D’abord ce tweet du chef des Insoumis juste après les vœux d’Emmanuel Macron : ‘le président des riches a fait son rideau de fumée. Le partage des richesses, t’as compris Monsieur Macron’.
Le président des riches a fait son rideau de fumée. Le partage des richesses, t’as compris Monsieur Macron ? #VoeuxMacron
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 31 décembre 2018
A la lecture de ce tweet, on se demande comment un parlementaire, parmi les plus lettrés de l’Assemblée, peut produire une syntaxe aussi hasardeuse et sombrer dans une telle familiarité, forme de démagogie qui consiste à singer le style colère-brute des Gilets jaunes. Il prend là, comme François Ruffin, des accents quasi père Duchêne. Est-ce seulement un exercice lourdingue de récupération, une tentative désespérée de s’accrocher à un mouvement populaire dont il aurait rêvé d’être à l’origine ? Ou juste la fascination d’un amoureux de la grande Révolution, qui à la fin d’une longue vie politique, faite essentiellement de protestation mais au fond bien sage (ministre, sénateur, député), se trouve ébahi par des Gilets jaunes dans lesquels il voit, comme Bernadette voit la Vierge, des apparitions de sans-culottes et bonnets phrygiens ? La fascination domine…
La fascination, Jean-Luc Mélenchon la confesse d’ailleurs dans son dernier post de blog
Oui, il dit à propos d’Eric Drouet, le camionneur, amateur de tunning, leader Gilet jaunes, ‘je le regarde avec tant de fascination’.
Le nom d’abord. Drouet… comme Jean-Baptiste Drouet, ce maître des postes qui reconnut Louis XVI à Varennes… Drouet, Jean-Baptiste, robespierriste, élu député de la Convention en 1792, qui disait ‘soyons des brigands pour le salut du peuple’. ‘Ce n’est pas légal hurlaient les réactionnaires de l’époque’ écrit Mélenchon dans son blog… (entendez les partisans de Danton), puis fait un parallèle avec l’insurrection d’aujourd’hui… J’ouvre les guillemets :’l’esclavage c’était légal ! l’ISF c’est légal, les privilèges fiscaux c’est légal, l’usage du glyphosate c’est légal ; s’est-on jamais débarrassé de la cruauté d’un ordre légal que par la lutte’.
La fascination égare Mélenchon… ce fatras de comparaison n’est là pas raison.
Si l’insurrection contre la tyrannie et l’oppression est une valeur révolutionnaire, qui a notamment conduit les vrais républicains à résister en 40, qui a donné la force aux syndicats et au peuple d’obtenir des avancées et d’élargir le champ de nos libertés par des mouvements sociaux et des victoires électorales… la geste insurrectionnelle, en elle-même, ne constitue pas par essence, et dans n’importe quelle circonstances, un acte forcément plus progressiste et plus juste que la marche normale d’institutions, même imparfaites mais démocratiques.
Quel rapport entre Jean-Baptiste Drouet – qui a participé à la chute de la monarchie, combattu pour une république autoritaire, qui fut d’ailleurs admiré aussi par Napoléon, c’est dire ! – et Éric Drouet, dont on ne sait rien des convictions hormis son amour pour les grosses cylindrées, sa détestation des taxes et sa défiance envers le pacte de Marrakech qui braderait la souveraineté de la France ?
Ce Drouet peut-il être raisonnablement le modèle du leader de la gauche ? Quel incroyable péché d’orgueil, à travers cette fascination pour le folklore révolutionnaire, à se croire en dictature, simplement parce qu’on a perdu les élections !
Jean-Luc Mélenchon semble esthétiquement fasciné par l’insurrection, en elle-même, plus que par le contenu réel de cette insurrection…
Après Chavez, Drouet décidément ce jean Luc un grand visionnaire