Nous vengerons nos pères de Florence Johsua, sur Public Sénat, retrace la jeunesse des enfants de rescapés de la Shoah qui se sont engagés dans les mouvements d’extrême gauche des années 1960.
Nés parmi les survivants et leurs fantômes, que faire de cet héritage dans la France des Trente Glorieuses ? Hélène Feldhandler ouvre le film en évoquant la colère qui les habite et le rêve d’une réparation aux atrocités infligées à son père.
Comment croire en la transformation du monde en gardant le souvenir de la destruction
C’est une histoire de familles qui en parlaient ou qui n’en parlaient pas mais toutes ont recommencé à vivre et ont élevé des enfants aux aguets face au retour du fascisme. Les témoins de Florence Johsua se connaissent depuis l’enfance, biberonnés dans les camps du Comité Central de l’Enfance où ils trouvent une joyeuse vie collective estivale mais aussi la politique au vert et au son des chants des révoltes des quatre coins du monde socialiste. Ils y apprennent à espérer et à croire en leur pouvoir de transformation du monde malgré le souvenir de la destruction. C’est l’histoire d’une génération qui avait érigé en rock stars les résistants de l’Affiche Rouge, symbole de la part prise par les étrangers à la Résistance à l’occupation nazie.
Un engagement militant pour se débarrasser de l’ancien monde
Cet engagement commence souvent au lycée, contre la guerre en Algérie, ou plus tard, contre les partisans d’une Algérie française rassemblés dans les groupes Renouveau ou Occident, dans les manifestations, ou tout simplement sur le trottoir quand sonne la fin des cours. Parmi ce petit groupe d’enfants de la guerre, ils sont nombreux à rejoindre la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) fondée par Alain Krivine, puis la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant pour certains de poursuivre leur militantisme au sein des comités Vietnam, avec la décolonisation et la Guerre froide en toile de fond. Une joyeuse et bouillonnante suractivité militante avec une seule idée en tête : changer le monde pour se débarrasser de l’ancien qui avait écrit l’histoire de leurs parents, mais aussi avec un certain talent pour les démonstrations publiques au cours desquelles s’exprime leur détermination à accélérer la venue de lendemains qui devaient chanter. Parce que, dans ces années 1960 et 1970, le marxisme sans Staline leur donne des ailes.
Habiter le monde à travers l’action collective
S’engager et combattre, contrairement à ceux qui n’en avaient pas eu la liberté face à la destruction nazie, mais aussi afin de faire le deuil impossible des déportés qui ne sont pas revenus. Pour que la tragédie familiale ne s’échoue pas dans un bain de sang, ni ne reste à l’état de blessure intime. C’est dans l’action collective, avec leurs semblables et bien d’autres militants, que ces enfants de la Shoah ont trouvé le moyen d’habiter le monde et de tenter d’en prendre soin.
Pour voir le film en entier : Nous vengerons nos pères de Florence Johsua, sur la plateforme de Public Sénat.