Les Palestiniens travaillant pour des entreprises figurant sur la liste noire des sociétés opérant en Cisjordanie de l’UNHRC occupent des postes de direction et gagnent jusqu’à trois fois le salaire payé par les entreprises au sein de l’Autorité palestinienne, mais des boycotts potentiels pourraient y mettre un terme
Les colonies de Cisjordanie restent un point central de discorde dans la société israélienne. La plupart des Israéliens aiment les colons eux-mêmes. Ils sont considérés comme le sel de la terre, les premiers à se porter volontaires, les premiers à rejoindre les unités de combat dans leur service militaire et les premiers à redonner à leurs communautés.
Mais la plupart des Israéliens ne soutiennent pas les colonies. Une étude de 2017 montre qu’une majorité d’Israéliens s’opposent à l’expansion des colonies au-delà des blocs, et 69% des Israéliens soutiendraient un retrait des colonies en cas de résolution convenue du conflit avec les Palestiniens.
Lorsque les organisations internationales s’immiscent dans le discours interne légitime d’Israël, elles aident les soutiens de l’extrême droite qui prônent l’expansion des colonies. Ces organisations ne cherchent pas à résoudre le conflit et sont composées principalement d’États membres non démocratiques. Bien que certains d’entre eux aient des relations avec Israël – ouvertement ou pas – ils sont cohérents dans leurs positions anti-israéliennes de longue date.
Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, qui a publié mercredi une liste noire des entreprises opérant dans les colonies de Cisjordanie, a voté pour accepter 18 résolutions condamnant Israël en 2019; en revanche, seules sept résolutions ont été adoptées condamnant tous les maux du reste du monde.
Avec le Venezuela qui persécute ses propres citoyens, l’Iran qui tue des manifestants anti-gouvernementaux, la Birmanie qui effectue un nettoyage ethnique contre la minorité Rohingya et la Chine qui emprisonne des millions de musulmans dans des camps de rééducation, Israël reste LE problème.
Si la critique des colonies n’est pas de l’antisémitisme, selon la définition de l’antisémitisme dans les lignes directrices adoptées par l’UE en 2016, l’obsession anti-israélienne du CDH est en revanche une manifestation de ce phénomène.
Il n’y a aucune conséquence immédiate attendue à la suite de la publication de la liste, mais il faut rappeler qu’une grande entreprise comme SodaStream, a dû fermer son usine de production de Cisjordanie en raison de la pression internationale des partisans du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS). Les entreprises figurant sur la liste du CDH peuvent se retrouver dans une situation similaire.
Les zones industrielles de Cisjordanie emploient près de 20 000 travailleurs palestiniens. Ils ne sont ni exploités ni abusés par un système colonialiste. Les Palestiniens qui travaillent pour de nombreuses entreprises occupent des postes de direction et gagnent jusqu’à trois fois le salaire payé par les entreprises opérant au sein de l’Autorité palestinienne.
Le gouvernement du président palestinien Mahmoud Abbas avait lui-même tenté d’éloigner les Palestiniens de ces positions et de forcer le boycott des entreprises et des produits, mais il a échoué lorsque les employés ont choisi de conserver leur emploi.
Leurs revenus sont une partie vitale de l’économie palestinienne et leur suppression aurait des implications à long terme qu’ils ne pourraient pas supporter. Le déménagement de SodaStream hors de Cisjordanie a été considéré comme une victoire pour le mouvement BDS, mais cela a coûté des centaines d’emplois et les employés palestiniens en ont payé le prix.
Les entreprises israéliennes figurant sur la liste noire pourraient subir elles-mêmes des conséquences, mais leurs travailleurs palestiniens seront ceux qui en paieront le prix le plus lourd. La discussion sur la légalité ou l’avenir des colonies est légitime et importante, mais elle est loin de la campagne de boycott qui s’oppose au droit même d’Israël à exister. Si et quand la fin du conflit israélo-palestinien sera atteinte, des parcs industriels avec des entreprises israéliennes seront nécessaires pour fournir des emplois.
Le BDS, il faut le dire, a remporté une victoire mais la réalisation symbolique aura un prix et les travailleurs palestiniens seront obligés de le payer.
Line Tubiana traduit et adapté de la tribune de Ben Dror Yemini