajouté vendredi prochain. Il implémentera Discovery de plusieurs centaines de patients « par vagues successives », en France mais aussi en Italie et en Espagne notamment. Les résultats pourraient être connus dans moins de 6 semaines.
Il y a urgence, car l’administration de Plaquenil, l’un des noms commerciaux de chloroquine, se généralise sans contrôle. Sous couvert de « raisons compassionnelles » envers les familles de patients lourdement atteints, plusieurs chefs de cliniques traitent déjà des malades avec ce médicament qui peut avoir des effets indésirables chez les séniors ou associés à certaines familles d’antibiotiques. Au Maroc, le gouvernement a également décidé de passer outre les confirmations scientifiques en achetant tous les stocks de l’usine Sanofi de Casablanca pour traiter les malades.