Brillante philosophe et scénariste, la romancière engagée s’interroge depuis 20 ans sur les valeurs et le sens de la société. Dans son dernier livre, « L’envie du croire, journal d’une époque sans foi », paru chez Albin Michel, Eliette Abécassis s’inquiète de l’invidualisme qui nous gagne et nous isole, à cause du GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon.
« Nous vivons dans un monde dominé par la science et la technique, qui nous font faire des progrès immenses, mais qui ne produisent pas de sens. Je pense que l’on ne peut pas vivre sans spiritualité. Nous avons tous envie d’y croire, en soi, en l’autre, en l’humanité, malgré tout. »
Nous avons profité de son départ en Israël pour y donner une conférence pour lui poser quelques questions sur ce pays qu’elle connaît presque aussi bien que la France :
Entre vous et Israël c’est une histoire d’amour qui dure depuis .. ?
Depuis mon adolescence, où j’ai été travailler dans un kibboutz, et je suis tombée amoureuse de ce pays jeune, beau, plein d’énergie, le pays de mes ancêtres et aussi un formidable melting pot où je découvrais que les russes, les américains, les européens, les africains pouvaient vivre ensemble. A Jérusalem, que ce soit dans la nouvelle ville ou dans l’ancienne, je me sens bien, apaisée, comme arrivée. C’est une ville particulière où la lumière est dorée. A Tel Aviv, c’est plutôt la sensation d’être dans une ville folle, qui ne s’arrête jamais, où les bars sont remplis de monde jusqu’à 4 heures du matin, et pourtant les gens travaillent tôt. Une sorte de Californie où ils vont sur la plage après le travail, pour jouer aux Matkot, des raquettes que je n’ai vues qu’en Israël.
Vous y retournez souvent, toujours avec la même envie ..
J’y retourne tous les ans, avec la même sensation: une énergie débordante, une envie de vivre, de faire la fête, une envie d’y croire, pour reprendre le titre de mon livre. Et surtout, un pays rempli de sens, car rempli de passé, ce passé qui nous construit et nous donne notre identité. Les séries israéliennes comme Hatoufim, Fauda, ou Shtisel montrent une créativité débordante à partir d’une vie pourtant difficile dans ce pays qui est en guerre depuis ses débuts, et qu’on ne laisse pas en paix.
C’est un pays qui m’inspire, car il est traversé d’histoires. Tout le monde a une histoire à raconter, tout le monde a connu l’exil, un exil difficile et parfois fécond lorsque l’on construit un pays, et que l’on rapporte de ces pays des étincelles de sainteté.
J’adore Tel Aviv et j’adore Jérusalem, j’adore le contraste. Tel Aviv c’est la ville folle, la ville de la fête – elle est à raison surnommée la ville qui ne dort jamais-, Jérusalem c’est une ville de prières, une ville monastère, austère et ardente. J’aime aller d’un univers à un autre, je me retrouve dans chacune. C’est un pays qui a tellement de facettes. Quand on le découvre en y allant, on se rend compte que la désinformation est délétère, Israël est souvent montré de façon caricaturale et antisémite par les médias, alors que c’est un pays tellement attachant qu’on en sort à jamais transformé.
Pouvez vous nous donner 10 raisons de tomber amoureux de Tel Aviv ?
L’Histoire, la fête, l’architecture, la mer, la plage et le soleil, les bars et les boîtes de nuit, les restaurants et la gastronomie, les israéliens, la musique, la culture.. Et notamment :
Jaffa et la vieille ville
Pittoresque, maritime, un vrai petit écrin restauré avec soin, où juifs et arabes cohabitent ! La nuit c’est encore plus magique. Une adresse kasher incontournable Dr Shakshuka, avec ses vieilles casseroles suspendues au plafond, ses viandes à la broche et sa citronnade !
Le marché Carmel, le souk alimentaire de Tel-Aviv
J’aime beaucoup m’y promener et acheter mes épices, que je rapporte en France, dont certaines ont une saveur exceptionnelle et d’autres comme le Sumac sont spécifiques à la région. On peut aussi y déguster des assiettes de houmous exquises et une excellente Chakchouka ( œufs à la tomate et aux merguez) dans les nombreux petits restaurants et bars qui sont à l’intérieur du souk ou juste à l’extérieur.
Les bars
Des bars,il y en a à l’infini. Il faut aller rue Lilienblum, et aussi sur le nouveau port. Des bars, des boites de nuit, ou les deux en même temps, où l’on danse sur les tables comme Le Speakeasy et le Jimmywho, 24 bd Rothschild, le Buxa, 31 bd Rotchchild, ou le Lima, 42 rue Lilienblum. ou encore le Sputnik, 122 rue Allenby.
La plage, 14 km, le Rio de la Méditerranée !
Chacun a la sienne. Moi c’est plutôt Gordon, c’est la plage des Français. J’adore y prendre une pastèque Feta.
Les restaurants .. Toutes les cuisines du monde, pas de frontières.
La nouvelle gastronomie israélienne a conquis le monde, avec le chef Yoram Ottolenghi et à Paris, Julien Sebbag qui vient d’ouvrir son restaurant, Créatures aux Galeries Lafayette. A Tel Aviv : Mashya, Sabih Frishman, Shakshukia, Mapu ( au Sarona), Kubiza et le mythique et délicieux Miznon (23 shlomo Ibn Gabirol).
Les hôtels
Le Montefiore, un boutique hôtel qui a le charme des années 30. Et Le Norman avec sa piscine sur le rooftop et sa vue magique sur Tel Aviv.
La ville blanche
Classée site du patrimoine mondial de l’humanité. Cela prend un peu de temps pour l’aimer, sa beauté de capitale Bauhaus ( courant archi qui fête ses 100 ans cette année ) ne se donne pas facilement. Mais une fois la surprise passée, le charme opère. A visiter le bd Rothschild et ses kiosques ( des sortes de cabanes ouvertes avec tables et tabourets où l’on sirote un café, on lit, on grignote, on bavarde..). J’aime me promener dans le nord. On peut aussi visiter l’université de Tel Aviv, qui est une vraie ville, avec trois piscines, des départements qui sont les meilleurs en monde dans bien des domaines.