Ce jeudi 30 janvier, Lyon a rendu hommage aux 75 enfants juifs séquestrés en 1944 au sein de l’hôpital de l’Antiquaille. Ces enfants de 4 mois à 14 ans, morts en déportation. Cette page sombre de l’histoire écrite en 1944 a été exhumée par une historienne lyonnaise…
est un épisode méconnu de l’histoire lyonnaise qui est révélé aujourd’hui, 75 ans après la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau. L’histoire de l’internement de 75 enfants juifs au sein de l’hôpital de l’Antiquaille, sur les hauteurs de Lyon. Ce jeudi 30 janvier, à l’initiative du CRIF, une plaque commémorative était dévoilée sur le site de l’Antiquaille, sur l’Esplanade Saint Pothin, dans le 5e arrondissement de Lyon. Un acte qui se veut fort alors que l’on vient de célébrer les 75 ans de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau.
Ce sont 75 élèves de classe de CM2 à l’Ecole Albert Camus qui ont déposé une rose, symbolisant ainsi les 75 enfants séquestrés à l’Antiquaille. Des élèves du lycée Saint-Just ont prononcé un à un les noms de ces enfants internés et déportés.
Des enfants juifs séquestrés à l’Antiquaille et déportés entre février et août 1944
Durant l’occupation, la prison de Montluc à Lyon est réquisitionnée par les Allemands et devient en 1943 un centre d’internement pour les juifs de la région en plus d’être une prison. Un endroit rapidement surpeuplé.
Alors à partir de février 1944 et jusqu’en août 1944, les enfants juifs raflés par la Gestapo et des collaborateurs français, sont séparés de leurs parents et expédiés à l’hôpital de l’Antiquaille. L’hôpital situé sur les hauteurs de la ville, près de la colline de Fourvière, avait déjà transformé par les autorités françaises en « prison » pour les résistants malades, soignés sous surveillance.
Dans cet établissement, des enfants juifs de moins de 15 ans seront séquestrés durant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, avant d’être déportés, expédiés vers Drancy puis Auschwitz, pour la majorité d’entre eux. Ce sont 75 enfants, âgés de 4 mois à 14 ans, qui passeront par ces murs.
La majorité des ces enfants, 58, étaient français. Les autres venaient d’Allemagne ou du Luxembourg. Ce sont 48 de ces enfants qui ont été déportés. Un seul d’entre eux est revenu des camps: Charles Zajtman. Il était âgé de 11 ans. Les enfants ont été gazés dés leur arrivée au camp, d’autres victimes d’expérimentations médicales.
Seuls neuf enfants ont échappé à la déportation en raison de la libération de Drancy le 18 août 1944. Six enfants ont été libérés grâce à une opération de la résistance juive (Union juive pour la résistance et l’entraide). Il restait un enfant à l’Antiquaille au moment de la Libération de Lyon.
Cette histoire méconnue est aujourd’hui révélée grâce au travail d’une historienne, Sylvie Altar. Les recherches de l’historienne ont permis de redonner une identitée à ces enfants raflés et déportés. Aujourd’hui leurs 75 noms sont gravés sur une plaque commémorative. Cette idée de plaque commémorative pour ces 75 enfants, c’est elle qui en a eu l’idée : « Je voulais que leurs noms soient quelque part, » explique l’historienne.
Retrouver la trace et reconstituer le parcours des enfants et adolescents juifs de Lyon, victimes de la Shoah
Au total, ce sont 376 enfants juifs (soit nés à Lyon, soit rassemblés dans cette ville, soit habitant de la région lyonnaise) qui ont été victimes de la barbarie des nazis. Quarante-quatre d’entre eux étaient cachés dans la colonie d’Izieu. Sur le nombre total de ces enfants, 46 survivants ont été identifiés.
La mémoire de ces jeunes victimes de la Shoah originaires de Lyon est consultable que le site du Centre de Documentation sur la Déportation des Enfants Juifs.
Le site rassemble leurs noms, leurs parcours et surtout des témoignages, documents originaux et archives, consultables en ligne. Le Centre de Documentation sur la Déportation des Enfants juifs de Lyon a été créé en 1987 par Claude Ghenassia lors du procès à Lyon de Klaus Barbie. Le Mémorial de la Déportation des Juifs de France de Serge Klarsfeld, la base de données de l’Institut Yad Vashem (Jérusalem) et du Mémorial de la Shoah (Paris) ont été les références essentielles pour mener à bien ce projet.
Le Centre a mis en ligne une carte localisant les enfants juifs victimes des rafles et déportations dans la région de Lyon entre 1942 et 1944. Elle retrace toutes les informations les concernant.
Sylvie Altar est l’auteur d’une thèse intitulée « Etre juif à Lyon de l’avant-guerre à la libération ».