On dit toujours « chiffres arabes » et on parle alors du génie arabe, mais non, encore un fake qui a la peau dure : ce sont les indiens (Inde) qui ont inventé les chiffres.
Je lis en ce moment un livre passionnant « Le grand roman des maths. De la préhistoire à nos jours« , de Mickaël Launay. Tout le monde peut le lire, c’est une présentation des maths originale, qui explicite tout un tas de concepts qui nous restent assez obscurs, et en plus c’est bien écrit, et drôle.
Et donc, il passe en revue les apports des différentes cultures et civilisations à ce monde des maths. Ayant abordé ce livre sans aucune compétence particulière, j’ai donc lu avec beaucoup d’intérêt que les indiens avaient une vraie tradition mathématique, mais qui est restée orale jusqu’aux alentours du Vème siècle.
Déjà cette ressemblance avec l’histoire de la Torah m’a accrochée. Trois grands savants indiens sont cités pour leur apport aux maths : Aryabhata, pour ses calculs du nombre π, Varahamihira, pour ses calculs trigonométriques, et surtout, Bhaskara, le premier à écrire et conceptualiser le « zéro » . Il a été bien sur aussi le premier à donner la description précise des propriétés de ce nombre si particulier : X-X = 0 et X(+/-)0 = X.
Vous allez donc vous demander pourquoi on parle toujours des chiffres arabes. Très simple : conquête militaire et appropriation…En 711, l’Inde fut envahie par une armée arabe menée par un jeune commandant, Muhammad Ibn Qasim. Les savants arabes vont intégrer les connaissances du pays aux leurs propres, et les diffuser dans le monde.
Et c’est ainsi qu’est née et perdure cette légende du « chiffre arabe » dont ont vient nous rebattre les oreilles à tout bout de champ, pour explique et étayer la suprématie de la pensée arabe. Cette légende qui dure depuis si longtemps, qu’alors qu’il est aujourd’hui établi depuis pas mal de temps que les chiffres sont indiens et non arabes, on arrive encore à faire gober ça au public comme une vérité : bel exemple de « fake news » sur le très long terme.
La morale de cette histoire : j’aurais du lire Denis Guedj, il y a déjà 15 ans !
Line Tubiana