L’extension prévue du musée sur l’un des anciens camps satellites de Buchenwald a été qualifiée d’« irrespectueuse et oublieuse du passé ». Et donc annulée.
Devenu trop petit pour accueillir des visiteurs de plus en plus nombreux, le Musée de la saucisse de Holzhausen, un village de Thuringe, dans l’est de l’Allemagne, a décidé de déménager. Après cinq mois passés à prospecter les environs, ses responsables pensaient avoir trouvé l’emplacement idéal, à une soixantaine de kilomètres de là, dans la commune de Mühlhausen. Ils ont finalement fait machine arrière, vendredi 1er février, devant le tollé provoqué, deux jours plus tôt, par l’annonce de leur choix : à cette même adresse se trouvait, pendant la seconde guerre mondiale, l’un des nombreux camps satellites du complexe concentrationnaire de Buchenwald.
En apprenant qu’un musée de la saucisse souhaitait s’installer à l’endroit de l’ancien camp « Martha II », où quelque 700 femmes juives originaires de Hongrie et de Pologne furent internées entre septembre 1944 et février 1945 pour travailler dans une usine d’armement voisine, le président du Conseil central des juifs d’Allemagne, Josef Schuster, a fait part de son indignation : « Je conçois évidemment que l’on veuille créer des attractions touristiques, mais une décision comme celle-là, aussi irrespectueuse et oublieuse du passé, est, à mes yeux, totalement incompréhensible », a-t-il déclaré à l’agence DPA.
Recherche d’un nouveau lieu
Dans un communiqué commun, les trois membres de la coalition au pouvoir dans le Land de Thuringe, le Parti social-démocrate, les Verts et le parti de gauche radicale Die Linke, ont également condamné l’initiative : « Il est de notre responsabilité que de tels lieux soient consacrés au souvenir de l’extermination des juifs d’Allemagne et à la lutte contre l’antisémitisme d’aujourd’hui. La construction d’un musée de la saucisse est totalement contradictoire avec cet objectif. »
Devant cette bronca, l’Association des amis de la saucisse de Thuringe, qui gère le musée depuis son ouverture à Holzhausen, en 2006, a donc annoncé qu’elle renonçait à déménager à l’adresse qu’elle avait trouvée à Mühlhausen, un vaste terrain vendu par l’Etat, en 2008, à un investisseur privé désireux d’en faire un centre touristique à la gloire de la saucisse, avec hôtel, théâtre et restaurant…
Présentant leurs « excuses à ceux qui ont vu dans le projet une volonté de banaliser les crimes du nazisme », les responsables du musée ont toutefois assuré n’avoir découvert l’histoire du lieu que le jour de l’annonce du déménagement. Dans la foulée, le ministre de la culture du Land de Thuringe et le maire de Mühlhausen ont annoncé qu’ils allaient « chercher un autre endroit » pour accueillir ce musée qui promet d’expliquer à ses 50 000 visiteurs annuels « tout ce qu’il faut savoir sur la saucisse en général et sur celle de Thuringe en particulier ».