La quête de la Ménora et de l’Arche de la loi est également un des grands défis que les archéologues de plusieurs générations ont tenté de relever.
L’un des monuments les plus visités au forum à Rome est l’arc de triomphe de l’empereur Titus consacré par son frère Domitien pour marquer la prise de Jérusalem en l’an 70. On y trouve l’inscription : « Dédié par le Sénat et le peuple de Rome à Titus Vespasien Auguste, fils de Vespasien. »
Le butin pris au Temple de Jérusalem dont la Menora ou candélabre à sept branches (à ne pas confondre avec le chandelier à 8 branches traditionnellement en usage pour célébrer la fête de Hanoukka qui dure 8 jours.) y figure sur un bas-relief. Tout comme l’Arche de la loi contenant les tablettes des Dix commandements, la Ménora était conservée dans le Temple de Salomon.
La Ménora est décrite par le détail dans le livre de l’Exode (25-31 à 25-38) : c’était un candélabre en or pur, tout d’une pièce, avec sa base et sa tige centrale. Six branches sortaient de ses côtés: trois branches de chaque côté, trois branches du côté opposé. Chaque branche comportait trois calices avec bouton et fleur. Au cours des âges, la Ménora a pris une valeur symbolique, voire mystique auprès des exégètes de la Bible. On la retrouve dans plusieurs ornements architecturaux de la période du Second Temple, dans des bas-reliefs de cathédrales ainsi que dans de nombreux manuscrits et enluminures hébraïques.
La quête de la Ménora et de l’Arche de la loi est également un des grands défis que les archéologues de plusieurs générations ont tenté de relever. Des romans fascinants tel Le chandelier du Vatican d’André Soussan ou même des films d’action tel À la recherche de l’Arche perdue du cinéaste Steven Spielberg ont suscité la curiosité du grand public. Beaucoup pensent que la Menora est entreposée au Vatican dont les caves regorgent d’artefacts et de documents historiques que la papauté a préservés des siècles durant.
Pour ce qui est de l’Arche de la Loi, le second livre des Macchabées rapporte qu’elle aurait été cachée par le prophète Jérémie au mont Nébo en Transjordanie – lieu ou Moїse fut enseveli – peu avant la destruction du Temple de Salomon par les Babyloniens en 586 avant l’ère courante. Selon les sources talmudiques, l’Arche contiendrait les Tables de la Loi (Tables de l’Alliance) et probablement une copie de la Torah de Moїse ainsi qu’une fiole d’huile consacrée. D’autres légendes situent l’Arche de la Loi en Égypte ou même en Éthiopie.
Les théories relatives à l’emplacement de la Ménora sont multiples et beaucoup n’ont pas d’assise historique solide. Il y a cependant un document de l’époque byzantine qui en parle de façon explicite. Une contextualisation historique en facilitera la présentation.
L’Empire romain devint si étendu qu’il finit par être divisé en Empire romain d’Occident et en Empire romain d’Orient (l’Empire byzantin). L’Empire romain subit les attaques successives des Huns, des Visigoths, et des Vandales. En 429, sous la conduite de leur roi Genséric aussi surnommé bâton de Dieu, ces derniers conquirent l’Afrique du Nord et Carthage dans l’actuelle Tunisie. Ils firent une expédition contre Rome qu’ils pillèrent et les légendes rapportent qu’ils auraient ramené avec eux à Carthage la Menora du Temple de Salomon.
Étant donné que les Vandales étaient adeptes de l’arianisme, doctrine qui refusait de reconnaître la divinité du Christ, ils devinrent la cible des Byzantins qui reprirent Carthage en 529. Cette période fut probablement l’ère de l’apogée de l’Empire byzantin : l’Empereur Justinien tenta de reconstituer l’Empire romain en agrandissant son empire à l’ouest de la Méditerranée.
