« Carmaggedon » : le fléau des embouteillages à Tel-Aviv, pire ville de l’OCDE

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L’utilisation de la voiture a bondi de 50% en une décennie, les routes israéliennes sont de loin les plus congestionnées de l’OCDE – et la situation ne fera que s’aggraver.

11 kilomètres à l’heure. C’est la vitesse moyenne aux entrées de Tel-Aviv aux heures de pointe, les matins et les fins d’après-midi. Inutile d’incriminer les travaux, qui ont déjà créé un tel foutoir dans la circulation qu’on a pris l’habitude de parler de « Carmaggedon« . Les travaux prendront fin, mais le problème est devenu inextricable :  plus d’un demi-million de voitures sont conduites dans la ville chaque jour.

Chaque jour, 700 000 voitures empruntent l’autoroute Ayalon (aka « route 20 ») qui traverse le Grand Tel Aviv. C’est une augmentation de 55% du trafic sur Ayalon depuis 2000, et la plupart des voitures empruntent bien sûr l’autoroute aux heures de pointe, ce qui entraîne un vrai cauchemar pour aller au travail et en revenir.

Certes, durant les dix dernières années, 1 555 km de nouvelles routes ont été construites. Dr. Moshe Givoni, responsable de l’unité de recherche sur les transports à l’Université de Tel Aviv, hausse les épaules : il ne croit pas en cette solution pour résoudre ce problème de congestion. Pour lui, au fur et à mesure que le réseau routier s’étend, la vente de voitures augmente, le stationnement devient plus compliqué, bref cela semble inextricable.

Selon l’OCDE, les routes israéliennes sont quatre fois plus encombrées au kilomètre que la moyenne. Et l’OCDE désigne le coupable : les transports en commun en Israël, ou plutôt le manque de transports en commun.

Alors que dans les pays de l’OCDE, la moyenne des déplacements en transports en commun est de 35%, en Israël, elle n’est que de 10%. Dans les grandes villes de l’OCDE, ce chiffre dépasse les 50%, alors qu’à Tel Aviv, seuls 18% des déplacements se font par les transports en commun.

En effet, les transports publics ont du mal à concurrencer la voiture en Israël: trop peu fréquents, lignes mal planifiées, connectivité entre trains et autobus problématique, et la plupart du temps, pas de voies dédiées. Résultat, les autobus ont tendance à rester bloqués comme tout le monde. En Israël, leur vitesse moyenne est de 16 km / h, contre 25 km / h ailleurs dans le monde.

Les dégâts qui en découlent

C’est toute l’économie israélienne qui pâtit de ces embouteillages permanents. Selon le ministère des Finances, les dégâts sur le PIB sont estimés à 25 milliards de shekels par an. Ce chiffre, qui comprend les heures de travail perdues, la pollution et l’amortissement de la voiture, devrait atteindre 40 milliards de shekels en 2030.

Selon les prévisions du ministère des Finances, l’augmentation de la taille du réseau routier en Israël est de 2,5% par an, tandis que le nombre de voitures augmente de 3,5% par an. Dans 15 ans, tout le monde passera 60 minutes supplémentaires par jour dans des embouteillages. Mais hélas,

Mais jusqu’ici rien ne bouge et on justifie cet immobilisme par des raisons stupides : les gens vont changer d’habitudes, ils trouveront d’autres moyens de se déplacer, le ministère des Finances calcule à tort les heures de travail perdues, puisque de nos jours, les gens téléphonent depuis la voiture (sic !!!).

Quelle est l’efficacité des transports en commun israéliens?

En 2015, le ministère des Transports a repris l’inspection de la qualité du service, après une interruption de deux ans. En tenant compte des retards (six minutes ou plus), des absences, des problèmes techniques avec les bus, etc., le ministère a estimé que le pire service est fourni par Dan (qui dessert la région métropolitaine de Tel Aviv). ), suivie de GB Tours, une toute petite entreprise basée à Nazareth.

Une autre statistique indicative de la qualité du service fournie par les différentes compagnies de bus est les amendes infligées à celles-ci (par le ministère des Transports) pour irrespect des horaires. Il convient de noter que les petites compagnies de bus privées souffrent plus qu’Egged et Dan, les deux géants qui ont une marge de manœuvre. Eshkol, une petite entreprise qui a remporté un appel d’offres l’année dernière pour fournir un service public à Petah Tikva, Ashdod et Yavneh, a été condamnée à une amende de 719 000 euros pour 2015, soit le montant le plus élevé de toutes les entreprises. Egged Ta’avura a été condamné à une amende de 558 000 euros pour retard à Netanyahu, Ashdod et le Grand Jérusalem; la société mère Egged a été condamnée à une amende de 438 000 euros. Dan est le pire fournisseur de services, selon les critères du ministère des Transports, mais n’a été condamné qu’à une amende de 195 000 l’année dernière.

Appelez ça un quartier…..

A l’étranger, les propriétaires d’une voiture n’hésitent pas prendre un taxi, ou à louer un véhicule pour un court trajet lorsqu’ils habitent loin du centre ville. Car le problème est bien là : l’éloignement croissent entre les nouvelles habitations et les lieux de travail et de loisirs.

Le Dr Givoni estime que le problème d’Israël commence avec une mauvaise planification de nouveaux quartiers, qui ne prend pas en compte les transports. Aujourd’hui, les nouveaux logements sont basés sur l’hypothèse que les familles posséderont des voitures, ce qui ne fera que renforcer les mauvaises habitudes.

Sa solution? Arrêter de construire de nouvelles routes. « Prolonger l’autoroute 531 est une erreur », affirme le Dr Givoni, qui a également étudié les transports à l’Université d’Oxford. «Il invite simplement les habitants de Kfar Saba, de Ra’anana et des environs à utiliser des voitures. C’est vrai qu’une nouvelle ligne de train est supposée fonctionner à côté de l’autoroute, mais elle n’aura pas assez d’utilisateurs. »

Il y a un vrai problème comportemental : il faut que les mentalités changent, et que la population comprenne combien ces embouteillages sont nuisibles.

Line Tubiana d’après Haaretz