Le maire LR de Valence Nicolas Daragon a fait voter, en conseil municipal, la vente d’un terrain de la ville à une école musulmane hors contrat qui serait par ailleurs proche des Frères musulmans. Quelques élus de gauche et de la LREM, défenseurs de l’école publique, sont montés au créneau.
Le point était à l’ordre du jour du conseil municipal du 27 juin dernier. Le maire de Valence a fait voter la vente d’un terrain municipal pour 500 000 euros à une association, « Valeurs et réussites », qui gère une école hors contrat musulmane appelée IQRA. Celle-ci, ouverte en 2012, compte pour l’instant deux classes hébergées dans les murs de la mosquée de Valence. Avec ce terrain, et donc avec la bénédiction de la Mairie LR, l’établissement a pour ambition de s’agrandir pour créer aussi un collège.
Le projet est étonnamment porté par le maire LR, qui est par ailleurs vice-président du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2016 et… proche de Laurent Wauquiez ! Le projet a été voté par l’ensemble des élus municipaux LR ainsi que par les élus d’opposition LFI. Mais, dans l’opposition, plusieurs élus se sont alarmés de ce soutien à une telle école hors contrat, contraire à leurs yeux à l’esprit républicain. Un élu ex-LREM, Bruno Casari, a ainsi voté contre et a demandé, en vain, des explications au maire, très peu prolixe sur le sujet lors du conseil municipal. Casari déplore ce soutien à une école hors contrat : « Dans ce type d’école, les profs ne sont pas obligés de suivre les programmes de l’Éducation nationale. Ce n’est pas ma vision de la République. » Il a écrit à la préfète et à l’inspecteur d’académie pour les alerter.
Un élu PS, Florent Méjan, a demandé le report de la délibération pour obtenir plus d’informations. « La majorité fait un cadeau à l’école avec ce terrain, c’est très communautariste », dénonce-t-il. Annie Roche, élue EELV, pourtant sur la même liste que les LFI, est aussi montée au créneau. Il faut dire qu’elle-même est une ancienne institutrice, fervente défenseure de l’école publique et laïque. Elle a enseigné dans le quartier où se situe l’école, et avait reçu de menaces de mort après s’être opposée, avant la loi de 2004, à ce que des petites filles viennent voilées dans sa classe, puis à ce que des mères accompagnatrices de sorties soient voilées. Elle s’alarme aussi que la municipalité puisse apporter son soutien à une école hors contrat et souligne aussi que l’école se situe sur un espace naturel sensible, qui normalement n’est pas constructible. « On change exprès le PLU pour vendre ce terrain », dénonce-t-elle.
Que dire sur cette école ? Le maire a expliqué en conseil municipal que des locaux plus grands permettraient à l’école de mettre en place un contrat avec l’Éducation nationale et régulariser ainsi sa situation. Nous avons contacté le rectorat, qui nous a répondu qu’aucune demande de passage sous contrat n’a pourtant été formulée par cette école. Par ailleurs, selon nos informations, des inspections ont pointé des problèmes : l’enseignement dans l’école présente des lacunes, filles et garçons seraient séparés dans les classes, les tout-petits porteraient des tenues islamiques. On voit d’ailleurs dans un article au sujet de l’école, publié sur un site communautaire, des photos de petites filles voilées – ce qui est autorisé au demeurant, puisqu’il s’agit d’une école privée.
L’école est présentée sur son site comme la « première école privée musulmane de la Drôme » et assure offrir « un apprentissage et un enseignement de qualité, tout ceci dans un cadre conforme à l’éthique musulmane. » Il s’agirait en l’occurrence, selon nos informations, d’une école proche des Frères musulmans. Ce que conteste le président de l’association Valeurs et réussites, Jabri Mourad. Mais notre informateur nous explique : « L’imam de la mosquée de Valence, qui héberge l’école, Abdlalah Dliouah, est un cadre de la SNCF identifié comme un pilier des Frères musulmans dans la région. Jabri Mourad est d’ailleurs de la même « obédience ». » L’imam a mis en place dans le quartier toute une galaxie d’associations qui seraient proches également des Frères, comme des associations d’aide aux devoirs, ou d’apprentissage de l’arabe par le Coran. C’est le cas notamment de l’association la Plume, présentée sur un site communautaire comme œuvrant pour un enseignement islamique à Valence et qui propose « la psalmodie et la mémorisation du Coran », ainsi que « l’apprentissage des actes d’adoration de base ». « Ces structures ont englobé des personnes qui tombent dans le repli communautaire, voire la radicalisation », nous explique-t-on. Certains observateurs locaux sont « très inquiets ». « L’École va alimenter le séparatisme, elle est susceptible d’alimenter l’islam radical. » Le préfet s’est opposé à la décision de la mairie, mais ne peut pas intervenir légalement pour empêcher la vente du terrain. Nous avons contacté le maire qui n’a pas donné suite.