Les start-up israéliennes éprouvent des difficultés à retenir leurs talents, dont le vivier ne grossit pas assez vite. Ceux-ci cèdent au chant des sirènes des grandes entreprises, plus rémunératrices. Les dirigeants de start-up doivent alors trouver le moyen de fidéliser leurs employés sans pour autant activer le levier financier, écrit Alain Richemond.
Avec un parc de plus de 6.000 start-up et une création nette de 600 nouvelles jeunes pousses par an, Israël est montré en modèle. Mais la «start-up nation» n’échappe pas aux lois de l’offre et de la demande de talents.
La rareté croissante de développeurs ou de spécialistes en intelligence artificielle provoque une montée problématique des rémunérations. Les entreprises internationales qui investissent dans des plates-formes de recherche et développement en Israël participent activement à cette inflation des salaires. Une étude récente du Central Bureau of Statistics montre que les entreprises étrangères payent en moyenne leurs employés 50 % de plus que les start-up. Les grandes entreprises internationales qui bénéficient de l’écosystème créatif du pays contribuent à assécher le marché de l’emploi dans la technologie et les secteurs de pointe.
Engagement durable
Les dirigeants des grandes entreprises comme ceux des start-up vont devoir vite s’interroger sur les moyens de retenir leurs talents sans principalement accorder de nouveaux avantages financiers. Sur ce plan, la «start-up» nation accuse un retard certain causé par trois facteurs : premièrement un afflux continu de capitaux qui nourri une inflation des rémunérations ; deuxièmement, des sorties rapides qui ne poussent pas les dirigeants de start-up à conduire des politiques RH plus durables ; troisièmement en raison du «brain drain» des multinationales sur le marché de l’emploi tech.
Le classement 2019 effectué par l’école de management INSEAD sur la capacité des pays à produire, attirer et à retenir les talents indique que si Israël est au 20e rang mondial sur l’ensemble des facteurs, en revanche le pays des start-up chute au 49e rang pour sa capacité à les attirer.
Pour les start-up qui affrontent la concurrence des grandes entreprises internationales sur le marché des compétences, l’enjeu stratégique est surtout celle de réussir à créer un engagement durable et une plus grande fidélité à l’entreprise. Les dirigeants cherchent à activer les ressorts d’un attachement plus constant en valorisant des intrapreneurs au sein de leurs start-up.
Les neurosciences nous suggèrent des pistes pour comprendre quel serait le principal ressort du cerveau qui serait activé pour créer cet engagement. La perception de se réaliser, de solliciter son désir d’entreprendre, le sens du dépassement, la prise de risque, la perception positive d’être associé à une équipe soudée et solidaire, forgent l’esprit d’entreprendre qu’il faut réussir à entretenir pour fidéliser les talents.
Les circuits de reconnaissance du cerveau de ces intrapreneurs passent par leur désir d’être acteur de projets ambitieux, avec la perspective d’être impliqués dans plusieurs aventures successives. Dès lors les start-up qui parviendront à faire réduire le roulement des effectifs au détriment des plates-formes internationales par une plus grande fidélisation de leurs talents parviendront à survivre.
L’assèchement du marché de l’emploi dans les secteurs de pointe pourrait rapidement s’étendre à toute l’industrie mondiale de la tech. La pénurie de talents qui touche Tel Aviv, peut laisser craindre que les start-up de la planète connaissent des difficultés croissantes à mobiliser les talents indispensables à leur créativité et développement.
Alain Richemond est conseiller principal d’Idoko, start-up basée à Tel Aviv.