Avec l’histoire de sa famille juive qui aurait compté 22 victimes pendant la Shoah, Marie Sophie Hingst, une blogueuse et « historienne » allemande s’est fait connaître pour son travail : fake et escroquerie!
« Le travail de Yad Vashem est de rassembler en Israël des documents sur tous les Juifs qui ont perdu leur vie, qui se sont battus et se sont révoltés contre l’ennemi nazi et ses complices. Leurs noms et leurs souvenirs devraient être perpétués (…) », peut-on lire à Yad Vashem, le monument israélien dédié aux victimes de la Shoah.
Le formulaire se trouve facilement et il suffit de renseigner le nom, le lieu de résidence et l’histoire de la personne assassinée par les nazis pour que sa mémoire soit sanctifiée à Yad Vashem.
Le 8 septembre 2013, Marie Sophie Hingst remplit un formulaire, fruit de son imagination délirante. Ainsi, cette historienne, titulaire d’un doctorat allemand et résidant en Irlande, a raconté que 22 membres de sa famille ont perdu la vie pendant la Shoah, et a inventé de toutes pièces cette histoire de grand-mère et arrière-grand-mère portant le nom juif entre tous de Cohen.
En fait, elle est fille de pasteur
Der Spiegel, après une enquête dans les archives de la ville de Stralsund, a découvert et rapporté que Marie Sophie Hingst vient d’une famille protestante. Son grand-père n’a pas été prisonnier au camp de concentration d’Auschwitz, comme elle le prétend, mais juste un prêtre protestant, jamais inquiété, pas plus que le reste de sa famille, par les bourreaux nazis.
Pour toute cette famille, aucune trace dans les archives du mémorial d’ Auschwitz, ni dans aucune autre archive de recensement des victimes d’Hitler. Et cela n’a pas empêché Marie Sophie Hingst de tenir un blog sur son histoire familiale (fermé aujourd’hui) qui a compté près de 240 000 lecteurs réguliers.
Un désir effréné d’attention comme motivation?
Interrogée par Der Spiegel, elle n’a rien trouvé de mieux à évoquer comme raison qu’elle avait connu une année difficile. Elle ne connaissait presque personne et était isolée. À cette époque, quand elle a commencé à tenir son blog, c’était pour elle une « sorte de patrie de substitution » et se faire passer pour une prétendue descendante des victimes de la Shoah la rendait plus intéressante que « les autres Allemands ».
Pour son « travail », pour son « témoignage » de la souffrance de ses prétendus ancêtres juifs, Hingst a reçu de nombreux prix. En 2017, elle a été proclamée « blogueuse d’or de l’année« . L’année suivante, le «Financial Times» lui a décerné le prix «Future of Europe». Et à cette occasion, elle a parlé de sa « famille juive » et a comparé son sort avec celui des réfugiés aujourd’hui bloqués sur les côtes européennes. Et bien sur elle a adoré les applaudissements suivant ces déclarations : tout pour plaire!!
« La seule preuve de l’existence d’une victime de la Shoah »
Le porte-parole de Yad Vashem, a déclaré à l’agence de presse DPA que le formulaire rempli par Hingst avait été remis à d’autres experts. Il a ajouté que « les formulaires remplis sont souvent la seule preuve de l’existence des victimes de l’Holocauste ». Une fois rendus, ils sont vérifiés pour leurs informations de base telles que les indications biographiques et géographiques, a-t-il déclaré. Le porte-parole a admis: « Ce processus n’est pas sûr à cent pour cent (…) ».
Un défense étonnante
Pour justifier son escroquerie patentée, l’avocat de Hingst a déclaré que les textes de son blog « nécessitaient une liberté artistique« . « Il s’agit de littérature, pas de journalisme ou d’historiographie. » Dans cette mesure, elle n’a « à aucun moment » répandu « de fake news » avec les textes contenant des données sur ses antécédents familiaux. Toutefois, comme l’avocat l’a dit, elle a remis à Yad Vashem une « liste de 22 personnes appartenant à la descendance de sa grand-mère », mais elle ne l’a pas vérifiée.
Marie Sophie Hingst, n’a pas commis d’erreur au sens juridique du terme. Mais elle a trompé le public, et surtout, a fait preuve d’un manque de respect effarant pour la mémoire des victimes de la Shoah.
Line Tubiana