Les trois sœurs de A-WA arborent leur identité avec fierté

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Après nous avoir fait danser avec leur premier album « Habib Grabi », les trois soeurs israéliennes de A-WA poursuivent leur métissage musical et stylistique entre musique traditionnelle Yéménite, Hip-Hop et éléctro.

Alors qu’on attend leur nouvel album Bayti Firasi pour le 31 mai 2019 et que leur première vidéo « Mudbira » venait de sortir, nous les avons rencontrés à l’hôtel Carlton, à Tel-Aviv. Bain d’énergie !

Alors que nous étions quelques jours à Tel-Aviv avec l’Europe Israel Press Association pour comprendre comment la ville se prépare à accueillir la 64e Eurovision en mai prochain, nous avons eu la chance de rencontrer des artistes de la scène musicale israéliennes au sens large. Parmi ces artistes : les trois soeurs du groupe A-WA, débordante de belles vibrations, d’histoire à raconter et habillées en princesses hip-hop, avec la griffe de adidas.

Comment avez-vous eu l’idée de mêler la musique traditionnelle yéménite et le hip-hop ?
C’est venu naturellement. Il y a d’abord la rythmique qui est la même. Et puis les chansons yéménites que chante notre grand-mère propose souvent, comme dans le hip hop, des messages politiques de protestation. Le lien entre les deux s’est fait naturellement.


Quel message politique ? Vous êtes trois sœurs et aussi bien dans le clip de Habib Galbi que dans Mudbira, on a l’impression que les hommes qui abusent finissent mal. Un petit message féministe ?
Nous avons grandi dans un petit village pas loin de la frontière égyptienne, au Sud d’Israël. Un village avec quelques habitants où nous avons tourné le clip du titre qui nous a fait connaître « Habib Galbi ». Il y avait des bergers et nous aimons bien cette idée que les grands leaders politiques, notamment dans la Bible, ont commencé par être bergers. Gérer un troupeau c’est une belle métaphore. Et dans nos clips en effet, notamment le premier, on nous vole nos moutons, où l’on tente de nous spolier. Nous faisons valoir nos droits, nous nous débattons et dans Habib Galbi nous courons vers notre liberté. Nous laissons le spectateur libre d’imaginer ce qu’il se passe pour les hommes mais en tout cas, il est vrai que nous sommes des femmes le monde de la musique qui est dit est dirigé par des hommes. Ce n’est pas toujours facile. Au Yémen les femmes étaient des citoyennes de seconde classe et nous sommes une nouvelle génération et on ne va pas accepter et se taire. C’est pour cela que nous avons créé notre propre entreprise, pour être indépendantes et nous exprimer librement.

Vos chorégraphies aussi mélangent les genres traditionnels et le hip hop d’aujourd’hui…
Oui, nous mélangeons aussi naturellement les pas traditionnels yéménite avec le hip hop. Nous aimons reprendre cet héritage, nous aimons aussi nous inspirer de la mode et des arts visuels et exprimer quelque chose de nouveau. Nous avons plusieurs identités dont nous sommes fières : femme, juives, israéliennes, yéménites et de notre temps. Nos grands-parents cédaient sur héritage pour s’assimiler et nous sommes une nouvelle génération : nous arborons notre identité avec fierté

Et côté style, votre dernier clip Mudbari est une explosion de couleurs et on ne peut pas ne pas adorer les chapeaux que vous arborez : cela vient aussi de la tradition ?
Par ailleurs pour les vêtements quand portez-vous les mêmes et quand portez-vous en des différents sur scène ? Nous sommes sœurs et nous aimons jouer avec cela. Parfois nous aimons porter quelque chose qui nous fait nous ressembler et accentue notre lien et parfois nous avons envie de nous séparer. Nous avons préparé le clip de Mudbari en nous inspirant de la tradition. Les formes étranges des chapeaux viennent de la chaleur. Pour se rafraîchir dans les longues journées, les femmes portaient des chapeaux très hauts qui gardaient de l’air frais. Nous avons donc acheté de la paille et fait faire les chapeaux. Nos robes couleur menthe du clip viennent d’une pierre spéciale au Yémen, qui a cette couleur bleue, de même que les collants rouges qui rappellent le corail du pays. De manière générale, à chaque fois que nous avons une séance photo nous préparons un moodboard pour mélanger les inspirations du hiphop du streetwear et des habits traditionnels du Yémen. Nos travaillons avec des gens très talentueux, par exemple, les chaussures du clip ont été créés par un désigner français. Il nous les a envoyées et on les a mises en valeur.

En quoi ce nouvel album est différent ?
Dans le premier album « Habib Galbi » (« Amour de mon cœur »), nous avons cherché des chansons traditionnelles yéménites existantes et nous les avons interprétées à notre manière. Pour le nouvel album, « Baytifirasi » (« Ma maison est dans ma tête »), nous avons tout fait nous-mêmes. Nous avons écrit et les textes et la musique pour raconter e voyage de notre arrière-grand-mère, Rohel, sa transhumance au Yémen et son arrivée en Israël. C’est une femme forte, qui a eu le courage de divorcer, de changer de pays, d’élever ses enfants. Nous avons appelé le premier titre « Mudbira », c’est-à-dire « malchanceuse », car avec tout ce qui lui est arrivé et sa recherche d’un toit, d’une maison, elle a eu une vie difficile.

Vous accepteriez de représenter Israël à l’Eurovision ?
Ce ne serait pas impossible car il faut rappeler que tous les vainqueurs de l’Eurovision sauf Netta sont s’origine yéménite ! Bien sûr qu’on ne peut pas dire « jamais », mais en même temps, nous avons envie de tracer notre propre chemin et chanter pour l’Eurovision force à se plier à pas mal de règles….

Les soeurs de A-AWA sont sur la scène du Café de la Danse le 11 juin 2019.

Source toutelaculture