Après une semaine de procès aux assises, aucun des deux accusés n’a reconnu avoir assassiné ce retraité juif de Créteil.
On ne saura jamais qui a tué Alain Ghozland. Ce vendredi matin, quand les deux accusés étaient invités à prendre une dernière fois la parole avant que le jury ne parte délibérer, les proches de la victime espéraient encore que Djibril et Ramzi allaient soulager leur conscience et tout raconter. Mais non.
Officiellement, ils sont donc deux à avoir commis cet assassinat le 11 janvier 2016 à Créteil. Le premier, avec son casier judiciaire chargé et ses incidents à répétition en détention, a été condamné à 20 ans de réclusion par la cour d’assises du Val-de-Marne. L’autre a pris 16 ans. Ils encouraient la perpétuité. Ce jeudi, l‘avocate générale avait requis 25 et 22 ans. Elle n’a pas été suivie, et c’est scandaleux!!
Le jour du drame, Djibril, 23 ans, et Ramzi, 21 ans, font irruption dans l’appartement d’Alain Ghozland. Ce retraité sans histoire, conseiller municipal à Créteil et pilier de la communauté juive, vit seul à 73 ans avec sa maman centenaire. Pourquoi les agresseurs l’ont-ils choisi ? On ne saura pas. « Sans doute que mon client l’a aperçu et qu’il s’est dit tiens un jour je vais me le faire », suppose François Negrel-Filippi, l’avocat de Djibril.
Ce dernier, deux jours avant, avait frappé à coups de perceuse un gardien d’immeuble de Créteil qui venait de le surprendre en plein cambriolage. Il était parvenu à prendre la fuite. « Peut-être a-t-il voulu se refaire », avance son avocat.
Toujours est-il qu’il organise ce « home-jacking » juste après avec la complicité de son copain Ramzi. Alain Ghozland ne roule pourtant pas sur l’or. « Le fait qu’il roulait en Austin Mini a suffi à allécher les voleurs », soupire un proche de la victime.
« Aucun endroit de son corps n’a été épargné »
C’est parce qu’il était juif et qu’il avait donc de l’argent, selon le cliché ancestral ? Rien n’a permis d’accréditer cette hypothèse durant l’instruction et le procès. « Il y a une coloration antisémite, considère Denis Chemla, l’un des deux avocats des parties civiles. Mais ce n’est pas un crime antisémite comme avec le gang des barbares. »
Une fois qu’ils sont entrés, les deux jeunes se répartissent le travail. L’un entrave le retraité pendant que l’autre fouille l’habitation. Et ils inversent les rôles. Qui a provoqué l’asphyxie mortelle ? On ne saura jamais. On ne saura pas non plus qui a porté les coups. « Car il a bien été massacré, souligne la sœur d’Alain Ghozland. Aucun endroit de son corps n’a été épargné. Les deux accusés n’ont pourtant pas arrêté de dire qu’ils ne voulaient pas le tuer ».
Djibril a bien reconnu qu’il était responsable de la mort du retraité. Tout en assurant qu’il n’a commis aucune violence. Ramzi, lui, s’est réfugié dans le « mutisme », selon Olinka Malaterre, avocate des parties civiles. « On ne sait donc pas qui a commis l’acte fatal », résume François Negrel-Filippi.
Questions sans réponse
Malgré ces questions qui resteront sans réponse, la famille d’Alain Ghozland tente de se réconforter. « D’abord en sachant que dorénavant les Cristoliens sont à l’abri de ces gens-là », précise sa nièce.
Et puis il y a cette satisfaction que la justice a fait son travail. « Il y a eu un énorme travail de la brigade criminelle, mettent en avant les proches de la victime. Pendant tout le procès, nous avons été écoutés. Nous avons pu parler d’Alain. Dire à quel point c’était quelqu’un de disponible et de serviable. Il a fait du bien à beaucoup de gens. »
La peine infligée aux deux meurtriers ? Elle n’a pas tant d’importance que ça pour les proches de la victime. « Tout ça ne nous ramènera pas Alain », prend du recul un neveu. La sœur de la victime a eu aussi une pensée pour sa maman centenaire, décédée il y a un mois. Une maman qui s’était impliquée dans la préparation du dossier. « Elle me répétait qu’au moment du drame, si elle avait été là, elle aurait pu protéger Alain. »