Pinchas Goldschmidt, président de la Conférence des rabbins européens, analyse la recrudescence des actes antisémites perpétrés en France et dans le reste de l’Union européenne.
« Faut-il rester ou partir? » Cette question sera l’un des trois thèmes de débat qui sera organisé dimanche à Munich, en marge de la conférence annuelle sur la sécurité, le « Davos » des questions stratégiques. Le rabbin Goldschmidt a présidé la communauté juive de Moscou avant de succéder, en 2011, au rabbin Sitruk à la tête de la conférence des rabbins européens, basée à Bruxelles. La thématique du départ des Juifs d’Europe n’a pas été ajoutée au dernier moment, comme si elle prolongeait une crise qui vient de plus loin. Il livre au JDD sa réaction sur la hausse des agressions antisémites. Voici quelques extraits de son interview.
Comment avez-vous réagi cette semaine au débat sur l’augmentation des agressions antisémites?
Ce sont des chiffres qui traduisent ce que l’on vit au quotidien depuis des années et qui prouvent que le phénomène s’aggrave et nous conduit vers le pire. En France, nous étions focalisés depuis dix ans sur les attentats terroristes d’origine islamiste qui visaient notre communauté. Aujourd’hui, nous voyons ressurgir des comportements antisémites, qui coïncident avec le mouvement social des Gilets jaunes soutenu par l’extrême droite et l’extrême gauche françaises. En Allemagne, où les attaques ont progressé de plus de 50%, leurs auteurs sont en majorité des individus d’extrême droite. En Hongrie, nous avons assisté le week-end dernier à un rassemblement de néonazis venus de toute l’Europe.
Vous posez la question du départ des Juifs d’Europe pour ceux qui se sentent menacés. Quelle est la réalité des chiffres?
En une décennie, le nombre des Juifs en Europe est passé de 2 millions à 1,6 million. Ceux qui sont partis craignaient davantage le terrorisme islamiste que l’extrême droite. Mais s’ils partent, c’est parce qu’ils pensent à demain et à après-demain, à l’avenir de leurs enfants. Doivent-ils continuer à les faire venir dans des centres culturels comme celui où nous nous trouvons, derrière des portes blindées et sous surveillance en permanence? Ils se posent également certainement, je le crois, la question du respect qu’ils estiment ne plus avoir ici.
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