Julie Ravouna-Hasson était une rescapée de la Shoah. Elle avait été arrêtée à Lyon en 1944, à l’âge de 16 ans et déportée à Auschwitz. Elle vient de s’éteindre, à son domicile, entourée de ses proches. Julie Ravouna était âgée de 93 ans.
Julie Ravouna-Hasson n’était encore qu’un nourrisson lorsqu’elle est arrivée en France en 1928 avec sa famille, originaire de Macédoine. Comme son frère cadet, elle est née dans l’actuelle Skopje, aujourd’hui en Serbie. Installés à Lyon, ses parents, juifs non pratiquants, étaient des marchands forains, spécialisés dans le commerce des tissus.
Mars 1944 : arrêtée et déportée versAuschwitz
Le 6 mars 1944, la Gestapo arrête son père, Salomon Hasson, à Lyon, avec plusieurs autres personnes juives. L’arrestation a eu lieu au café du Mâconnais, situé cours Gambetta. Sa femme, Victoire, son fils, Adrien et sa fille, Juliette, sont arrêtés le même jour à leur domicile de la rue Montesquieu, dans le 7e arrondissement de Lyon. Les quatre membres de la famille Hasson sont ensuite conduits à l’École du service de santé militaire, le siège de la Gestapo.
Julie, 16 ans, qui était élève dactylo au Lycée d’Enseignement Professionnel Jamet Buffereau, est ensuite enfermée à la prison de Montluc avant d’être transférée quelques jours plus tard, avec sa mère et son frère, au camp de Drancy. Une étape avant la déportation. Tous trois sont expédiés à Auschwitz le 27 mars 1944 dans le convoi numéro 70. Quant à Salomon Hasson, soupçonné de faire partie d’un réseau de résistants, il est torturé par Klaus Barbie et fusillé le 21 avril 1944.
A leur arrivée à Aushwitz, Julie et sa mère sont séparées d’Adrien. Leur mère est gazée quelques temps après. L’adolescente est employée à la laverie et à la confection de vêtements. En novembre 1944, elle est transférée près de Leipzig, affectée à la fabrication d’armement dans une usine. Elle est finalement évacuée à Theresienstadt en Tchécoslovaquie en avril 1945. Là, elle réussit à s’enfuir. A son retour des camps, elle a oublié jusqu’à son son nom et son prénom. La jeune fille amnésique ne se rappelle que d’un numéro de téléphone, celui de sa sœur aînée. Elle la retrouvera à Lyon, à la Libération. Elle retrouvera également sa plus jeune sœur, cachée pendant la guerre. Julie Ravouna-Hasson mettra plusieurs années avant de raconter ce qu’elle avait vécu. Au fil du temps, son matricule – 76207 – s’est presque effacé mais sa mémoire est restée intacte.
Cinquante années de silence …
Muette durant plusieurs décennies, Julie Ravouna-Hasson n’avait rien dit à ses enfants, pour les préserver. Elle a cependant laissé une trace de ce terrible passé, en faisant une cassette, pour laisser un témoignage à ses proches. Elle a finalement parlé pour la première fois publiquement de son arrestation et de sa déportation devant une caméra pour France 3 Rhône-Alpes. C’était en 2005.
« On en parlait pas petits bouts, mais dire ce qui nous était arrivé ‘était vraiment trop dur, on le gardait en soi, » avait-elle confié à notre équipe il y a 15 ans. C’est à ce moment que ses enfants et petits-enfants ont découvert l’histoire dramatique de leur mère.
Julie Ravouna-Hasson a ensuite livré son témoignage à plusieurs reprises devant des jeunes, notamment dans le collège de ses petites-filles. Son histoire a également été recueillie par l’Ina et la Fondation pour la Mémoire de la Shoah. Julie Ravouna-Hasson est décédée ce mardi 16 septembre, au petit matin. Ses obsèques ont eu lieu le jour même.
On n’oublie pas des personnes pareilles, paix à son âme !