L’historien contemporain Procope de Césarée qui a publié un ouvrage sur la guerre des Vandales a laissé un témoignage écrit intéressant (Histoire des guerres, livre IV, chapitre 9:6-9) « Au nombre de ceux-là (les objets du butin ramené par Bélisaire) se trouvaient les trésors des Juifs que Titus fils de Vespasien de concert avec d’autres avaient ramenés à Rome après la prise de Jérusalem. Et l’un des Juifs, voyant cela, approcha l’une des personnes de l’entourage de l’empereur et lui dit : «Je pense qu’il n’est pas approprié de transporter ces trésors dans le palais de Byzance. En vérité il n’est pas possible pour ceux-ci de se trouver ailleurs que dans le lieu où le roi Salomon, le roi des Juifs les y a placés par le passé. Car c’est à cause d’eux que Genséric avait capturé le palais des Romains et que maintenant l’armée romaine (byzantine) a fait captif les Vandales. » Lorsque cela fut parvenu aux oreilles de l’empereur (Justinien), il en fut effrayé et retourna le tout dans les sanctuaires des chrétiens à Jérusalem. »
Ainsi, craignant que Constantinople ne subisse le sort de Jérusalem, de Rome et de Carthage qui avaient connu des désastres, l’empereur Justinien décida d’envoyer ces objets sacrés à Jérusalem. Il y fit construire une des plus grandes églises de l’antiquité : la Néa Ekklesia ou Theotokos ou encore Nea qui est décrite par Procope dans son ouvrage De Aedificiis. Cette construction colossale – à nulle autre comparable selon Procope – a pu être conçue pour abriter un objet de valeur tel que la Ménora. Bâtie en 543 durant le règne de l’empereur Justinien, cette église figurait sur la mosaïque du VIe siècle trouvée à Madaba en Jordanie.
Dans la mosaïque de Madaba, on distingue clairement le Cardo, ensemble de deux allées bordées de colonnes qui débutent à la porte de Damas et traversent Jérusalem en direction du mont Sion. La Nea est située le long de l’allée Est un peu au sud du mont du Temple. Son entrée est dirigée vers l’ouest et fait face au mont Sion. On peut se promener au Cardo aujourd’hui et également voir la base des murs de la Nea exhumées par l’archéologue Nachman Avigad. Tout récemment, ce dernier y a découvert une inscription en langue grecque : « Dédié au très pieux empereur romain Flavius Justinien et au prêtre abbé le plus aimant de Dieu Constantin pour l’érection de l’édifice dans lequel cette mosaïque est placée durant la 14e indiction (quatorzième année de l’indiction de 15 ans). » Une inscription similaire a été trouvée près de la porte de Damas.
Le sanctuaire de la Nea a été détruit par les Perses sassanides en 614 et la dynastie arabe des Omeyyades a utilisé ses ruines comme pierres de construction. Lors de la destruction de Jérusalem par les Perses, la relique de la Croix fut ôtée du Saint-Sépulcre et emportée à leur capitale Ctésiphon. Elle fut ramenée à Jérusalem en 628 au temps de l’empereur byzantin Héraclius. Toutefois, les écrits chrétiens de cette époque ne font pas mention de la Ménora.
Il y a de faibles chances que la Ménora ait quitté les lieux durant l’invasion perse ou même durant la conquête arabe. Il devient cependant utile de continuer les fouilles de la Nea, ou encore continuer les recherches dans les documents qui évoquent l’invasion perse sassanide dans la première moitié du VIIe siècle. Durant la période d’hégémonie perse, la souveraineté sur Jérusalem avait été confiée pendant trois ans aux Juifs alliés des Perses. La résidence à Jérusalem avait été interdite aux Juifs pendant 400 ans par les autorités byzantines.
De fait, il est possible que la Ménora ait été récupérée par les Juifs à cette époque, car certains récits du VIIe siècle tels Otot Hamashiah,et Séfér Zérubabel (John C. Reeves, Trajectories in Near Eastern Apocalyptic, A Postrabbinic Jewish Apocalypse Reader, Brill, 2006) conjuguent le messianisme avec la restitution des objets de culte du Temple. Par ailleurs le motif de la Ménora apparaît dans des linteaux du VIIe siècle et un médaillon frappé à l’effigie de la Ménora date de cette époque.
Cela pourrait constituer un point de départ pour la recherche de la Menora du Temple de Salomon.
La Ménora figure dans les armoiries de l’État d’Israël entourée de deux rameaux d’olivier (cf. Zacharie 4-2 à 4-3). Beaucoup de croyants espèrent qu’elle devienne un symbole de paix universel dans les temps futurs comme le présageait Isaïe pour la ville de Jérusalem (60-3) : « Et les peuples marcheront à ta lumière, les rois à l’éclat de ton aurore. »