Les réalisateurs d’ « Intouchables » font la clôture du 72e Festival de Cannes avec leur nouveau long-métrage « Hors normes ». Le film met en scène Vincent Cassel et Reda Kateb dans les rôles de deux créateurs d’associations venant en aide aux autistes et aux jeunes en difficulté.
Un film de clôture signé Olivier Nakache et Eric Toledano avait fait espérer à certains festivaliers que la 72e édition se terminerait sur une comédie. Nous les avions pour voisins de rangée dans la salle de projection. Ils en ont été pour leur frais. Hors normes n’est ni Le Sens de la fête ni Nos jours heureux. Car cette fois, les deux cinéastes ont cessé de plaisanter pour traiter d’un sujet qui les occupe depuis plus de vingt ans.
Un sujet qui leur est venu par la rencontre, en 1994, de Stéphane Benhamou, créateur de l’association Le Silence des Justes, spécialisée dans l’accueil des enfants et adolescents autistes. Puis par celle de Daoud Tatou, directeur de l’association Le Relais IDF qui s’occupait, elle aussi, de jeunes autistes et travaillait à la réinsertion sociale et professionnelle des jeunes de quartiers difficiles.
Olivier Nakache et Eric Toledano n’ont plus jamais perdu de vue ces deux hommes. Ni l’idée de s’en inspirer pour faire un film. Il y eut une première étape à ce projet, Intouchables, sorti en 2012, qui témoignait déjà du handicap et comment deux solitudes unies pouvaient abattre des montagnes. Puis son aboutissement, Hors normes, qui va plus loin, fait moins rire mais s’impose sans lourdeur sur un thème qui comporte tous les dangers. Les deux cinéastes les contournent par une écriture sèche, sans mièvrerie ni complaisance, un ton juste auquel répond une direction d’acteurs impeccable.
Rencontres improbables
Stéphane Benhamou et Daoud Tatou se retrouvent donc dans les personnages respectifs de Bruno (Vincent Cassel) et Malik (Reda Kateb) dont la vie est entièrement absorbée par leur travail : l’accueil de jeunes autistes et la réinsertion d’adolescents en difficulté. Les seconds étant formés pour devenir les référents des premiers, il n’est pas toujours aisé de canaliser la violence qui anime, parfois en des courants contraires, cette petite communauté en marge de toutes les institutions.
Mais de ces rencontres improbables (comme dans Intouchables) jaillissent des éclairs de complicité rare, des échanges qui extraient les uns de leur enfermement, les autres de leur sentiment d’inutilité. Malik apprend avec fermeté à ses jeunes en difficulté à respecter les horaires, à rédiger des rapports dans un français correct, à devenir responsables des autistes et d’eux-mêmes. Bruno s’épuise à suivre Joseph (Benjamin Lesieur), autiste qu’il tente d’insérer dans une vie professionnelle, mais également tous les autistes profonds qu’il héberge, en s’affranchissant lui-même des règles et normes officielles. Ce qui lui vaudra une inspection des affaires sociales dont les conclusions risquent d’entraîner la fermeture de son association.
Dans Hors normes, Olivier Nakache et Eric Toledano ont mêlé aux acteurs de vrais référents et de vrais autistes. Ils ont aussi réuni, pour coller au réel, les diverses origines et religions qui se côtoient dans ces associations. Ils en tirent parfois des scènes joyeuses. Ils montrent surtout, que ce qui pose parfois question n’en pose pas dans ce cadre où la vulnérabilité menace tout le monde. Une fois dit tout cela, on pourrait penser que les cinéastes se sont laissés prendre par les bons sentiments. Il n’en est rien. Ce qui se dégage de Hors normes, c’est au contraire une force et une énergie à toute épreuve qui retiennent les larmes et donnent envie de se battre.
Source lemonde et francetvinfo