Ce film trouvé sur le portable de Zaheer Hassan Mahmood, dénommé Ali H par la police, a été envoyé à deux personnes, dont une femme. L’homme de 25 ans, dont une nouvelle identité a été découverte, y déclare partir sur le « chemin du Prophète ».
Le profil s’affine au fur et à mesure des heures qui passent. Deux jours après l’attaque au hachoir qui a fait deux blessés devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, vendredi 25 septembre à Paris, les enquêteurs cherchent encore à cerner la personnalité, le parcours et les éventuels contacts du principal suspect, qui a reconnu les faits.
Les investigations ont notamment fait un bond avec la découverte du probable véritable nom de l’assaillant. Initialement, celui-ci s’était présenté comme Hassan Ali, le patronyme sous lequel il était enregistré comme mineur étranger isolé (surtout escroc!!!) auprès du conseil départemental du Val-d’Oise depuis 2018. Mais en exploitant son téléphone portable, les enquêteurs ont découvert une photo d’une pièce d’identité lui appartenant où figure un autre nom : celui de Zaheer Hassan Mahmood.
Sur ce document figure aussi une date de naissance très différente de son âge déclaré. Alors que pour l’administration française il était né le 10 août 2002, et avait donc 18 ans, cette pièce d’identité indique que Zaheer Hassan Mahmood est né le 25 janvier 1995. Il aurait donc 25 ans. Une découverte qui éclaire à ce titre les différentes photos de l’auteur de l’attaque qui avaient circulé après son interpellation et qui montraient davantage un jeune homme qu’un adolescent.
La France, un pays de « mécréants »
Munis de ces nouveaux éléments, les services enquêteurs cherchent donc à établir le parcours de ce Pakistanais, dont la langue maternelle semble être l’ourdou. Il serait entré dans l’espace Schengen par la Turquie, après un passage par l’Iran : une route migratoire relativement classique. A-t-il toutefois fait étape entre-temps dans un autre pays où il aurait éventuellement fait parler de lui ? C’est ce sur quoi travaille notamment la justice, en coordination avec les partenaires européens.
A ce stade, ce nouveau patronyme passé à la moulinette des fichiers de police et de renseignement n’a pas fait remonter davantage d’informations sur une éventuelle radicalisation. Seule certitude, Zaheer Hassan Mahmood a bien eu affaire à la justice française sous son autre nom pour port d’arme prohibé. C’était au moins de juin, à Paris, gare du Nord, et à l’époque il s’agissait déjà d’une feuille de boucher, et non d’un tournevis comme cela a été écrit.
Les enquêteurs s’intéressent également de près à un deuxième élément : une vidéo découverte dans son téléphone portable, et diffusée sur les réseaux sociaux, dont Le Point a révélé l’existence. Selon les informations du Monde, Zaheer Hassan Mahmood l’aurait envoyée jeudi ou vendredi matin avant de passer à l’acte, à deux personnes, un homme et une femme, qui sont tous les deux en garde à vue.
Selon une source proche du dossier, « il ne s’agit pas à proprement parler d’une vidéo de revendication » ou d’allégeance, comme on en voit souvent dans les dossiers terroristes. Sur les images, le jeune homme paraît exalté, il pleure, danse, et se plaint de sa vie en France, un pays de « mécréants ». Il explique notamment qu’il va partir sur le « chemin du Prophète », que ce chemin va « s’ouvrir » et qu’il est « béni ». Il psalmodie aussi des chants traditionnels pakistanais. Détail troublant, il indique aussi avoir pour « guide » le mollah Ilyas Qadri, chef de file de Dawat-e-Islami, un groupe religieux apolitique et non violent d’inspiration soufie, sis au Pakistan.
Succession de gardes à vue
Les personnes en garde à vue se sont succédées au cours du week-end. Cinq proches de Zaheer Hassan Mahmood, dont son petit frère de 16 ans, étaient encore auditionnées dimanche soir, selon une source judiciaire. Selon leurs premiers témoignages, dont Le Monde a eu connaissance – et qui peuvent évoluer –, le jeune homme faisait régulièrement ses prières mais ne s’était jamais montré particulièrement rigoriste. Il lui arrivait de consommer du cannabis. Un travail d’environnement est en cours pour déterminer s’il fréquentait un lieu de culte en particulier.
La garde à vue de trois des colocataires de Zaheer Hassan Mahmood a été levée entre samedi et dimanche. Quant à Youssef, l’Algérien de 33 ans qui avait été interpellé vendredi et présenté dans un premier temps comme le « second suspect » de l’attaque, il a été depuis totalement mis hors de cause. Les investigations ont montré qu’il avait même tenté de pourchasser l’assaillant dans le métro.
Sur le déroulé des faits, Zaheer Hassan Mahmood s’est montré en outre assez prolixe, chose rare en matière de terrorisme. Il a expliqué qu’il ne savait pas que la rédaction de Charlie Hebdo avait déménagé, il croyait donc être devant les locaux du journal quand il est passé à l’acte. Il avait effectué des repérages la veille du 25 septembre. Son geste a été principalement motivé par la republication des caricatures de Mahomet dans l’hebdomadaire satirique, lors de l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015, début septembre.
Son intention première était de mettre le feu à l’immeuble, a-t-il précisé. Les forces de l’ordre ont d’ailleurs retrouvé une bouteille de white-spirit dans son sac. Mais face à l’affluence dans la rue, il aurait changé de plan. Sortant une feuille de boucher, il s’en est pris à deux salariés de la société de production Premières Lignes, qui fumaient une cigarette sur le trottoir. L’homme et la femme, dont les jours ne sont pas en danger, ont été très sérieusement blessés, avec des coups portés à la tête et au visage.
Merci à la Police pour leur rapidité, bien que l’affaire ne semble pas finie !