Une série israélienne en compétition, « Just for Today », une autre dans le panorama international, « Asylum City ». L’an dernier le grand prix du jury avait récompensé « On the Spectrum ». Depuis sa création le festival Séries Mania soutient les séries israéliennes.
En l’espace d’une décennie, la série israélienne a conquis le monde. Peu s’exportent telles quelles et elles font plutôt l’objet de remakes, mais les choses évoluent. Ainsi Fauda, série autour de l’unité de forces spéciales de l’armée de défense d’Israël dont les membres sont spécifiquement formés à se fondre dans la population arabe a été diffusée dans sa version originale, en hébreu, sur Netflix et a fait un carton.
Autour de Benoît Lagane pour en discuter : Nir Bergman et Eltan Tzur, respectivement créateurs de Just for Today et Asylum City et la directrice de Séries Mania, Laurence Herzberg qui en connait un rayon en la matière. Si les séries israéliennes ont fait une telle percée dans notre pays c’est aussi grâce à elle.
Laurence Herzberg : « Ce qui nous a poussé à essayer de connaitre la créativité israélienne en matière de séries, c’est que nous connaissions déjà la créativité israélienne en matière de cinéma. Quand on a créé Séries Mania, je ne connaissais pas du tout les séries israéliennes. J’ai plongé dedans et c’est comme ça que dès la première année on a fait venir BeTipul (En Analyse), Arab Labor et qu’on a continué. »
Betipul, Week 3, episode 1 from Ori Sivan on Vimeo.
Laurence Herzberg : « C’est assez impressionnant de voir que les Israéliens ont compris ce que devait être une série télévisée. Il n’y a pas de formule, mais ils arrivent à raconter des histoires très personnelles. Les personnages sont complexes. Et en même temps, dans ce pays, depuis qu’il est créé, vous ne pouvez pas oublier le backgroundpolitique. Ils ont complètement compris comment on créait ce langage, en partant des drames intérieurs d’un personnage et en le mettant tout de suite dans une situation qui le dépasse. Et c’est ce double niveau d’écriture qui fait le succès des séries israéliennes. Ce qui est très fort c’est qu’elles sont un succès international. Et ce malgré des budgets minuscules. Le budget d’une série entière en Israël est inférieur au budget d’un épisode en France »
De nombreuses séries israéliennes ont été adaptées aux Etats-Unis. Quelques-uns des très grands succès de ces dernières années sont à l’origine des séries israéliennes, l’exemple le plus spectaculaire étant Homeland.
Eltan Tzur : « Ça fait mal quand on voit qu’on vous prend votre série, qu’on fait des changements. Il y a quelques années, j’ai réalisé une série satirique. En Angleterre, ils ont fait un pilote. Ça me faisait un peu bizarre de vendre une série en Angleterre. C’est comme si je vendais des crèmes glacées aux esquimaux. Ils ne voulaient pas qu’on intervienne. Ils ont donc fait un pilote, mais qui ratait complètement son but. Ça m’a pris un peu de temps à surmonter cette douleur. Homeland c’est un excellent exemple. Ils ont rendu hommage à l’original. Pour d’autres séries, ce n’est pas tout à fait le cas. »
Laurence Herzberg : « Je suis assez sévère sur les remakes américains des séries israéliennes. Je vais prendre l’exemple de Homeland. La force de Hatufim, (Titre original de Homeland), c’est ce qui fait d’ailleurs la spécificité des séries israéliennes, c’est cette tension permanente entre les drames intérieurs du personnage et le reste de la société et ça c’est très bien traduit dans Hatufim. Il n’arrive plus à faire l’amour avec sa femme, il ne connait pas son fils adolescent parce qu’elle était enceinte quand il est parti. Dans Homeland, il rentre et le lendemain, il est en train de faire un barbecue avec ses copains.
C’est pour ça que je pense, pour les Israéliens, il y a un intérêt à venir plus travailler avec les Européens. C’est pour ça aussi qu’il y a une présence forte des Israéliens à Séries Mania parce que les chaines européennes ont compris qu’il fallait travailler avec eux et non pas s’approprier leur travail. »
Nir Bergman (qui présente Just for Today en compétition, est le créateur, de Be Tipul, série adaptée dans une quinzaine de pays et notamment aux Etats Unis sous le titre de In Treatment, avec Gabriel Byrne, Dianne Wiest et Amy Ryan) : « Je ne peux pas dire que j’ai été très traumatisé par le remake de BeTipul, parce que je n’ai vu aucun épisode du remake. C’était mon traitement personnel qui était à l’écran. Toutes les sessions que j’avais avec mon psy, elles sont à l’écran. Et je n’ai eu aucun crédit sur HBO« .