Environ 150 élèves du lycée Châtelet à Douai (Nord) ont rencontré lundi une rescapée des camps de la Seconde Guerre mondiale. Ginette Kolinka, 93 ans, a été déportée à Auschwitz en avril 1944.
Ginette Kolinka, 93 ans, raconte l’horreur pendant deux heures sans s’arrêter aux lycéens de Douai (Nord). Elle ne cache rien, du voyage en train de marchandises jusqu’au camp, de l’hygiène, des coups. Elle leur parle avec détail des odeurs, de celle des cheminées d’Auschwitz qu’elle a trouvé « spéciale » dès son arrivée et leur demande de fermer les yeux pour imaginer.
Un récit cru qui captive les lycéens
En avril 1944, Ginette a 19 ans. Cette Parisienne vient d’être déportée au camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz avec une partie de sa famille. Dans sa baraque, de plus anciennes déportées la mettent au courant. « Tous ceux qui étaient montés sur les camions, comme mon père et mon petit frère, parce qu’ils étaient fatigués, elles nous montrent la cheminée, la fumée » et disent » ‘ce que vous voyez là, c’est eux, ils ont été assassinés et ce sont leurs corps qui brûlent’ « .
Ginette vit de camp en camp jusqu’à sa libération en mai 1945 et son rapatriement sanitaire à Lyon. Un récit que les élèves de première du lycée Châtelet suivent sidérés. « Même si on nous raconte un peu [au lycée, ndlr], on ne sent pas les détails, cette intensité dans la douleur et dans la violence. C’est la réalité, ce n’est pas comme un bouquin », réagit Lisa, 16 ans.
Parler pour éviter l’oubli
D’après un sondage Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès, publié en décembre, 21 % des français de 18 à 24 ans n’ont jamais entendu parler du génocide des Juifs.
Ginette Kolinka s’est décidée à partager son expérience après des années de silence, au début poussée par le président de l’Union des déportés d’Auschwitz. « Je ne voulais pas en parler pour ne pas casser les pieds aux gens ».
Mais elle n’est pas certaine que son témoignage puisse faire des miracles et changer toutes les mentalités. « Je ne crois pas tellement au résultat. Quand je vois le racisme et l’antisémitisme toujours là, je me dis que ça ne sert pas », explique la survivante.
Il reste aujourd’hui une centaine de rescapés des camps en France. Une dizaine ont encore l’énergie de témoigner, souvent par vidéoconférence. Ginette Kolinka, qui fêtera ses 94 ans le 4 février prochain, est la seule à sillonner la France, cinq jours sur sept, et parfois même le week-end.