Qui protège Soral? Qui craint de mettre en oeuvre la loi contre la contestation des crimes contre l’humanité? Le 15 avril dernier, Soral était condamné à un an de prison ferme pour contestation de la Shoah et le tribunal y ajoutait un mandat de dépôt.
On s’attendait donc à ce qu’il soit rapidement appréhendé et emprisonné, en conséquence du mandat de dépôt. Ce dernier est particulièrement justifié chez un multirécidiviste, déjà condamné à un an de prison ferme en janvier 2019. Il s’agissait alors de sanctionner ses propos suivants : « Entre le peuple juif et le reste de l’humanité, le combat ne peut être que génocidaire et total... » (voir ci-dessous pour ses différentes condamnations). Il a encore sévi récemment à propos des attentats dans les mosquées de Christchurch
Mais cela ne sera pas le cas tout de suite: le parquet de Paris à interjeté appel du mandat d’arrêt et refuse de l’exécuter, alors même que l’appel n’est pas suspensif.
Déjà lors du procès, le parquet avait réclamé seulement six mois de prison ferme. La 13e chambre du tribunal de grande instance de Paris avait doublé cette peine, en raison de la gravité de la contestation de l’existence de la Shoah.
A l’origine de cette décision de justice, la publication sur le site de Soral « Égalité et réconciliation, » en novembre 2017, de la plaidoirie de son avocat, Damien Viguier – également condamné, ce lundi, à 5 000 euros d’amende pour complicité –, dans une autre affaire datant d’avril 2016. Viguier est également un conférencier du groupe de Soral
Soral avait alors mis en ligne sur son site un dessin représentant une fausse « une » titrée « Chutzpah Hebdo » et illustrée par le visage de Charlie Chaplin posant une question, dans une bulle, « Shoah où t’es ? », en référence à la Une nauséabonde de Charlie Hebdo après les attentats de Bruxelles, « Papa où t’es ? » qui faisait référence au génocide des Tutsi et au chanteur Stromae.
« Propagande de guerre »
Le procureur de Paris, chef du Parquet, tente de justifier sa décision par l’argutie judiciaire suivante : « Alain Soral a été condamné pour une infraction prévue par l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse à la peine d’un an de prison par le tribunal correctionnel qui a décerné mandat d’arrêt à son encontre sur le fondement de l’article 465 du code de procédure pénale. L’article 465 vise expressément les délits de droit commun et les délits d’ordre militaire. Le mandat d’arrêt décerné étant dépourvu de base légale, je vous confirme que le parquet a interjeté appel de la décision sur le mandat d’arrêt (appel limité à la délivrance par le tribunal du mandat d’arrêt et ne concernant pas la peine d’un an de prison) »,
Or le procureur n’a pas à décider si une décision de justice doit être appliquée ou non, surtout quand il s’agit de contestation de crime contre l’humanité, selon la loi . Ce procureur semble réticent à l’idée de mettre en application cette loi de 1990 dite loi Gayssot qui pénalise la contestation de crimes contre l’humanité dont la Shoah. C’est une loi équivalente que demandent les associations arméniennes afin de combattre le négationnisme à propos du génocide de 1915.
Le négationnisme est mis en place par les génocidaires eux mêmes et constitue avec l’impunité une incitation à de nouveaux massacres. Le but des génocidaires, en tout temps et en tout lieu, ne consiste pas seulement à assassiner les vivants, mais aussi à nier à tout jamais leur existence.
C’est pour cette raison que les négationnismes sont consubstantiels aux génocides. En niant, il ne s’agit pas seulement d’une tentative faite par les assassins pour échapper aux conséquences de leurs crimes. Au même titre que les massacres physiques de masse, la négation est au service au service du but final : effacer de l’histoire et de l’humanité une partie des hommes et des femmes qui la constituent.
Le communiqué dénonçant cette décision
🔴 [COMMUNIQUÉ]
Le mandat d’arrêt contre Soral doit être exécuté d’urgence @uejf @SOS_Racisme @MRAP_Officiel pic.twitter.com/oVykSN69TZ
— LICRA (@_LICRA_) 26 avril 2019
Dans un communiqué commun SOS Racisme, LICRA, MRAP, J’Accuse, UEJF déclarent à juste titre :
« Le mandat d’arrêt contre Alain Soral doit être exécuté d’urgence !
Les associations antiracistes demandent de toute urgence au Procureur de la République de mettre à exécution le mandat d’arrêt décerné contre Alain SORAL pour contestation de crime contre l’humanité le 15 avril 2019.
Depuis 10 jours, l’antisémite Alain SORAL est sous le coup d’un mandat d’arrêt par décision de la 13ème chambre correctionnelle du TGI de Paris à la suite de sa condamnation pour contestation de crimes contre l’Humanité.
A ce jour, la justice n’a toujours pas exécuté la décision.
Pire encore, nous avons appris que le Parquet de Paris avait décidé de faire appel de ce mandat d’arrêt au motif qu’il ne respecterait pas les dispositions du code de procédure pénale sur le mandat d’arrêt.
Cette décision d’appel est un scandale inédit et renvoie à nos concitoyens l’idée que la condamnation de l’antisémitisme et du racisme en France n’est jamais appliquée dans les faits.
Les associations antiracistes demandent de toute urgence au Procureur de la République de mettre à exécution le mandat d’arrêt décerné contre #Soral pour contestation de #crime contre l’humanité le 15 avril 2019.@uejf @MRAP_Officiel J’Accuse @_LICRA_
👉 https://t.co/AO3I4g3Us9 pic.twitter.com/20a8MIdrpz— SOS Racisme (@SOS_Racisme) 26 avril 2019
Ce d’autant que seuls les délits politiques sont exclus des dispositions relatives au mandat d’arrêt. La contestation de crime contre l’humanité n’est et ne pourra jamais être considérée comme un délit politique.
Nous demandons que soit mis fin à ce double scandale qui voit une décision de justice demeurée inappliquée et même contestée par l’autorité de poursuite qui se retrouve à défendre les intérêts de SORAL plutôt que la société.
Cet appel n’étant pas suspensif, nous demandons l’exécution immédiate de la décision de justice rendue contre Alain SORAL et le désistement de l’appel interjeté par le Parquet pour des raisons politiques.
Alain SORAL tiendra le 4 mai au vu et au su de tout le monde une conférence publique à Mulhouse. Nous demandons au Procureur de la République de Mulhouse de faire procéder à l’arrestation d’Alain SORAL conformément au jugement et à la Loi. »