Un surveillant du lycée Ozar-Hatorah de Créteil a été mis en examen ce vendredi. Il est suspecté d’être à l’origine de la fuite du sujet de mathématique du bac.
La fuite est identifiée, mais l’affaire n’est pas forcément terminée. Après une enquête expresse, plus d’une vingtaine d’interpellations en région parisienne et à Marseille (Bouches-du-Rhône), les enquêteurs de brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) sont convaincus de savoir comment des sujets du baccalauréat ont fuité avant l’épreuve.
Ce vendredi, un surveillant du lycée privé Ozar-Hatorah de Créteil (Val-de-Marne) a été mis en examen pour « complicité de fraude dans un examen », a-t-on appris auprès de son avocat et du parquet de Paris. Sa compagne a été mise en examen pour le même motif. Deux lycéens soupçonnés d’avoir acheté les sujets ont eux aussi été présentés à un juge d’instruction et mis en examen. D’autres lycéens de cette institution, confient des sources concordantes, avaient déjà été entendus et remis en liberté ces derniers jours.
Placé en garde à vue jeudi et entendu de 20 heures jusqu’à 5 heures du matin vendredi, F., surveillant de 37 ans, a reconnu avoir confié l’intitulé d’un sujet de géographie à un élève. Quelques jours plus tard, il a photographié l’épreuve de mathématique avant de la transmettre à un ou deux élèves du lycée Ozar-Hatorah. Le cliché, largement diffusé ensuite, avait été pris au sein du lycée Ozar-Hatorah – qui accueillait des épreuves du bac – où les sujets étaient censés être gardés dans un coffre jusqu’au jour J.
Des questions en suspens
Le surveillant a-t-il pu accéder au coffre, les sujets ont-ils été déplacés prématurément ? De nombreuses questions qui restent en suspens. Une autre concerne le mobile. Selon nos informations, F. a en effet nié toute velléité commerciale. Il a juste admis avoir reçu un peu d’argent en guise de remerciements.
Alors si l’argent n’est pas le nerf de la guerre, comment expliquer cette fuite ? « Mon client a été pris en tenaille entre la situation d’un établissement privé qui a besoin de résultats, et des élèves avec qui il cultive une proximité au quotidien et qu’il peut facilement contacter », confie Me Samuel Habib, avocat du surveillant. Durant sa garde à vue, F. aurait, selon nos informations, glissé aux enquêteurs qu’il s’était senti acculé par sa hiérarchie.
Pour perpétuer les habituels très bons résultats de l’établissement de Créteil – qui frôle ou atteint tous les ans les 100 % de réussite, à l’exception notable de l’année 2018 – son employeur lui aurait fait comprendre, sans parler frontalement de triche, qu’il serait bon de donner un coup de main à quelques élèves en difficulté. « Mon client n’est mis en examen que pour la complicité, c’est notable, glisse Me Habib. Les enquêteurs vont désormais pouvoir travailler en toute sérénité sur les suites de cette affaire. »
Le sujet très vite partagé et repartagé
« C’est toute la complexité de ces lycées privés qui organisent le bac et fondent leur réputation sur les résultats, glisse un proche du dossier. Jusqu’où vont-ils pour aider leurs élèves ? » Contactée, l’institution Oraz-Hatorah n’a pas donné suite à nos multiples sollicitations.
Vendredi 21 juin, après l’épreuve de mathématique, F. prend conscience de l’ampleur de la fraude à laquelle il vient de participer. Car les lycéens à qui il a fourni les sujets ont décidé de les partager. À des amis d’abord. De fil en aiguille, il se retrouve sur des messageries privées, des forums de lycéens… Un bachelier parisien perquisitionné ces derniers jours assure ainsi au Parisien que « tous les lycéens du 16e avaient eu connaissance de ce sujet le matin de l’épreuve. La diffusion a été très rapide ».